La vie politique revient à l'ère primaire

Personnellement je n’ai jamais été un ardent partisan du système des primaires en matière de désignation des candidat ( e )s aux élections décisives car elles n’offrent jamais des garanties suffisantes en matière d’organisation. Surtout dans des contextes de grandes agglomérations où tout contrôle humain réel est impossible… A Paris, il est vrai que l’UMP avait quelques antécédents en matière de falsification des scrutins. Les clans Dominati ou Tibéri ont fourni, dans un contexte pourtant déjà contraint par la loi, des exemples de méthodes permettant de bourrer les urnes. Au PS, tout n’est pas rose dans quelques départements, où l’on sait parfaitement constituer des listes d’adhérents ressemblant à l’annuaire téléphonique… Pour la seconde fois, il faut constater que les primaires ne sont pas encore dans les mœurs hexagonales, et Copé veut que le film soit désormais muet, tant il prête à rire… Décidément, il serait utile de rappeler à ce grand démocrate qu’avant de déblatérer sur le compte des autres, il pourrait « balayer devant sa porte ». Un seul constat s’impose : l’UMP est dans un état de délabrement que seuls des coups de Ripolin idéologiques portés par Le Figaro permettent de masquer.
Ruiné par les errements financiers latents de la campagne présidentielle, tronçonné par des querelles personnelles, fragilisé par la course poursuite du genre « je t’aime, moi non plus ! » vis-à-vis du Front national, engagé dans le bourbier nauséabond des manifestations contre le « mariage pour tous », miné par les scandales d’État qui peuvent éclater à tout moment, le principal parti de l’opposition ressemble de plus en plus à un moribond en fin de vie. La guerre entre Fillon et Copé, étouffée uniquement pour des raisons circonstancielles, couve sous les cendres des défaites antérieures. Et ce n’est pas l’épisode croquignolesque du « vote devant décider s’il devait y avoir un nouveau vote pour remplacer le vote vicié antérieur qui va arranger les choses ». En fait, il ne reste plus qu’un seul moyen d’exister : vociférer lors des questions à l’Assemblée nationale, diffusées dans les maisons de retraite individuelles à écran ouvert, et de jouer en permanence la provocation pour espérer faire illusion.
Dans le fond, il n’y a aucune raison pour la Gauche de se réjouir de cette déliquescence de l’UMP. Les socialistes auraient vraiment tort de penser que cette situation leur sera profitable. Elle conduit en effet inexorablement au discrédit du fonctionnement de la démocratie représentative. Or sans « partis politiques » capables de définir des orientations, des propositions et surtout de recueillir des engagements de gens motivés pour faire progresser des idées et contribuer au progrès social, rien n’est possible. On a remplacé partout la notion de « militant » par celle « d’adhérent » et celle « d’engagement » par celle de « consommation ». Les primaires renforcent cette évolution.
Est-on certain que les électrices et les électeurs qui ont « désigné » François Hollande sont encore derrière lui dans ce contexte difficile ? Ont-ils voté pour une vision politique ou pour un homme ? Qui peut affirmer que le vote manifestement truqué devant porter NKM au pinacle parisien sera un blanc-seing sur une autre gestion de la capitale ? En fait, les primaires tournent à un casting pour trouver celle ou celui qui semble pouvoir attirer le maximum de mécontents… Il n’est plus question de construire, mais simplement de fédérer autour d’une personnalité qui se vende bien dans les médias.
L’UMP, mal en point, va tenter d’appliquer ce pseudo processus démocratique et dans son état, elle va tout faire pour que les urnes confortent simplement la solution qui correspond le plus à son état. On ne change pas facilement les mauvaises habitudes… accentuant ainsi la montée dramatique du dégoût populaire de « la » politique. On sent bien quelles seront les conséquences de ces mascarades permanentes : abstention record prévisible pour les européennes en 2014 et « favorisation » par l’électorat des élus locaux se revendiquant comme « apolitiques », alors qu’ils sont très généralement de droite. Le scrutin de liste va accentuer ce phénomène puisque personne ne va s’afficher ouvertement d’un « parti »… la « société civile » sera appelée à la rescousse et plus encore les « vedettes » comme ce fut le cas aux USA. Et inexorablement, la technostructure prend le pouvoir pour pallier simplement la défaillance des partis. On le sait, le pouvoir a horreur du vide !

Cet article a 2 commentaires

  1. batistin

    C’est surement cette peur du vide qui aura affublé tant et tant d’élus à se passionner pour le saut à l’élastique, pantins du pouvoir suspendu en balance vers le bas, vers le haut, rêvant en échappatoire d’un parachute.
    Doré le parachute…
    Ou comment, si l’on vous suit monsieur dans votre description, ceux en charge de nos voix ne travaillent au fond qu’à soutenir leurs propres emplois.
    Ce qui, vous en conviendrez, n’encouragera personne à assumer son devoir civique, mais pousserai plutôt à n’en rien espérer d’autre que la satisfaction de s’être montré en Mairie le jour des élections.
    Ainsi être électeur est aussi devenu l’art du paraitre.

  2. Marae

    « …Or sans « partis politiques » capables de définir des orientations, des propositions et surtout de recueillir des engagements de gens motivés pour faire progresser des idées et contribuer au progrès social, rien n’est possible. »
    Les « partis politiques » méritent une définition, ou un développement: en 2005 – à la suite du référendum TCE – la dynamique des Comités Anti Libéraux a abouti à plus d’un centaine de propositions (avant d’exploser sous les coups des egos et des … partis! en 2007); et aujourd’hui, un peu partout se sont rées des associations citoyennes…
    Loin de moi l’idée de rejeter le parti politique; mais qu’est-il aujourd’hui devenu?

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