Le monde du profit aime bien les fantomes sans descendance

La face cachée du fonctionnement du monde du profit est particulièrement odieuse car elle méprise absolument tous les éléments fondamentaux du respect des gens ayant eu, à un moment ou à un autre recours à ses services. C’est ainsi que les principes même de l’honnêteté, de la loyauté sont bafouées dès que la mort entre en jeu. Il y a d’abord le pactole secret et surtout soigneusement ignoré des assurances vie non réclamées ou pour lesquelles rien n’est fait pour qu’elles soient réclamées. La situation des contrats en déshérence dans l’assurance-vie, c’est-à-dire ceux pour lesquels l’argent n’a pas été versé aux bénéficiaires désignés après le décès d’un assuré, ne s’améliore pas. Ce sont pourtant des sommes folles. « Nous avons constaté, grâce à nos contrôles, des pratiques scandaleuses, dont je ne soupçonnais même pas qu’elles puissent exister malgré mon expérience », a récemment expliqué Jean-Marie Levaux devant les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, avant sa nomination comme vice-président de l’ACP (Autorité de contrôle prudentiel : le « gendarme » des assureurs, des mutuelles et des institutions de prévoyance). Des centaines de millions et même des milliards d’euros sont en effet exploités au seul profit de l’assureur sans qu’aucun effort réel ne soit accompli pour en retrouver les bénéficiaires.

Durant cette intervention, il avait aussi confié que trois grands groupes ont été contrôlés. A la suite de ces contrôles, « l’ACP a adressé une lettre de rappel à l’ordre au premier (…). Pour les deux autres groupes, les irrégularités étant plus graves, une procédure de sanction a été engagée ».

Il ne s’agit vraisemblablement pas de détails : « Ce que nous avons vu est vraiment scandaleux, en particulier la passivité de certains assureurs dans le traitement des dossiers, a poursuivi le représentant de l’Autoriyé de contrôle prudentiel. Malgré la loi du 17 décembre 2007 permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés, de très nombreux dossiers restent en attente. » Pourquoi ces sommes folles ne sont-elles pas obligatoirement consignées sur des comptes de la Caisse des dépôts et consignations en attendant que se manifeste un éventuel bénéficiaire ? Les intérêts éventuels seraient affectés au financement de l’Allocation personnalisée d’Autonomie ! Mais permettre à ces pompes à fric de s’enrichir sur le dos des morts c’est effarant ?

Les assureurs ne sont pas les seuls mauvais élèves en matière de recherche de bénéficiaires des contrats d’assurance-vie en déshérence, c’est-à-dire ces contrats qui n’ont pas été payés au bénéficiaire après le décès d’un assuré. Selon la cour des comptes, les banques renfermeraient dans leurs comptabilité pas moins de… 1,2 milliard d’euros appartenant à des personnes disparues (décédées ou ne donnant plus de nouvelles depuis longtemps), pour lesquelles elles ne feraient pas de gros efforts lorsqu’il s’agit de rechercher les ayants droits. Compte bancaire, compte titres, livrets et placements divers sont concernés. Il faut y ajouter toutes les associations non dissoutes ayant eu il y a des décennies des comptes courants postaux. Il faut absolument mettre fin là encore à cette zone de non-droit…

C’est une proposition bienvenue, car à l’inverse des dispositions législatives qui pèsent sur les assureurs – qui seraient aussi renforcées par ce texte –, la loi est muette en ce qui concerne les banquiers. Une seule disposition leur est imposée : ils doivent transférer à l’État les sommes déposées sur des comptes sans mouvement depuis… trente ans ! Dans le fond banques et assureurs peuvent durant 30 ans récupérer sans aucun problème les bénéfices de sommes considérables qui ne leur appartiennent pas. Facile et surtout totalement immoral. Il est vrai que la moarle et le profit sont antinomiques voire totalement opposés.

Cette publication a un commentaire

  1. atelier amabati

    Les mots se sont construits au fil du temps et changent parfois de sens d’un siècle à l’autre, tout en gardant pourtant une racine immuable.
    Ainsi va la « richesse » de l’esprit et le « profit » que l’on a à s’améliorer sans cesse.
    Le langage, invention humaine merveilleuse, subit donc les « fluctuations » de la « valeur » des « échanges » entre les êtres.
    Aujourd’hui clairement, la « mort » n’est qu’une ligne « d’écriture » sur un « Grand Livre » qui semble avoir changé de main.
    Et le « vivant » ne se suffit plus à lui-même, puisque pour exister il se doit d’être réinventé et « breveté ».
    Quand on songe qu’il suffirait peut-être de se taire ou d’apprendre le langage des baleines pour accéder de nouveau au plus serein des « libéralismes ».

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