D'un 2 janvier à l'autre : le changement n'est pas pour maintenant !

Le petit journal 11 janvier 1914 -2Les premières impressions sont toujours les meilleurs dit-on de manière assez sommaire. Si c’est le cas on peut donc trouver dans l’histoire des indices sur ce que donne la suite d’un an nouveau selon la manière dont il débute. C’est ainsi que 2014 aura ceci de particulier que la comparaison avec 1914 sera inévitable. Il faut donc se tourner vers le 2 janvier de ce « millésime » entré pour des raisons bien sombres dans l’histoire française. Quel est le problème majeur de la société française il y a maintenant un siècle ? Rien de similaire avec ce que nous pouvons constater autour de nous pensez-vous. Et pourtant !

Voici ce qu’écrit le journal l’Humanité. Il existe depuis une décennie et il traite de la misère en France : « Aujourd’hui, à onze heures, a été inauguré, de la façon la plus simple,qui est la plus émouvante aussi, la onzième cantine maternelle de la région parisienne, celle du 12e arrondissement,10, rue de Madagascar.  Il reste deux arrondissements à doter de cantines à Paris, les 14e et 19e.Ils seront pourvus bientôt, et la Fédération portera tout son effort bienfaisant sur les départements. Dans trois mois, elle aura distribué à Paris son premier million de repas gratuits aux mères ou aux femmes appelées à le devenir bientôt. L’hiver qui augmente la misère, augmente aussi le nombre des habitués des bonnes auberges où la solidarité se manifeste sans morgue ni questions indiscrètes : on y donne en ce moment 25 000 repas pas mois ! » Imaginons un peu ce qu’il va se passer ce matin à 11h ? Plus d’un million de repas seront servis par ces nouvelles « cantines » que l’on appelle « les restos du Coeur »… et il n’est pas certain que le nombre des rationnaires n’aille pas en s’accroissant ! Cent ans plus tard l’année débute donc de la même manière car les mêmes causes, la faiblesse du politique et la domination du profit, produisent forcément toujours les mêmes effets !

Bien évidemment le 2 janvier 1914 on s’interroge sur… les capacités de l’Armée française a faire face à toutes ses missions. La Chambre des députés comme l’on disait alors, travaille ce jour-là (tiens donc il y a un changement!) et elle évoque « l’état de l’aviation française » mise à mal par la réduction des crédits militaires. Le député du Jura Adolphe Girod avait exposé la situation dans les termes suivants: « Si nous avons 54 avions mobilisables, nous avons du malheureusement constater, dans l’enquête, que pas une escadrille n’était complètement mobilisable, faute d’appareils de rechange, tracteurs, etc… »  Brillant élève fde l’école publique ayant démissionné de l’Armée où il était officier pour avoir essuyé un refus de sa hiérarchie de se marier avec la femme de son choix au prétexte que « la famille n’était pas honorable (sic » il a versé dans… le journalisme d’enquête ! Elu Député il deviendra un héros de la Grande Guerre et un homme politique extrêmement combatif ! Ce matin 2 janvier 2014, la situation de la flotte aérienne française qui intervient sur plusieurs théâtres d’opération est à peu près similaire et  le débat reste le même !

La défaite, de justesse, des rugbymen français face aux Irlandais fait la une des journaux en ce début 1914. Ils ont perdu 6-8 pour ne pas avoir su transformer leurs 2 essais (ils n’étaient attribué que 3 points par essai) le 1° janvier 1914 ! Pas moins de 4 d’entre eux ne savent pas encore qu’ils mourront dans les mois qui allaient suivre dans une autre guerre. Tous partiront sur le front et reviendront pour la majorité avec des blessures, des décorations et surtout l’impossibilité de jouer ensuite au rugby ! Un seul, Géo André, sortira du lot en devenant un athlète exceptionnel disputant 4 jeux olympiques. Le sport a pris en 1914 une nouvelle dimension et l’Auto, ancêtre de L’Équipe prend son essor. Les éditorialistes osent en parler ce qui est totalement nouveau « Ce qu’on peut souhaiter de mieux, au début de cette année qui s’ouvre, pour l’Europe et pour le monde, c’est douze mois de paix. » Le Petit Parisien du 2 janvier 1914 complète ses vœux en affirmant : « Les peuples veulent la paix pour travailler librement- pour que, la prospérité rétablie, les masses trouvent un peu de bien-être et de sécurité. » Cet appétit de paix si largement partagé, le puissant développement du sport depuis la fin du XIXe siècle pourrait en être une vivante expression. En découdre, oui, mais en des combats qui ne tuent pas et qui ne tournent pas aux affrontements nationalistes. Drôle de similitude quand on sait qu’un siècle plus tard le sport est devenu le refuge de millions de téléspectateurs et que le rugby balbutiant en 1914, prend désormais une place prépondérante dans la vie sociale. Le nationalisme n’a surtout pas disparu et mieux il sert d’exutoire à des excités au comportement pour le moins moins glorieux. Les plus célèbres plumes de l’hexagone commenteront le 2 janvier 2014 « l’affaire Anelka » qui dénote la valeur réelle de l’exemple sportif dans une société l’ayant oublié. Il y a longtemps que certains porteurs du maillot de l’Équipe de France ont méprisé la valeur de cet honneur.!Quand à donner sa vie pour la défendre c’est vraiment d’une autre époque !

Et il y a aussi l’éditorial de Jean Jaurés dans l’Humanité qui ne sait pas qu’il a moins de 8 mois de lutte incessante pour ses valeurs, à mener. Un extrait : «(…) la grève générale qui devait grouper, pour un effort collectif d’émancipation, tous les prolétaires affranchis à la fois par l’immense mouvement moderne des égoïsmes de la propriété individuelle et des étroitesses de la pensée corporative ». « Égoïsme ? »… « corporative » ?… sont vraiment des mots modernes d’une actualité brûlante le 2 janvier 2014 ! Par contre « grève générale »… « émancipation »… « prolétaires ».. sont bien des mots oubliés de 1914 !

Cette publication a un commentaire

  1. Eric Batistin

    « En 1913,
    John Pierpont Morgan Jr. hérita de l’énorme fortune de son père.
    Il deviendra le plus grand créancier privé des Alliés,
    notamment de la France, lors de la Première Guerre mondiale.

    En 1930, il sera, au même titre que la Banque de France,
    l’un des neufs actionnaires de la Banque des règlements internationaux (BRI). »

    En 2014 la BRI existe encore
    et se nourrit toujours de la dette des Nations,
    dette contractée auprès de fonds …privés !

    Joyeux anniversaire !

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