La mobilité estivale incontrôlée

10464213_719452261447776_8738822282522967860_nLes rues de Créon, un mercredi matin au cœur de l’été, ressemble à une rue urbaine commerçante piétonne au temps  pour de soldes… On se croise, on se suit, on s’installe devant un étal, on fouille dans les cageots de fruits pour dégoter la plus belle pêche ou le melon parfait à moindre prix, on discute, on regarde… bref des centaines de personnes arpentent l’espace public sans trop se soucier des autres. C’est une constante depuis que le marché hebdomadaire existe mais bien évidemment les étés se suivent mais ne se ressemblent pas. La grande vedette de ce type de matinée devient le téléphone mobile ! Il est partout et il occupe l’essentiel des motivations.

Assez surprenant de voir déambuler des mères de famille, des gamins ou des vacanciers avec leur super outil de communication rivé à l’oreille ou de constater qu’ils parlent seuls avec des fils qui tombent de leurs deux oreilles sur lesquelles ils ne dorment d’ailleurs pas toujours très bien. On téléphone pour n’importe quoi sans se soucier du voisinage. On raconte tout et n’importe quoi avec une indécence exceptionnelle. Sorti du cabas ou du sac le mobile permet de vérifier que les complexes ont disparu . Dans la queue devant la caisse on cause de sa nuit agitée ou on commente les boutons de varicelle du petit dernier en réalisant des prouesses pour, à la fois régler une addition en tirant l’argent d’un porte-monnaie verrouillé et porter les poches de ses achats tout en tenant le précieux téléphone collé à l’oreille…Peu importe les contorsions l’essentiel reste de ne pas perdre le contact avec l’au-delà ! « Tu sais je suis aller voir le pharmacien mais comme je n’avais pas d’ordonnance il n’a pas voulu me donner le médicament que je prends habituellement… Oui… tu as raison, c’est pénible ! Enfin je vais bien en trouver un de sympa ! ». Le reste des présents patiente et profite de dialogues ne devant le plus souvent rien à Audiard !

Le pire c’est quand deux téléphonistes conjuguent leurs efforts pour entremêler des conversations sans queue ni tête. « Tu m’entends ? Non ! Attends je bouge un peu… Et là ça va mieux… oui, je te disais que Claudine n’est plus avec Kévin !…

       – oui maman tout va bien ! On est bien installé…Attends … parle plus fort… oui ! On passera dimanche ! Oui ? Ouuuuuuuuuuuuuuui je fais attention ! Dis tu les veux comment les melons ?

      – Claudine ? Je sais pas… elle a disparu, je ne la vois plus ! 

      – Maman 6 euros es 2 ça te va ! »

Les scènes pittoresques se succèdent et même si l’on tente de ne pas entendre c’est absolument impossible. Arrêtés au milieu de la route les maniaques du mobile règlent des problèmes existentiels comme seul l’été permet d’en trouver. « Je te ramène quoi ? Des sardines ou du thon ? Le prix… Attends je demande… Je crois que le thon c’est mieux ! Et pour les légumes ?… Tu veux quoi avec ?… oui je te prends des œufs ! ». Bien évidement on ne saisit pas trop le sens réel de ces conversations sauf quand je suis assis à la maison contre la fenêtre entrouverte et qu’un quidam se croyant à l’abri des oreilles indiscrètes vient conter ses avatars amoureux sur le trottoir. Désopilant car l’usager (e) du mobile a de réflexes de péripatéticienne dès qu’il (elle) se trouve sur un trottoir. Il (elle) l’arpente sac en bandoulière pour philosopher sur son triste sort amoureux ou sur des différends réputés irrémédiables. Parfois la colère déborde et les noms d’oiseaux volent dans l’air ! Plus aucune retenue on se met à nu psychologiquement dans la rue comme si la solitude au cœur d la foule devenait une réalité absolue. Je pourrais dresser un hit-parade des mots de notre époque. « Connasse » paraît en vogue ! « Pédé » arrive pas loin derrière avec « je vais lui faire sa fête ! » ou « qu’il ne me cherche pas car il va me trouver ! ». On trouve aussi souvent « je m’en fous je fais ce que je veux ! » suivi à une courte longueur de « il a intérêt à venir me voir! »…Il y a en aurait d’autres mais la décence m’interdit de les faire figurer dans un palmarès sociologique sérieux.

En fait le plus sournois c’est le passionné du SMS qui marche en tapotant sur son clavier des messages sibyllins en langage secret qu’il est le seul à pratiquer. Cet adepte de la touche devient parfois dangereux car il oublie totalement les gens qui l’entourent et qui ont le regard tourné vers les étalages. La conduite de « smartphone » en état de SMS grave peut fortement nuire à la santé de celle ou celui qui arrive en face.

Bref la « mobilité active » qui demeure l’un de mes sujets de préoccupation nécessite, dans tous ses états une rééducation citoyenne accélérée. En été faites donc ce qu’il vous plaît sauf pour les « accros » du téléphone outil qui tue l’autonomie et surtout provoque de graves à la santé. On trouve même regardez bien autour de vous cet été des gens bronzé qui ont la trace du mobile sur leur oreille. Si vous en voyez sortes le vôtre pour vite faire une photo !

Cet article a 2 commentaires

  1. J.J.

    Je me demande comment depuis « erectus », puis « sapiens », puis « sapiens sapiens », l’humanité a pu se développer, et même survivre alors que nos infortunés ancêtres ne pouvaient jouir des services du téléphone portable.

    Dans le même ordre d’idée, on s’étonne de constater que César ait pu conquérir la Gaulle, Mozart écrire de la musique, Léonard peindre la Joconde sans cet indispensable accessoire !
    Et Phidias, et Démosthène, et Platon ! Comment ont-ils pu agir ?

    Si Léonidas, aux Thermopyles avait eu son téléphone portable, sans doute la face du monde eut été changée….

  2. J.J.

    Ça y est ! Je me souviens maintenant !

    Si Léonidas avait eu son téléphone portable, il n’aurait pas eu besoin de dire au passant d’aller dire à Sparte qu’ils étaient morts pour obéir à ses lois….

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