CANTONALES – L'importance capitale de la culture de proximité

La spécificité française de la loi du 1er juillet 1901 inquiète depuis maintenant plus d’une décennie l’Europe de la « concurrence libre et non faussée ». Il faut dire que c’est une spécificité de cette République ayant voulu que les citoyens puissent vraiment être acteurs de la vie quotidienne. Sous l’Ancien Régime, le terme « société » est consacré aux groupements volontaires de personnes dont le but est commercial, et celui de « communauté » aux autres. Il y avait souvent dans les villages des « société des secours mutuel » souvent fondées par des francs-maçons ou des « compagnons » du Tour de France. Il existait aussi de nombreuses associations récréatives ou « clubs » qui restaient informelles et officieuses.

Les communautés qui étaient considérées comme d’intérêt public, comme les communautés professionnelles, les associations d’assistance, les communautés d’habitants, les confréries charitables, avaient leurs statuts publiés comme lettres patentes, ce qui est l’équivalent actuel d’un décret en Conseil d’État. Si la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 évoque dans son article II la notion d’association, c’est pour parler d’ « association politique » dont « le but est des conserver les droits naturels et imprescriptibles de l’homme », pas du tout d’associations d’intérêt privé, éducatives, culturelles, charitables, ou cultuelles, qui vont rapidement être proscrites. Depuis 1901 des dizaines de millions « d’associations » ont rassemblé des gens passionnés par le partage d’une activité, d’une action collective, d’une idéologie ou d’une solidarité active.

Il ne pourrait plus y avoir la qualité de vie, surtout dans le secteur de la culture, dans les territoires sans un soutien fort aux propositions, aux projets, aux réalisations de milliers de bénévoles dont le travail motivé supplée souvent les « trous » institutionnels. Partout où le tissu associatif se dissout ou s’étiole, partout les idées du Front national progresse ! Que ce soit dans les quartiers dits sensibles ou dans les secteurs ruraux sans grands moyens ! Une étude sur Marseille a fait un lien direct entre ces deux phénomènes comme si la désertification de l’engagement citoyen profitait au chiendent de la haine et de l’égoïsme.

Le Conseil général et le conseil départemental malgré les dégâts causés en 2012 par la suppression de la taxe professionnelle sur les dépenses non-obligatoires a décidé de maintenir en 2015 les mêmes efforts en matière de soutien au sport, à la culture et aux structures sociales. Pas facile puisque face au désengagement de certaines collectivités locales car on demande toujours plus au niveau du département comme si ses ressources étaient extensibles. Désormais les textes européens sont justement très préoccupant sur la notion de « subvention » qui ne peuvent être affectées que pour des initiatives concrètes et surtout plus liées à un simple fonctionnement. En effet la séparation entre les « association d’intérêt général à caractère économique » et celles « d’intérêt général non économique » va devenir délicate à appliquer. Il n’est plus possible de répéter des sommes d’une année sur l’autre sans une appréciation des projets proposés!

Dans l’immédiat le Conseil départemental restera sur la notion de projet et donc il maintiendra ses efforts en matière de manifestations selon un barème très clair, en matière de création d’emplois pérennes, en matière d’apprentissages sportifs et artistiques, en matière d’équipements pour les pratiques diversifiées. Dans cet état d’esprit la proposition de mise en place de conventions cadres d’objectifs avec avenant financier annuel pourrait favoriser la « sécurisation » des « soutiens » nécessaires à l’activité associative. Il existe une charte nationale « Etat-collectivités territoriales-associations » signée début 2013 qui doit être absolument mise en place en Gironde… mais malheureusement les services de l’État n’ont pas l’air très motivés ! Si l’on prend l’exemple du canton de Créon dans sa configuration 2014 on arrive à 104 associations partenaires à un titre ou un autre du Conseil général. Il faudrait absolument leur offrir un plan triennal

Seulement 25 d’entre elles ont perçu au titre de la culture en fonctionnement ou pour leurs investissements (instruments de musique, matériel éducatif, restaurations diverses) un total de 110 000 € pour leurs actions en 2014 ! En ce qui concerne les appels à projets culturels dans les collèges on approche les 15 000 € alors que pour les investissements des communes dans le domaine du patrimoine local plus de 110 000 € ! Bien évidemment ces soutiens ne peuvent exister que parce que des animateurs associatifs existent et portent dans tous les domaines de la culture une certaine idée concrète de la citoyenneté ! Ce sont eux qui tissent sur le territoire des initiatives dans une période terrible où la bêtise, l’amalgame, l’approximation, la facilité, l’acculturation ne cessent de progresser. Cette action de la majorité départementale solidaire pour voter le budget s’inscrit dans la durée… mais sera-t-elle appréciée par un électorat fasciné par le prêt à porter idéologique ?
Jean-Marie Darmian

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