Un été sans chaleur culturelle condamne la société à mourir de froid

Tout l’été la France se met sur son trente et un culturel avec de multiples initiatives destinées à mettre en valeur une forme ou une autre de création artistique. Certains villages se sont construits une vraie notoriété sur leur capacité à mobiliser la foule autour d’événements créés et surtout développés durant des décennies. Ce que personne n’ose écrire et dire c’est que ces moments plus ou moins longs, fruits d’un investissement bénévole, ont de fortes retombées économiques. Qui oserait par exemple abandonner le festival gersois de Marciac, celui de la Chaise-Dieu ou des Vieilles charrues ? Ces initiatives génèrent en effet des chiffes d’affaires considérables pour des commerçants sédentaires ou venus spécialement pour les accompagner sur la durée.
Durant tout l’été des dizaines de milliers de concerts alimentent, selon le standing des organisateurs et donc leurs moyens, des marchés d’été, des fêtes de village, des journées thématiques, des rencontres artistiques ou des festivals régionaux, nationaux ou internationaux. Partout l’objectif reste identique : rapprocher une partie de la population locale ou de passage, d’une forme simpliste ou ambitieuse de culture. Et surtout de maintenir ou de retisser ce fameux lien social qui s’étiole toute l’année alors qu’il peut retrouver une part de sa solidité en été !
Jamais les artistes n’ont été autant utiles à une société à la dérive. Tous quelles que soient leurs ambitions portent en effet le même message du rassemblement autour de l’intelligence et de la création ancienne ou moderne. Nier leur importance c’est condamner la période estivale à devenir simplement un vaste temple de la consommation sous toutes ses formes. Parfois aiguillons provocateurs ils apportent une dimension humaniste tellement réconfortante à des soirées, à des journées rongées habituellement par l’ennui et la « stéréotypisation » des activités. Ils peuvent également apporter le plaisir à des passionnés qui savent apprécier la juste valeur d’une prestation. Mais le plus important demeure cette vulgarisation culturelle qu’il est malsain d’évoquer alors qu’elle constitue pourtant l’antidote à l’indifférence générée par une télévision d’une pauvreté affligeante en été.
D’ailleurs une partie de la droite et de l’extrême-droite en ont totalement conscience et vont entreprendre de réduire par tous les moyens cette facette de la vie sociale. Au conseil départemental de la Gironde les premières prises de positions du FN révèlent des consignes nationales claires : haro sur la diversité culturelle présentée comme une gabegie financière de gauche ! Ainsi le candidat Front national pour les régionales en Ile-de-France Wallerand de Saint-Just souhaite faire baisser le budget culture de la région de 35 millions d’euros en cas de victoire aux élections de décembre prochain. Une baisse de 35 millions d’euros du budget de la culture représenterait une économie de plus de 30% sur ce poste de dépense. Le budget des équipements culturels passerait de 18 à 9 millions d’euros et celui concernant les arts et scènes de rue de 36 à 16 millions d’euros. Enfin, le budget consacré au cinéma et à l’audiovisuel perdrait 10 millions d’euros pour passer de 18 à 8 millions d’euros. « Ces économies serviraient à financer une baisse des impôts (1) et les transports, c’est une question de choix politique », détaille le candidat Front national. Les objectifs du FN en Ile-de-France sont simples: « amener la culture au plus grand nombre ». Cela passe par le développement de la « culture populaire et traditionnelle » (sic) à l’opposée des « créateurs auto-proclamés avant-gardistes » (sic), est-il expliqué dans une note sur la politique actuelle du conseil régional. Il s’agit de « faire mieux avec moins » et de « renouer avec l’idéal de la démocratisation culturelle tout en prenant conscience des réalités budgétaires » (sic). Si on ajoute le cas de Fréjus sur les ateliers d’artistes et les coupes sélectives effectuées dans les subventions par certaines nouvelles municipalités de droite on va en 2016 vers des étés arides !
Chaque disparition d’un concert, d’une animation grand public, d’une exposition, d’une diffusion culturelle renforcera la haine, l’exclusion, le dérapage sociétal. L’été de tous les dangers approche ! Les difficultés financières annoncées pour les collectivités locales accentuent les risques de réduction des crédits affectés au monde des bénévoles créateurs de manifestations en tous genres. Seules celles qui seront les plus à l’aise en matière financière pourront maintenir des rendez-vous grand public ou gratuites… et donc en tirer un profit politique évident. Pour les autres, il leur faudra assumer des positions guère différentes de celles énoncées plus haut ! Et avant 2017 les dégâts risquent d’être considérables…
(1) La région ne levant pas l’impôt c’est encore une affirmation poujadiste honteuse

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