Des sorties ressemblant à des voies sans issue

Les conseillers en communication de François Hollande restent persuadés que la multiplication des déplacements permettra de renouer les liens perdus entre le peuple et un Président. Encore une fois, coupés du monde réel, ces spécialistes enfoncent davantage celui qui depuis belle lurette n’a plus de charisme. Qu’il aille au cul des vaches, dans les usines les plus réputées, sur les glaciers en perdition ou dans les quartiers sensibles, il n’a plus la crédibilité nécessaire pour imposer la force d’une présence. En fait c’est la politique au sens global qui devient tellement discréditée que quel que soit l’élu présent à l’Elysée il ne peut plus au fil des mois tisser un lien privilégié avec l’opinion publique. Hollande paie une situation qui se détériore depuis une décennie..
De Gaulle avait réussi cette extraordinaire performance de sillonner la France pour des déplacements réellement populaires sans autre but que celui de s’arrêter de petites villes en petites villes pour décliner un message réellement mobilisateur suivi de bains de foules. En buvant le café avec les éboueurs ou en s’invitant à souper chez des Français anonymes, ses vœux au coin de la cheminée Giscard cherchait en vain à casser le portrait du hobereau méprisant. Mitterrand avait fait un tout autre choix avec des apparitions solennelles rares ou des rendez-vous réguliers marquant une fidélité à des lieux symboliques pour maintenir des références populaires. Chirac a joué sur la carte de la faconde, de la proximité sans aucune arrière-pensée et justement le calcul médiatique reposait sur la théorie de la construction d’une image anti-mitterrandienne. Il a fallu Sarkozy pour inventer les sorties coup de poing servant à démontrer que l’agité avait du punch et peur de rien. il a tellement dérapé que l’effet boomerang a été destructeur. Hollande n’a jamais opté pour une stratégie , naviguant à vue selon les sondages mais reposant sur « la simplicité ».
Un proche me racontait que lors de la première réunion du cabinet présidentiel le nouveau président avait tracé un programme : « je veux être à l’opposé de mon prédécesseur, être simple, accessible, modeste » Et il décida de conserver son numéro de mobile afin d’être joignable à tout moment par ses « amis politiques »… Une erreur colossale puisque il fut vite envahi par plus d’une centaine de SMS quotidiens sollicitant un soutien, un avis, un poste ou un appel. Il avait alors deux réponses automatiques : « oui » ou « je mets à l’étude » mais il avait refusé « non » ce qui permit à de nombreux courtisans de se croire écoutés. A partir du moment où on n’entre pas immédiatement dans un vrai costume de Président avec ce que cela comporte comme obligation de se protéger ou de s’isoler pour instaurer une distance entre soi et les événements c’est mortel en terme d’image.
Ainsi il est très intéressant de comparer la visite sur le site de La Courneuve de Sarkozy et de Hollande. Le premier avait promis de « Karchériser la racaille… » et le second est allé parler à des gens sans boulot, survivant grâce à l’économie parallèle, en échec social et culturel de leur apporter le soutien d’une « agence nationale de développement économique » invention d’un énarque et qui n’aura aucun impact sur la précarité des quartiers sensibles. Les gens l’attendaient pour le huer et lui reprocher son inaction. Comment a-t-on pu imaginer parmi ses éminents conseillers que les médias retiendraient les missions de l’ANDE alors qu’ils venaient justement pour savoir comment il serait accueilli !
Bien cerné par la foule et par ses gardes du corps, le visage renfrogné ou mécontent le Président a affirmé être venu « pour montrer que les quartiers ont du talent, de la créativité, que des emplois peuvent être créés ». Interrogé sur les huées à son encontre, le président a répondu à la presse: « J’ai entendu aussi des applaudissements (sic). Ce qu’il faut combattre, c’est la déception » alors qu’il aurait dû stigmatiser « l’abandon ».
Dans le discours qui a suivi, il a plaidé pour l’égalité des chances: « Il n’y a pas de quartier perdu dans la République. Il n’y a pas une France périphérique ». Affirmant que son rôle était d’assurer « l’égalité », le président a jugé qu' »on ne peut avoir une France qui serait disparate, un puzzle » face au développement économique.  « Veut-on la même France ou doit-on être séparé, (être) pour les uns pour les autres des suspects parce qu’on ne serait pas du bon quartier, de la bonne couleur de peau ? C’est un enjeu considérable », a remarqué le chef de l’État. Philippe Madrelle durant des années a fait plut clair et plus rapide en parlant dans tous ses discours, tous ses actes du refus d’une « Gironde à deux vitesses », c’est plus clair, plus simple, plus concret et surtout plus compréhensible ! Même si François Hollande a raison sur le fond il a tort sur la forme trop « énarquisée », trop décalée, trop sophistiquée !
Si l’on fait un bilan rapide, les journaux n’ont retenu que les huées, les apostrophes, le chahut selon leur positionnement politique mais absolument pas le contenu du discours ! Aller sur le terrain pour délivrer un message est devenu négatif car artificiel car les gens attendent des actes concrets, proches, rapides, instantanés mais pas des annonces auxquelles ils ne croient plus car elles sont totalement étrangères à leur quotidien.

Cette publication a un commentaire

  1. Georges SIMARD

    Les conseillers en communication n’en peuvent mais !
    C’est le fond politique qui est très mauvais.
    On retombe dans les errements de :
    L’union sacrée (1914-1948)
    Le cartel de gooôches
    la non intervention en Espagne + Vichy + « ma semaine des deux dimanches »
    Jules Moch (1948)
    Guy Mollet (1956)
    Delors (1982 …)
    Jospin …
    Et on s’étonne que le lien soit rompu avec le peuple de gooôche ?
    Un siècle de trahisons de la classe ouvrière ça commence à suffire, vous ne croyez pas ?
    Salut et fraternité !

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