Encore un élargissement du précipice entre élus et population

Le constat est partout le même : le politique perd chaque jour davantage de son crédit et fait place au populisme le plus dangereux ! Prétendre que tout est fait afin que ce sentiment d’éloignement du citoyen des décisions prises devient totalement impossible. Au contraire les preuves de cette plaie consistant à se moquer de ses mandants s’accumulent. Ainsi partout se met en place le volet intercommunal de la fameuse loi NOTRe qui devrait donner une répartition plus efficace et plus économe du réseau des collectivités territoriales. Les Préfets doivent avant le 31 mars arrêter des périmètres des communautés de communes basées sur une population minimum de 15 000 habitants. Une référence qui a failli être à 20 000 mais que les sénateurs (trices) ont amendé afin d’éviter des superficies trop déshumanisées à ces entités qui ne constituent que des outils au service des communes.
Les représentants de l’État ont donc fait, conformément à la loi, des propositions depuis la mi-octobre 2015 et ont recueilli les avis de toutes les assemblées délibérantes avant la fin de l’année. Il s’agit avec ce schéma départemental d’atteindre un double objectif : se mettre en conformité avec la loi et donner une assise territoriale suffisante aux nouvelles intercommunalités. Le bilan de la consultation a été présenté à une commission départementale de coopération intercommunale composée de représentants des maires, des présidents de structures intercommunales, de la métropole, du département et de la région. Au total en Gironde 53 membres qui doivent se prononcer sur le schéma ou sur des amendements déposés par l’un(e) des membres de la commission se sont réunis déjà à 2 reprises… pour se prononcer sur des améliorations possibles des hypothèses préfectorales. La répartition « droite-gauche » étant équilibrée et compte-tenu de la nécessité d’obtenir une majorité des 2/3 pour modifier le schéma. S’il n’y a pas « entente cordiale » entre les 2 camps le résultat est incertain et donc le préfet a le pouvoir.
Rares, très rares sont les électrices et les électeurs qui ont conscience de ce processus. Il va pourtant déboucher sur des décisions touchant au quotidien des dizaines de milliers d’entre eux. Maisons de la petite enfance, centre de loisirs, manifestations culturelles, associations de toute nature, services aux personnes âgées, transports de proximité, réunions de compte-rendu de mandats, démocratie locale… sont en jeu dans les votes de cette commission qui peut soit les affaiblir ou leur donner une puissance supplémentaire en les adaptant à des bassins de vie réduits ou plus larges. Dès 1996 j’ai été l’un des maires qui a tout tenté pour construire une intercommunalité fonctionnelle, cohérente, solidaire et en 2001 je suis parvenu à créer la première communauté de communes sur la vaste canton de Créon.
Des dizaines de réunions, des débats à n’en plus finir sur les compétences, les statuts, le projet mais à l’arrivée un mandat constructif avec des décisions toujours prises à l’unanimité d’un conseil communautaire pourtant très éclectique. Des votes arrachés à la persuasion. Des crédits décrochés par la motivation. Des équipements (2 maisons neuves de l’enfance, une salle multisports, une maison du patrimoine naturel, un relais des services publics, une ludothèque) des clubs sportifs consolidés, des actions culturelles (musique, bibliothèques) mutualisées et tant d’autres réalisations que seules les petites communes n’auraient jamais pu proposer à leurs habitants. Une volonté collective reconnue par les habitants et surtout un projet d’autogestion associative dans tous le secteurs qui a impliqué les citoyens dans la création des structures destinées à eux-mêmes ou à leurs enfants. Des dizaines d’emplois associatifs créés et un coût de gestion réduite au minimum grâce à cet engagement de gens conscients des enjeux. Les habitants d’abord ! Les services toujours ! La gestion au service des enfants, des défavorisés, des familles, des actifs, des imaginatifs, des créatifs sans frilosité et sans égoïsme communal !
Lors de la réunion de la CDCI rien de tout cela mais des arrangements secrets, des échanges convenus, des coups bas sournois, des manœuvres tordues, des résistances égocentriques, des oublis fâcheux et une ignorance totale de l’avis éventuel de la population. On a voté et on a réglé ses comptes (dépasser 15 000 habitants pour ceux qui ne les ont pas) entre barons roses ou bleus sous la houlette éberluée du Préfet. Tout avait été négocié. Les consignes avaient été données. On a voté sur consignes sur des secteurs inconnus avec une seule idée : préserver les intérêts des plus forts au détriment des plus faibles ! Le puzzle est presque plus compliqué maintenant qu’antérieurement. On a taillé, découpé, ajusté, exécuté… dans le silence. Une impression désagréable de venir assister à un partage de dépouilles de quelques « gibiers » blessés, affaiblis pour conforter les situations des plus aguerris.
J’ai levé la main quand je croyais bon de le faire. Je l’ai gardée sur la table quand je croyais bon de le faire. J’ai tout de même le sentiment d’un beau gâchis, d’une opportunité encore manquée de réconcilier les habitants avec la démocratie. Ils vont apprendre pour certains ce matin que leurs enfants devront changer de centre de loisirs, de crèche, de halte-garderie, d’école de musique, d’élus de référence et que la loi NOTre va faire leur bonheur quotidien dès le 1° janvier 2017 en les répartissant dans de nouvelles communautés sur des critères incertains.
En tous cas j’ai pris un sacré coup au moral et vraiment je ne crois plus, mais plus du tout, en cette forme de politique et c’est justement ce qui me fera y rester pour proposer autre chose ! Seul le temps permet d’avoir un jour raison… on en reparlera en juin 2017 !

(1) Pour plus d’explications venez aux réunions de compte-rendu de mandat de conseiller départemental à Tresses (salle de La Fontaine) le 22 mars à 19 h ou à Quinsac le 29 à la même heure (salle de motricité).

Cet article a 9 commentaires

  1. bernadette

    La loi SRU penalise la propriete privée et son propriétaire. Nous ne sommes pas en URSS. Le collectivisme a amené le plus grand pays à une revolution. Non la France ne peut être soumise à cette incurie

  2. vinz

    Mon très cher Jean-Marie,
    Je te plains sincèrement d’avoir eu à vivre cette mise à mort de la démocratie de l’intérieur. J’ai suivi de loin les manoeuvres bassement politiciennes et j’ai la même impression qu’au lendemain du réferendum de 2005: Il y avait une projet cohérent (de fusionner les trois cdc du territoire Artolie, portes et créonnais) qui avait reçu l’accord de 20 conseils municipaux sur 30 (je crois) et qui représentait 55% de la population. Après tractations en coulisses, ce projet a eu… 3 voix sur 56 en CDC (dont la tienne)I!!!!!! Elle est belle notre démocratie de partis.!!!
    Ce découpage aurait été décidé dans les bureaux de la Mairie de Bordeaux.
    Je crois que les gens ont besoin de savoir comment tout cela s’est décidé. Même si cela peut faire le jeu des populistes, à un moment donné, il faut leur mettre le nez dans leur …. à ces barons locaux qui n’ont aucun projet de territoire si ce n’est de garder leur petit pouvoir local…
    Une bien triste journée pour la démocratie…

    1. bernadette

      Absolument d’accord avec votre analyse sur le sujet. Le journal municipal aurait pu expliquer cela avec plus de respect pour les contribuables. Parce que eux vont devoir payer l’addition sa s aucune explication. C’est un déni de démocratie.

      La loi notre est u

      s u

  3. BB

    Merci cher JMD de mettre une fois de plus le doigt là ou ça fait mal, avec votre justesse habituelle. Je regrette seulement dans votre constat , le mot populisme, comme s’il s’agissait d’une maladie émergente venue de nulle part. Il s’agit à mon sens beaucoup plus d’un mélange de résignation et de colère irrationnelle devant les comportements récurrents de beaucoup de nos élus locaux et nationaux des partis dits républicains, qui se refusent obstinément à changer de logiciel vis à vis de leurs concitoyens (absence de proximité naturelle et spontanée; non-ouverture à la société civile; opacité persistante des décisions et financements; persistance du cumul des mandats dans le temps et dans l’espace; entre-soi et pré-décisions en petits cénacle présentés comme des consultations démocratiques, etc….) Les modèle suisses et scandinaves de fonctionnement démocratique avec un minimum de sobriété, de frugalité et de modestie respectueuse de la part des élus de toutes tendances a tant de mal a passer les frontières….. Et ceci malheureusement, n’est ni une question de génération, ni une question de parti…., les plus jeunes de nos élus marchant très allégrement sur la trace de certains de leurs ainés. Il n’y a qu’à voir les auto-proclamations locales ou nationales dans tous les partis de toutes celles et tous ceux qui s’auto-déclarent légitimes, représentatifs, excellents, prêts (à tout ? à quoi ? ). Je fais partie des citoyens privilégiés de ce pays. Mais comment ne pas comprendre ceux qui sont dans la mélasse pour lesquels les politiques deviennent au mieux transparents, au pire des repoussoirs ? Et que l’on ne laisse pas penser que ceci est de la « faute » d’un seul homme au sommet de l’état ou d’un gouvernement donné. Alors le populisme ………

  4. Baqué Christian

    Tout à fait d’accord. La loi NOTRe, digne héritière de la loi Sarkozy qu’elle prolonge et aggrave, se révèle comme une machine de guerre, semant la zizanie la division et le chacun pour soi. « On a taillé, découpé, ajusté, exécuté… » Le blayais en est victime grâce aux arrangements de deux « barons » soi-disant « ennemis », sur le dos de la CDC de St Savin charcutée (perte de 5000 habitants!) et de celle de Bourg, coupée en deux. Passe-moi la rhubarbe, je te passe le séné. Chacun son fief. Un travail commun d’une quinzaine d’années foutu en l’air. Une appellation viticole massacrée (Côtes de Bourg). Pour nos concitoyens, quel visage déplorable de la politique, des partis, donné par ces élus. Ne nous étonnons plus du « tous pourris » du rejet électoral, des abstentions à 50% et plus. L’exemple vient de haut. Un espoir : que la mobilisation massive contre le dynamitage du Code électoral, avec les confédérations ouvrières, la grève qui se prépare, permettent d’entreprendre la remise des choses dans le bon sens. Nous n’en sortirons que par cette bonne vieille lutte des classes !

    1. bernadette

      Non, la grève concerne l’entreprise, les usagers, on n’en a rien à faire. Les usagers sont des hommes, des femmes, des jeunes scolarisés ou pas à la capitale régionale.

  5. J.J.

    Sarkozy l’ a rêvé, Hollande l’a fait…..
    Honte ! Honte ! Honte !

  6. Sanz

    Je partage votre point de vue, cher Monsieur Darmian, et je suis aussi tout à fait d’accord avec cet état des lieux – je cite :
    « comportements récurrents de beaucoup de nos élus locaux et nationaux des partis dits républicains, qui se refusent obstinément à changer de logiciel vis à vis de leurs concitoyens (absence de proximité naturelle et spontanée; non-ouverture à la société civile; opacité persistante des décisions et financements; persistance du cumul des mandats dans le temps et dans l’espace; entre-soi et pré-décisions en petits cénacle présentés comme des consultations démocratiques, etc….) »
    et aussi ceci :
    « comment ne pas comprendre ceux qui sont dans la mélasse pour lesquels les politiques deviennent au mieux transparents, au pire des repoussoirs ? Et que l’on ne laisse pas penser que ceci est de la « faute » d’un seul homme au sommet de l’état ou d’un gouvernement donné. »
    Oui, il ne faut pas laisser penser que ceci résulte de la « faute » d’un seul homme au sommet de l’état ou d’un gouvernement donné. Le problème en serait bien plus facile à résoudre.
    Pour lutter contre « ce sentiment d’un beau gâchis », je crois dans le numérique en ce qu’il représente une opportunité (à ne pas manquer !) pour réconcilier les habitants avec la démocratie.
    A l’opacité organisée, aux silences coupables, aux oublis fâcheux, il est possible de créer les conditions d’un espace public numérique pour reprendre les rênes d’une organisation qui soit à nouveau démocratique.
    Je vous invite à consulter le site du Conseil national du numérique ici : http://www.cnnumerique.fr/presentation-enjeux-rapport/. Cette instance construit des réponses, travaille à l’élaboration de nouvelles formes de coopération que la technique numérique permet d’instituer et finalement œuvre à une nouvelle manière de faire de la politique et d’y investir les citoyens.
    Au fait, quelle a été la place du numérique dans cette loi Notre ?
    Bien amicalement

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