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Le courant ne passe plus avec le nucléaire

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a enjoint il y a quelques jours à EDF d’arrêter cinq nouveaux réacteurs de son parc pour vérifier l’état des générateurs de vapeur. Ils pourraient être affectés par un problème de « ségrégation carbone », c’est-à-dire une trop forte concentration de carbone à certains endroits (les fonds primaires) selon les spécialistes que le commun des mortels a bien du mal à suivre. Le nucléaire est en effet une filière dans laquelle les débats techniques dont les conséquences ne sont pas toujours très compréhensibles. Les réacteurs concernés par cette mesure sont ceux de Civaux 1, Fessenheim 1, Gravelines 4, Tricastin 2 et 4 menacés d’une moindre résistance de l’acier qui sert à construire ces générateurs qui équipent 18 réacteurs sur les 58 du parc français d’EDF, pour les tranches de 900 MW ou 1 450 MW. Principe de précaution ou alerte sérieuse ? Qui le sait vraiment ? On apprend en effet toujours à posteriori qu’un danger existait dans les installations nucléaires ce qui rend méfiant sur la réalité du fonctionnement de ces centrales.

En tous cas la France a considérablement baissé sa production électrique à l’approche d’un hiver que certes personne ne prévoit très rigoureux contrairement aux fausses informations diffusées sur les réseaux sociaux mais qui nécessitera toujours une distribution en hausse. EDF a en effet annoncé qu’il abaissait son objectif de production nucléaire pour l’année 2016, et qu’il revoyait à la baisse son objectif d’excédent brut d’exploitation c’est à dire le montant global de toutes ses ventes. Les nouveaux objectifs de résultats d’EDF sont affichés pour la troisième fois, à la baisse, en raison du problème concernant plusieurs de ses réacteurs, mais aussi de la régularisation tarifaire attendue suite à un arrêt du Conseil d’État rendu mi-juin… En plus le gouvernement via Ségolène Royal a mis en garde le mastodonte de l’énergie en lui rappelant qu’il était « impératif » de « maîtriser la situation pour assurer la continuité de l’approvisionnement » ce qui ne peut se faire que par des achats extérieurs en cas de poussée de la consommation. Au total EDF devrait perdre un petit milliard d’euros dans cette aventure… ce qui a entraîné une chute de son action.

Il est vrai que l’examen de la production d’électricité en France résume parfaitement la faiblesse de la diversification des sources. D’abord elle a atteint 1,1% de plus en 2015 qu’en 2014 quand la consommation a eu une croissance supérieure à 2 %. Plus de 75 % de cette production proviennent toujours du parc nucléaire de 58 réacteurs . L’hydroélectricité reste la deuxième source d’électricité malgré une forte baisse de sa production par rapport à 2014 (- 13,7%) en raison d’un niveau de pluviométrie bien plus faible et ce sera encore pire cette année. Par contre la contribution des autres énergies renouvelables a fortement augmenté en 2015 mais restent très marginales.

Le parc éolien, dont la puissance raccordée au réseau a dépassé les 10 000 MW durant l’année, compte pour 3,9% de la production électrique française. La production photovoltaïque a connu une croissance légèrement supérieure à celle de l’éolien mais sa part reste limitée à….1,4% de la production totale.  En incluant les autres énergies renouvelables (déchets, bois-énergie, biogaz, etc.), la production électrique d’origine renouvelable compte pour 17,2% du panorama français en 2015 et pour 6,4% hors hydroélectricité. Paradoxalement c’est la production électrique des centrales à gaz qui a connu la plus forte croissance en 2015 (+54,8%) pour atteindre près de 4% soit un niveau légèrement plus élevé que la production éolienne. Les centrales à charbon et à fioul comptent pour 2,2% de la production électrique nationale malgré la fermeture des 6 dernières centrales à charbon de plus de 250 MW en France.

Le constat est impitoyable : nous accumulons le retard dans la transition énergétique car il n’y a pas en France de prise de conscience réelle de notre dépendance à l’égard du nucléaire quand elle diminue très vite en Allemagne. La mutation du secteur de l’électricité s’accélère en effet outre-Rhin : à l’heure actuelle, un kilowattheure sur trois est issu des énergies renouvelables. Elles couvrent 32,5 % de la consommation d’électricité, un chiffre en hausse par rapport à 2014 (27,3 %), et 30 % de la production électrique. C’est la hausse la plus importante jamais enregistrée dans l’histoire des renouvelables !

La production éolienne terrestre atteint un niveau particulièrement élevé avec un bond de 50 % par rapport à 2014. Autre exploit : le 23 août 2015, les renouvelables ont couvert… 83,2 % de la consommation nationale d’électricité. « On peut vraiment dire que 2015 entrera dans l’histoire comme l’année où les énergies renouvelables auront été – et de loin – la plus grande source de production d’énergie en Allemagne. Pour la première fois, elles dominent le marché national de l’électricité. On devrait vraiment être au courant !

Cet article a 3 commentaires

  1. bernadette

    Allemagne est le pays de reference pour nombre de choix europeens.
    Les francais doivent se mettre au garde a vous.
    Le developpement durable s’appuit d’abord sur la consommation tarifaire et ensuite sur la consommation quantitative, le transport de l’energie fait partie integrante a la consommation tarifaire. Le carbonne quant a lui est aussi une source financiere.
    Quant l’Etat va t’il s’occuper de ses affaires ?. A savoir supprimer une partie de l’eclairage public dans les villes et leur pourtour. Madame Segolene Royal doit intervenir a cet effet.

  2. faconjf

    Bonjour,
    Que dire au sujet de ce grand corps malade qu’est maintenant eDF … Parler de l’aspect financier lors de la privatisation l’action a été introduite à 32€ pour atteindre son maximum fin novembre 2007 à 86,45 euros à la clôture. Le groupe a même été brièvement la première capitalisation française entre 2007 et 2008, volant à l’époque la vedette à Total. Tout cela pour dégringoler et crever le plancher des 10€ en 2016… Une privatisation politique « Dans un secteur où la vision à long terme est essentielle, je souhaite que l’Etat puisse guider les décisions, dans le souci de l’intérêt général (…). L’ouverture du capital d’EDF se fera dans l’intérêt de la France, de l’entreprise et de ses salariés », a poursuivi M. de Villepin.
    En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/economie/article/2005/10/24/villepin-lance-la-privatisation-partielle-d-edf_702675_3234.html#VSXMhwAE2UBik8hw.99
    En fait une privatisation qui se fonde sur un gros mensonge révélé par Marcel Boiteux, directeur général puis Président d’EDF de 1967 à 1987, un des pères du programme nucléaire et de la tarification marginale (« l’horloge est faite pour dire l’heure, le tarif pour dire les coûts ») qui le soulignait non sans ironie. Il ne s’agirait pas, « comme on pouvait le croire initialement, d’ouvrir à la concurrence pour faire baisser les prix, mais d’élever les prix pour permettre la concurrence »(« Les ambigüités de la concurrence – Electricité de France et la libération du marché de l’électricité »).
    La loi NOME Nouvelle Organisation du Marché de l’électricité promulguée le 7 décembre 2010, le texte fait obligation à EDF de revendre à ses concurrents, à un prix proche du coût de revient, jusqu’à 25% de sa production pendant 15 ans. Le problème c’est le prix de vente à ses concurrents fixé par l’ARENH qui a été fixé à 40 €/MWh au 1er juillet 2011. EDF évalue son coût économique en prenant en compte la valeur initiale réévaluée du parc sur sa durée de vie totale de fonctionnement, soit un coût de renouvellement, chiffré sur la base de cette méthode, à 49,5 €/MWh par la Cour des comptes. Pour mémoire en 2013 Le coût résiduel d’approvisionnement des fournisseurs alternatifs aux prix de gros était d’environ 55 € http://www.economie.gouv.fr/files/2013_01_30_Concurrence_et_marche_de_l_electricite.pdf)
    Le rapport de la Commission d’enquête du Sénat sur« le coût réel de l’électricité afin d’en déterminer l’imputation aux différents agents économiques » (juillet 2012) menace ainsi le consommateur d’une hausse de sa facture de 50 % d’ici à 2020.
    Je ne saurais dire si la collusion politique/affairiste( voir les relais économico-politiques Powéo (direct énergie) ex UMP) est en cause dans cette loi où si d’autres intérêts en sont la raison…
    Voila un petit aperçu lorsque l’on soulève le coin du voile recouvrant les difficultés financières d’eDF.
    Salutations républicaines

  3. faconjf

    Parlons maintenant de l’énergie éolienne Depuis plus de 15 ans, le lobby international de l’industrie éolienne laisse croire au grand public, aux politiques, aux médias, que 1000 mégawatts de capacité d’une usine électrique éolienne (un « parc » éolien) sont égaux à 1000 mégawatts de capacité d’une usine électrique classique, c’est à dire barrage hydraulique, centrale thermique à gaz ou charbon, centrale nucléaire.
    C’est oublier un peu vite que l’énergie solaire et l’énergie éolienne sont des énergies dites fatales. Ce qui sous-entend que l’on ne peut en valoriser qu’une partie et seulement si la quantité fournie est suffisante pour être utilisée. Hors, un mégawatt éolien, sans autre précision, ne correspond pas à une production, car une éolienne produit de l’électricité intermittente avec un rendement fluctuant, en fonction du vent. En France 1000 mégawatts éoliens correspondent très exactement à 230 mégawatts classiques, soit moins du quart. Le martellement de ces inexactitudes concernant les lois physiques fondamentales de l’électricité a conduit certains dirigeants à prendre des décisions stratégiques erronées, surestimant par un facteur quatre, la capacité et la fiabilité de l’énergie éolienne.
    La confusion ne se limite pas aux principes puissance et énergie. Des politiques et journalistes l’affirment : il serait possible, en France, de passer à 100% d’énergies renouvelables. L’affirmation qu’il serait possible de passer à 100% d’énergies renouvelables vient généralement d’une étude de l’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie (ADEME) parue en 2015 portant sur une France alimentée à 100% en électricité renouvelable. Mais l’électricité représente moins de 23% de la consommation finale d’énergie française. Avec une électricité 100% renouvelable, on sortirait du nucléaire mais on résoudrait moins du quart du problème énergétique. Les énergies fossiles, c’est à dire le pétrole, le gaz et le charbon sont responsables de centaines de milliers de morts dans le monde chaque année à cause de la pollution qu’elles génèrent, elles représentent en nombre de morts de centaines de Tchernobyl chaque année. Or, en France, ces énergies servent très peu à produire de l’électricité, elles servent essentiellement au transport et au chauffage. Il parait donc souhaitable de remplacer les automobiles à pétrole par des automobiles électriques, les camions à pétrole par des trains de marchandises électriques, les chauffages au gaz ou fioul par des pompes à chaleur électriques, les processus de chauffage industriels au charbon, fioul ou gaz par des systèmes électriques… Mais cela devrait logiquement faire augmenter la consommation d’électricité.
    La production éolienne a été en France de 21 TWh en 2015 pour une puissance éolienne installée de 10GW pour 7000 éoliennes terrestres actuelles. Lorsque l’on compare la consommation d’énergie française (1900 TWh en énergie finale payée par le consommateur, presque 2900 TWh en énergie primaire avant toute transformation, ben oui faut pas oublier le rendement). Sachant qu’on a installé en France moins de 1GW d’éolien par an ces dernières années vous imaginez sans peine l’effort à fournir et l’impact sur nos paysages!! N’oublions pas les périodes dites de marais barométrique provoquant absence de vents et présence de brouillards (éolien et photovoltaïque produisant quasiment zéro). Il faudrait alors arrêter les usines, le chauffage des maisons, le chauffage de l’eau ou l’usage d’appareils électro-ménagers. Il s’agit donc d’une tendance vers un moindre confort puisqu’il faudrait parfois décaler les horaires de travail des salariés, éviter de chauffer son logement lorsqu’il fait froid, de faire la cuisine lorsqu’on a faim…
    Les politiques qui préconisent le remplacement des énergies fossiles et nucléaires par des renouvelables doivent donc commencer par expliquer comment ils vont gérer le chômage, les déficits publics, la santé, les retraites, l’éducation, la sécurité, les aides sociales… en décroissance économique.

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