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La coopérative à l’école : seule pédagogie citoyenne réelle

Oui, je l’avoue je n’ai jamais été un ardent partisan des conseils d’enfants pilotés par les élus ; Je sais c’est iconoclaste et contradictoire avec tout ce que j’ai soutenu en matière d’éducation à la citoyenneté dans ma vie sociale. Et pourtant je ne pense pas être en contradiction avec les principes d’éducation réelle que j’ai pu prôner. En effet je pense que souvent il ne s’agit que de processus conduisant à inviter les enfants à imiter les adultes et donc à dans le fond ne prendre en compte la fonction élective que par mimétisme. Il ne saurait y avoir de véritable pratique de la vie démocratique sans éducation concrète qui devrait figurer dans les programmes scolaires. Elle y a été durant des décennies avant de disparaître face à ce besoin irrépressible d’acquisitions de savoirs portés par des programmes d’une désarmante inadéquation avec les nécessités du monde actuel. Ainsi aujourd’hui au titre de la journée des droits de l’enfance l’Elysée a réalisé une séquence de communication confinant à l’exemple idéal de cette propension à confondre éducation et communication. Voici le compte-rendu qu’en fait la magazine Gala (sic) : « Un groupe d’enfants est ainsi venu visi­ter le palais prési­den­tiel au côté de la première dame. Une visite guidée, qui a d’ailleurs été filmée et diffu­sée en direct sur Face­book, par le compte offi­ciel de l’Elysée. Retrou­vant avec plai­sir ses réflexes d’ancienne profes­seure, Brigitte Macron a offert aux enfants une visite ultra-péda­go­gique, truf­fée d’anec­dotes histo­riques amusantes, mais aussi de commen­taires person­nels. Elle a par exemple tenu à leur montrer le dessin de l’une de ses petites filles, accro­ché dans son bureau. Elle a égale­ment présenté aux jeunes élèves atten­tifs la salle du conseil des ministres, leur dési­gnant où s’assoit le président et chacun des membres du gouver­ne­ment. Taquine, la première dame n’a pas oublié non plus de leur montrer le meuble à tiroirs où « les membres du gouver­ne­ment doivent dépo­ser leurs télé­phones portables » avant la réunion hebdo­ma­daire. » Il faut y ajouter une simulacre de conseils des Ministres avec le président aux manettes durant une poignée de minutes.
Les images ont bien évidemment été reprises par les télés perroquets et seront dans les magazines hebdomadaires sur papier glacé mais elles constituent une caricature de l’éducation citoyenne dont a plus que jamais besoin la jeunesse.
Il existe encore dans de moins en moins de classes un véritable apprentissage ne débouchant pas nécessairement sur une électivité future mais sur la mise en place d’une compréhension des mécanismes démocratiques. Cette pédagogie concrète est portée par l’Office central de la coopération à l’école (OCCE). Elle permettait à l’intérieur de cette micro-société qu’est la classe une véritable appropriation de l’engagement, du débat, de l’action, de l’évaluation. La responsabilité et l’autonomie en sortaient renforcées avec plusieurs années de pratique de ce concept de la fameuse « coopération » qui manque tant à notre système éducatif fait de concurrence, d’élimination par l’échec, de mise en avant de l’individu ! La suite était assurée par les fameux foyers socio-éducatifs dans lesquels on gérait de multiples activités périscolaires. Le samedi matin était souvent attendu avec une véritable impatience par des gamins ravis de constater que l’on s’intéressait à leur quotidien et qu’ils pouvaient toutes et tous, s’ils le souhaitaient avoir une influence sur son déroulé. J’ai eu des véritables moments de bonheur profond en mettant en œuvre cette forme d’autogestion partagée entre adultes et enfants de la vie de la classe ou de l’école. C’est soit-disant une idée dépassée puisqu’il n’y a plus suffisamment de temps sur quatre jours de placer ces éléments fondateurs de l’insertion démocratique ultérieure. Il n’existe plus de coopératives authentiques dans les établissements scolaires car souvent elles ne sont devenues que des structures récoltant de l’argent auprès des parents pour les sorties au cinéma ou pour les voyages de fin d’année. Elles sont cadrées et réglementées par les instructions ministérielles qui ne font aucune place réelle à l’enfant.
J’aimerai tellement retrouver les dizaines d’élèves que j’ai eu le plaisir de croiser pour qu’ils puissent me dire si c’était véritablement du temps perdu que la « coopé » ou s’ils ont puisé dans ces pratiques un zeste de leur engagement d’adulte. Beaucoup d’entre eux sont actuellement engagés dans la vie associative et c’est une jubilation particulière quand je les regarde agir au service des autres. J’avoue que j’en suis fier…même si j’essaie de le dissimuler ! Ne leur dites pas mais sans eux j’aurais bien du mal à me persuader que j’aurais pleinement rempli ma mission en leur ayant appris que 2+2=4 ou qu’il fallait se souvenir que « mais, ou, et, donc, or, ni, car… »…

Cet article a 5 commentaires

  1. J.J.

    Question anodine, mais néanmoins insidieuse : dans quels établissements scolaires avait été recrutée cette cohorte d’aimables bambins(de 9 à 17 ans) ?
    Avec Mme Macron-Trogneux à la manœuvre, j’ai quelques appréhensions, la presse n’ayant pas jugé utile de donner des détails à ce sujet.
    L’ OCCE, j’ai bien connu, ayant fait partie de l’équipe qui a crée la première délégation en Charente.
    Je n’ai jamais été déçu par les actions que j’ai pu mener avec mes élèves, quand j’ai pu en organiser. Je ne peux pas en dire autant à propos de mes relations avec l’administration, et parfois avec des parents d’élèves peu ouverts à ce genre d’activité.

  2. bernadette

    Je trouve ces actions très coopératives : le jardin, le théâtre, permettre à des enfants de s’épanouir c’est gratifiants. A mon avis un échange entre école est aussi gratifiants pour gérer les caisses scolaires comme la cantine. Participer à l’élaboration des menus de la cantine c’est aussi une bonne chose pour les enfants.

    1. bernadette

      Pardonnez les fautes !

  3. JJ Lalanne

    Coopération, méthodes actives et non pas pontification, rien de tel pour développer l’ esprit critique et lutter contre la sournoiserie de dames patronesses ou autres paternalistes qui ont besoin se donner bonne conscience ou de manipuler cyniquement. Pour ce qui est des parents rétifs, je me souviens d’ un « commando » qui m’ attendait à une sortie de classe. Pas rassurant mais une explication sur les tenants et aboutissants de la méthode les avait convaincus du bien fondé pour leur enfants et les rapports sociaux en général. Cette fois, les « agents de la désinformation » n’ ont pas eu le dessus mais combien de fois les actions sont plus insidieuses. C’ est dans l’ ordre moral (toujours imposé aux autres et pas à soi, bien sûr) que se trouve l’ immoralité et ses partisans sont prêts à tout pour lutter contre toute ouverture d’ esprit. Malheur à celui qui douterait de personnes chouchoutées par Gala. Ah les braves gens! Quelle chance nous avons que ce journal, Paris-Match et Closer nous aient évité le risque d’ avoir un quelconque gauchiste à l’ Élysée. Le couple savonnette,ça c’ est du solide,de l’ admirable. On n’ est pas couillonnés. Si? Ah bon…

  4. Bernart Clerc

    « la fameuse « coopération » qui manque tant à notre système éducatif fait de concurrence, d’élimination par l’échec, de mise en avant de l’individu » … Oui, Jean Marie , c’est bien là, l’une des raisons qui font que l’Ecole n’est parfois plus le lieu d’où on sort grandi, mais celui où l’on est classé pour être déclassé. Comment s’étonner alors que l’humanisme que nous avons voulu apporter soit vomi ? la pédagogie coopérative, pourtant devrait être ce que disait De Peretti : « travailler les uns avec les autres, les uns pour les autres , et non pas les uns contre les autres »

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