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Il y a de l’eau dans le gaz à l’OTAN

En fait lors du sommet de l’OTAN l’essentiel des discussions n’ont pas porté sur les escadres, les bataillons ou les escadrilles attestant ainsi que désormais la guerre mondiale éventuelle ne trouvera pas ses causes dans la course aux armements. La finalité de cette organisation militaire internationale a changé : on y parle ressources naturelles et économie. En fait les déclarations de Trump dirigées davantage contre ses « alliés » que contre ses ennemis attestent du changement de paradigme. Il a en effet immédiatement évoqué les questions du… financement, puis celles de la dépendance énergétique allemande vis à vis du gaz russe et la construction d’un gazoduc. Ces accusations résument parfaitement la place qu’occupent sur l’échiquier mondiale la possession des richesse naturelles. Derrière chaque conflit on trouve si on gratte un peu le sous-sol des gisements potentiels ou avérés de pétrole, de minerais plus ou moins essentiels, de bois, de terres arables et même de réserves en eau potable. L’OTAN ne sert qu’à réguler ces appétits des grandes multinationales bras « armés » des États.
Le sommet a ainsi débuté officiellement par une première réunion à 29 consacrée à l’augmentation des dépenses militaires. Trump a dénoncé à plusieurs reprises et avec une certaine insistance le projet de doublement du gazoduc Nord Stream. Il exige son abandon. Sa critique lui permet d’enfoncer un coin dans l’unité des Européens car ce second « lien » d’alimentation les divise. Cet aménagement « est un exemple de pays européens qui fournissent des fonds à la Russie et lui donnent des moyens qui peuvent être utilisés contre la sécurité de la Pologne », a par exemple accusé le chef de la diplomatie polonaise. Il faut aussi rappeler que les pays de l’UE importent deux tiers de leurs besoins de consommation énergétique.
En 2017, ces achats ont représenté une facture totale de 75 milliards d’euros, selon les statistiques européennes. A ce jour, la moitié du gaz acheté est russe, mais les Européens cherchent à briser cette dépendance en tissant des liens avec d’autres sources d’approvisionnement. Ils avaient par exemple ouvert le marché iranien mais Trump en a décidé autrement puisque son objectif avoué est de conquérir de nouveaux marchés pour leur gaz naturel US. Les États-Unis ont exporté 17,2 milliards de mètres cubes en 2017, dont seulement 2,2 % par méthaniers vers les terminaux de l’Union européenne. Pour les hommes d’affaires de la Maison Blanche obsédés par le déséquilibre de la balance commerciale tout doit être fait pour accentuer les achats aux USA… et surtout il faut assécher économiquement la Russie très tributaire des rentrées de devises en dollars que lui procure la vente de son gaz naturel !
À sa mise en service prévue fin 2019, ce tube long de 1 225 km doublera la capacité d’un premier gazoduc mis en service en 2012: 55 milliards de mètres cubes par an, soit la moitié de la consommation allemande. Trump a donc beau jeu de clamer que les Allemands préfèrent « nourrir » poutine que participer financièrement à la hauteur des efforts qu’effectue l’OTAN pour les protéger ! Il sait fort bien qu’au sein de l’UE une grande part des difficultés viennent du refus permanent de Merkel d’abonder les financements dans un certains nombre de secteurs afin de ne pas mécontenter les « retraités » qui constituent sa principale clientèle électorale. Trump a un mérite : il dit tout haut et fort ce que bien des autres pays pensent tout bas sans pouvoir le dire dans un contexte de dépendance avec l’Allemagne. En fait il se sert de la déliquescence de l’unité européenne rongée par les rivalités liées au profit ou par des opinions publiques obnubilées par les migrations…et il accentue les fractures que plus personne ne peut maîtriser. La réunion de l’OTAN sera forcément un fiasco.
Le général de Gaulle avait retiré la France de l’Otan, le 7 mars 1966. Il y pensait dit-on depuis le 7 septembre 1958, date à laquelle il avait adresse un courrier au président Eisenhower, puis au général Mac Arthur et au premier ministre britannique. Il avait écrit : « J’ai mis en doute l’appartenance de la France à l’Otan et proposé à ce moment là que la direction soit exercée à trois : La France, les Etats Unis, et la Grande Bretagne. .. Je me réserve le droit d’en sortit purement et simplement… » il le fit ! La brouille plus ou moins importante dura jusqu’au 3 Avril 2008 quand Sarkozy annonça qu’après 42 ans d’absence, la France retournait au sein de l’Otan avec quelques postes dans l’état-major pour les généraux français . La décision fut mise en application lors du sommet de Strasbourg et de Kehl, en Avril 2009 soit un an plus tard. Et désormais Trump tient Macron et consorts par la barbichette… ce qui bien évidemment sera masqué par des arguties diplomatiques de façade !

Cet article a 6 commentaires

  1. faconjf

    Bonjour,
    l’ UE est-elle au bord de l’implosion ? C’est la question sous-tendue par votre article, la politique du Donald ne donne plus de consignes à ses vassaux du vieux continent du coup plus de gouvernance et ça part dans tous les sens. Le paradigme de ces vingt-cinq dernières années (US = OTAN = ennemi russe = UE = globalisme et libéralisme) est en train d’exploser sous nos yeux. Des pays pro-américains deviennent anti-UE (Pologne), des globalistes deviennent anti-américain et veulent la fin de la politique de sanctions contre la Russie (Merkel). Sans compter des Etats (Italie, Hongrie) qui prennent résolument une autre voie. Inimaginable il y a seulement quelques années…
    Le gazoduc russe est une évidence économique et les Européens le comprennent bien malgré les efforts du centre impérial US.
    Un nouveau centre du monde vient d’émerger c’est l’Eurasie qui contre-balance l’axe pétrolier USA- Émirats du golfe persique.En plus d’être le pivot du monde, le point névralgique du globe, l’Eurasie est également terre de richesses, d’immenses richesses. Les soieries, le jade, les épices, les tapis persans ou le caviar ont été remplacés par les hydrocarbures, pétrole et gaz, principalement en Russie et autour de la Caspienne

    Aussi important sinon plus que les ressources elles-mêmes, c’est leur acheminement par les gazoducs et oléoducs et le moyen d’influence qui en découle qui cristallise les tensions et les grandes manœuvres, ce que d’aucuns nomment la géopolitique des tubes. Complétant la pensée de Mackinder*, un nouvel axiome est apparu : « Qui contrôle les sources et les routes d’approvisionnements énergétiques mondiales contrôle le monde. » C’est particulièrement vrai pour les États-Unis dont les stratèges sont conscients de l’inévitable déclin américain : le monde est devenu trop vaste, trop riche, trop multipolaire pour que les États-Unis puissent le contrôler comme ils l’ont fait au XXème siècle. Du « Projet pour un nouveau siècle américain » des néo-conservateurs au « Grand échiquier » de Brzezinski, une même question prévaut en filigrane : comment enrayer ce déclin, comment le retarder afin de conserver aux États-Unis une certaine primauté dans la marche du monde ? La réponse, qui n’est certes pas ouvertement explicitée, passe par le contrôle de l’approvisionnement énergétique de leurs concurrents. « Contrôle les ressources de ton rival et tu contrôles ton rival », Sun Tzu n’aurait pas dit autre chose. Et c’est toute la politique étrangère américaine, et subséquemment russe et chinoise, de ces vingt-cinq dernières années qui nous apparaît sous un jour nouveau.
    Et l’UE dans tout cela ? Aucune gouvernance, des intérêts divergents, pas de forces militaires dignes de ce nom, pas de diplomatie commune, pas de politique sociale et un énorme boulet constitué des lobbies aussi disparates que la vision économique des oligarques de Luxembourg et Francfort.
    Bref, on a pas le c.. sorti des ronces. Nos amis Italiens, au sujet des migrants ajouteraient E ancora non è finita (Et ce n’est pas encore fini !)
    Salutations républicaines
    *la devise de Mackinder serait « qui tient l’Europe orientale tient le heartland, qui tient le heartland domine l’île mondiale, qui domine l’île mondiale domine le monde ».

  2. Frindel

    Bravo

  3. faconjf

    Zbigniew Brzezinski
    LE GRAND ÉCHIQUIER
    Pourquoi et comment les États-Unis d’Amérique sont-ils devenus les garants de l’ordre mondial ? Quel rôle peut jouer l’Europe face à cette arrogante suprématie ?
    Zbigniew Brzezinski montre la situation paradoxale des États-Unis qui, pour maintenir leur leadership, doivent avant tout maîtriser le grand échiquier que représente l’Eurasie (Europe et Asie orientale), où se joue l’avenir du monde. L’ancien conseiller de la Maison-Blanche définit ainsi un cadre durable pour une coopération géopolitique mondiale autant qu’il donne à voir la façon dont l’Amérique envisage sa place dans « le reste du monde ».
    Cet ouvrage, paru en 1997, est très vite devenu indispensable pour comprendre la politique internationale.

    Expert au Center for Strategic and International Studies (Washington, DC), Zbigniew Brzezinski est professeur à l’université Johns Hopkins de Baltimore. Il a été conseiller du président Carter de 1977 à 1981.

  4. Philippe LABANSAT

    La question est de savoir combien de temps les instances internationales retarderont l’embrasement général.
    Les tensions sont telles sur l’énergie et, plus globalement, sur toutes les matières premières, sur l’eau, sur les terres arables, les pays sont tellement crispés sur des politiques croissantistes immuables, la démographie s’ajoutant à tout cela, qui peut douter que tout cela finira immanquablement par se régler à coups de canons…

    1. Bernadette

      Bonsoir Philippe,
      Lorsque tu parles de canon, j’espère que ce sont les canons anti grêle car de ce côté là, il n’y a aucun progrès technique sauf les assurances qui coûtent une fortune pour un petit paysan. Nous sommes bien dans un système d’autodestruction parce que la recherche ne propose rien.
      Bonne fin de soirée

  5. Jean-Jacques Lalanne

    Du Chili à la Syrie en passant par l’ Ukraine et autres, on a fomenté des coups d’ état avec des succès variables. Ce n’ est pas la face la plus glorieuse de notre pays et si maintenant on se prend des claques c’ est un juste retour des choses. Les morts et les peuples opprimés ou qui l’ on été de notre fait ne nous pleureront pas.

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