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(MORENA PÉREZ JOACHIN / DPA / AFP)

Les migrations représentent un enjeu planétaire

Qui peut raisonnablement et lucidement prétendre que les frontières aussi renforcées soient-elles empêcheront que se poursuive le phénomène migratoire ? S’il y a dans le domaine financier, dans la sphère économique ou en géopolitique une mondialisation discutable par ses effets il faudra admettre que, ce que notre société angoissée prend pour une épiphénomène prend, sur notre terre ravagée par l’incurie humaine, des proportions colossales. Les migrations internationales représentent en effet 200 millions de personnes, soit 3% de la population mondiale. Leur nombre total s’est accru au cours de ces dix dernières années, passant d’environ 150 millions de personnes en 2000 à 214 millions de personnes aujourd’hui… mais bien entendu du chez nous, la chamaillerie mobilisant les partis politiques repose sur la reconduite par des policiers français de quelques malheureux entrants illégaux venus d’Italie. Une bataille de communication s’est engagée sur un sujet aussi futile entre le gouvernement aux relents néo-fascistes italien et celui d’une France tétanisé par d’éventuelles accusations de laxisme. Pitoyable, dérisoire et inquiétant !
Le réchauffement climatique et ses conséquences multiples (on estime que 50 millions de personnes étaient des réfugiés environnementaux en 2010 et que 200 millions le seront d’ici 2050), la pauvreté croissante, les famines montantes, les guerres pseudo-religieuses effroyables, le culte du fric rendent les déplacements des populations acculées à une disparition progressive inexorables. Ce ne sont ni les murs, ni les barrières, ni les camps de regroupements, ni les renvois d’un territoire à un autre qui stopperont les migrants économiques, politiques ou humanitaires. Pour eux ce n’est pas la « bourse ou la vie » mais l’eau ou la mort ou la fuite ou l’exécution.
Si la migration est un fait social évident, le développement des moyens de transport et de communication au siècle dernier a facilité ce déplacement de personnes à grande échelle et continue à jouer un grand rôle dans le rapprochement géographique. D’abord contrairement aux présentations apocalyptiques de cette réalité il faut savoir que l’écrasante majorité des personnes qui migrent le font à l’intérieur de leur propre pays. Le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) estime qu’il y aurait 740 millions de migrants internes dans le monde. Le pourcentage du nombre de « déplacés » par rapport à la population mondiale est resté stable ces cinquante dernières années mais bien évidemment on focalise sur les franges qui arrivent en Europe ! Or parmi les migrants internationaux, seul un tiers s’est déplacé d’un pays en développement vers un pays développé.
En effet, contrairement à ce que les discours actuels portent à croire, la majorité des migrations ne s’effectuent pas du Sud vers le Nord. En réalité, seules 37 % des migrations dans le monde ont lieu d’un pays en développement vers un pays développé. La plupart des migrations s’effectuent entre pays de même niveau de développement : 60% des migrants se déplacent entre pays développés ou entre pays en développement. On fait aussi facilement ou de manière totalement volontaire la confusion entre « migrants » et « réfugiés ». Seulement 7% des migrants dans le monde (soit 15 millions de personnes) sont considéras comme des réfugiés, la plupart vivant à proximité du pays qu’ils ont fui. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) démontre en effet que les principales régions d’origine des réfugiés ont aussi été les régions d’accueil de 75 à 93 % des réfugiés…
Hier un groupe d’environ 300 migrants originaires d’Afrique subsaharienne ont tenté d’escalader la clôture à la frontière de Melilla, l’une des frontières terrestres de l’Union européenne avec l’Afrique avec Ceuta « dont environ 200 y sont parvenus, tous des hommes ». L’Espagne est donc désormais devenue la première porte d’entrée de l’immigration clandestine en Europe, avec plus de 47.000 migrants entrés depuis le début de l’année, dont environ 5.000 par voie terrestre selon l’Organisation internationale pour les Migrations.
Ailleurs c’est encore pire puisque par exemple des milliers de migrants honduriens sont toujours bloqués par les forces de l’ordre mexicaines, après avoir forcé la frontière entre le Guatemala et le Mexique dans l’espoir de rejoindre les Etats-Unis. Ces migrants, qui convergent depuis plusieurs jours dans la ville-frontière de Tecun Uman, au Guatemala, ont enfoncé vendredi après-midi une clôture métallique du poste frontière guatémaltèque. Certains migrants ont préféré sauter dans la rivière, depuis le haut du pont, pour tenter leur chance à la nage ou en grimpant sur des embarcations. D’autres ont rebroussé chemin vers Tecun Uman pour s’y reposer et s’hydrater, avant de retenter leur chance. Près de 4 000 Honduriens sont arrivés à Tecun Uman en petits groupes, à pied ou en bus, au cours de ces derniers jours. Ils avaient quitté samedi San Pedro Sula, dans le nord du Honduras, fuyant la misère et la violence dans leur pays.
Partout on traite dans l’urgence les effets de « nos » politiques de pillages des ressources, d’exploitation de la misère, de mis en place directe ou indirecte de gouvernements « populiste » sur des territoires jetés dans le gouffre des incertitudes de la déshumanisation complète. Mais quant aux causes profondes…

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