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Hôpitaux, écoles : des manques à venir

Le poids des mots est essentiel pour apprécier les discours politiques. Il faut savoir absolument peser chacun d’entre eux et lui donner sa vraie valeur ! Ainsi quand le président de la République annonce qu’il n’y aura pas de « fermetures d’hôpitaux et d’écoles et France » il prend un engagement solennel qui a une importance particulière même si cette annonce sera relativement possible à tenir. Par contre il eût été beaucoup plus difficile de décider qu’il n’y aurait pas de « fermetures de classes » en dessous d’un seuil abaissé et également pas de » disparitions de services hospitaliers » (maternité notamment). C’est plus sur les difficultés générales que l’éducation et la santé rencontrent qu’il aurait pu rassurer car une école et un hôpital de survivent qu’avec des moyens et des personnels!

Il y aurait pu être évoqué : le recrutement des personnels indispensables pour que le système éducatif ou le système sanitaire puissent continuer à fonctionner. Il faudra en effet convaincre les jeunes générations de s’engager comme professeurs des écoles publiques dans le contexte actuel ou pour occuper des postes d’infirmières ou des aides-soignantes. D’ailleurs les alarmes ne cessent de sonner et les solutions tardent à venir dans les hopitaux et les écoles ! « En l’état actuel et si rien n’est fait d’ici là, à partir du 1er juillet prochain, les quatre blocs opératoires de mon établissement devront fermer pour ne pas se mettre dans l’illégalité » annonce par exemple un chirurgien orthopédique de l’hôpital d’Épernay car les quatre blocs où sont réalisées 6 000 interventions par an ne disposeront pas d’infirmiers spécialisés de bloc opératoire. On les appelle les « Ibode » et ils seront, dans quelques mois les seuls habilités à pratiquer trois actes essentiels d’assistance au chirurgien : écarter, aspirer (le sang, les sérosités…) et électro-coaguler (pour cautériser). La réglementation est formelle : faute de ces personnels les services devront cesser leur activité. mais l’hopital restera ouvert! Il survivra donc mais pas ce que pourquoi il est fait puisque ces trois « assistances » jusque-là réalisés par tous types d’infirmières un tant soit peu spécialisées en chirurgie sont désormais codifiés par d’un décret de 2015 visant à professionnaliser davantage la fonction d’infirmière (ier) de bloc.

Le président de l’Union des chirurgiens de France (UCDF) juge clairement le texte comme « inapplicable » en l’état et il annonce « une crise sanitaire ». Le risque d’annulation d’opérations devient donc une forte probabilité durant l’été où justement il arrive que les personnels fassent déjà défaut ! Il y aura donc un véritable risque de reports ou d’annulation d’opérations programmées et pour une fois surtout dans le secteur libéral où on cherche souvent désespérément au dernier moment, le jour même des opérations, des infirmières pour les équipes des blocs. Pour des problèmes d’assurance et de responsabilité il faudra en effet un strict respect des décrets et ce n’est pas techniquement possible. Or il faudrait plus de 18 000 infirmières pour réaliser ces actes… quand tous secteurs confondus elles ne sont que 13 500 diplômées par l’État français dont seulement à peu près 5 000 qui sont qualifiées « Ibode » pouvant travailler dans les blocs ! Les écoles sont saturées, les jurys pouvant valider les acquis de l’expérience ne sont pas réunis et comme le veut une tradition bien française il existe une profonde inégalité territoriale.

Dans les écoles la situation n’est guère plus confortable. A l’échelle nationale, le recours aux « contractuels » augmente de manière inquiétante. Les effectifs d’enseignants non titulaires ont presque doublé en moins de dix ans, passant de 16 257 non-titulaires en 2008 à 31 624 en 2016, selon un rapport de la Cour des comptes publié il y a un an. Il stigmatise une «tendance lourde à l’augmentation». Le recours aux « contractuels » commence à prendre de l’importance désormais dans le premier degré. On en dénombrait 296 en 2006, ils sont dix fois plus nombreux aujourd’hui : 2 420 enseignants pour l’année scolaire 2016-2017. Il ne s’agit plus d’un pansement pour pallier la crise des recrutements, mais bel et bien d’un nouveau mode de gestion ! Les difficultés de recrutement sur les bases des normes antérieures ne cessent de croître.

En taillant dans les postes sous le quinquennat Sarkozy puis en les recréant massivement du temps de Hollande, les gouvernements successifs ont contribué à créer les conditions de déficit de postes… Et donc de recours aux contractuels avec les conséquences que ce statut implique en terme de précarité de situation. Maintenir des « écoles ou des hôpitaux » n’a donc vraiment de sens que si l’on leur donne les conditions les meilleures pour assurer leur mission et donc assurer la qualité de leurs réponses aux besoins des territoires.

Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    « Maintenir des « écoles ou des hôpitaux » n’a donc vraiment de sens que si l’on leur donne les conditions les meilleures pour assurer leur mission et donc assurer la qualité de leurs réponses aux besoins des territoires. »

    C’est une évidence….pas évidente pour tout le monde !

    Il ne faut pas oublier que notre ersatz de président nous a déjà fait le coup avec la CSG, qui ne devait frapper que les retraites au dessus de la somme faramineuse de 1200 €, si je ne m’abuse.
    Ces messiers dames avaient « oublié » de préciser que le calcul serait fait, non sur le montant des retraites, mais sur le revenu fiscal de référence, ce qui évidemment a permis de ponctionner dans un couple, des retraites bien inférieures à 1200 €.

    La restriction mentale, branche de la casuistique fort en vogue dans certains milieux (suivez mon regard), je suppose que l’on a préparé une autre carabistouille à propos de cette déclaration.

    L’état ne fermera ni écoles, ni hôpitaux, promis, juré !

    On trouvera le moyen de contraindre par exemple les collectivités locales, toujours aussi irresponsables(!), à le faire, en leur faisant porter le chapeau (à ne pas confondre avec la retraite du même nom).

    C’est pas d’ma faute, m’sieur !

    1. Bernadette

      @J.J,
      Vous avez raison, l’Etat ne fermera ni écoles, ni hôpitaux sauf qu’avec les plans numériques (écoles numériques). L’Etat va transformer tous les circuits et va ôter ce qui est inutile. L’Etat va privatiser ou semi privatisé des pans entiers de l’administration pour faire redémarrer ce qui ne marche pas

      1. Bernadette

        Et alors le patient ou le petit enfant et ses parents devront s’adapter physiquement et mentalement à cette politique de l’offre. Franchement l’État a dépensé beaucoup d’argent pour changer son système et il n’est pas sûr que ça marche.

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