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Un feuilleton morbide interminable

Quelle société que celle que les médias nous fabriquent avec leur avidité de sensationnel. De vrais charognards au sens propre que ces rapaces de l’émotion qui se disputent le corps vidé de ses fonctions essentielles de Vincent Lambert devenu une « proie ». Épouvantable de voir se déchirer des proches d’un homme incapable de les séparer, de leur dire combien leur comportement le peine, de leur expliquer qu’une vie sans sentiment, sans amour, sans sensation, sans partage, sans dialogue,s ans mouvement, sans émotion paraît bien dérisoire et inutile. Soumis à l’artificialité absolue, depuis dix ans, de sa nourriture, de son hydratation ; privé d’absolument toute son autonomie ; plongé dans une inconscience absolue sur un lit anonyme, ce malheureux au destin brisé par un accident de la route, devient malgré lui, un enjeu religieux d’une autre époque. Affreux ! Détestable ! Inepte ! Mais heureusement pour leur audience : ce n’est pas fini !

N’empêche que l’on en arrive à se disputer, s’arracher, se jeter à la face le corps amorphe d’un homme inconscient ce qui ne révolte guère une opinion qui devrait pourtant vomir de tels comportements. La raison n’a plus sa place dans cet affrontement où les prières, les incantations tentent d’effacer les constats médicaux. En fait les prises de position de ces personnalités diverses et avariées accentuent les blessures. Les spécialistes du débat commentent sans vergogne des images volées par ses parents à leur fils inerte et déjà dans le grand silence blanc de l’antichambre de la mort. Ils s’extasient sur une « bulle » papale expédiée par untweet sentencieux ou s’affolent quand les dfenseurs de la vie végétative vont tribunal en tribunal quérir une « vérité » légale opposable au simple respect de la dignité humaine. Ces centaines d’heures de commentaires sur celui qui n’est que la victime désormais totalement innocente d’un combat oublieux du respect que l’on doit aux gens sans défense, deviennent angoissantes. Vincent Lambert est devenu un enjeu et l’exploitation qui en est faite en cette période de campagne électorale ne réconcilie guère avec la politique. Amoral au sens le plus vrai.

Victime d’un accident de la route en 2008, Vincent Lambert a reçu des soins depuis plus d’une décennie. Ils ont été interrompus avec absolument le respect intégral de la loi Léonnetti, loi laïque et consensuelle puisque votée à l’unanimité de l’Assemblée nationale. La procédure d’arrêt des soins est permise en interdisant l’euthanasie et le suicide assisté, permet la suspension des traitements lorsqu’ils « apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie ». C’est clair et dénué de toute ambiguïté morale. Pourtant les parents, fervents catholiques, un frère et une sœur s’opposent à l’arrêt des traitements quand son épouse Rachel, son neveu François et cinq frères et sœurs veulent mettent fin justement à cet « acharnement thérapeutique ». La justice a effectué toutes les expertises nécessaires et a finalement, à tous les niveaux, accepté un verdict médical douloureux mais implacable. Les juges n’appliquent à ce jour ni la Bible, ni le Coran, ni la mais les articles d’une loi des hommes, faites par les hommes et pour les hommes.

Elle se résume en deux articles  qui tente d’établir une distinction nette entre le traitement médical, qui peut être interrompu s’il est jugé disproportionné par rapport à l’amélioration attendue, et les soins, dont la poursuite est considérée essentielle pour préserver la dignité du patient. : « Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour assurer à chacun une vie digne jusqu’à la mort. Si le médecin constate qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il doit en informer le malade,[…] la personne de confiance […], la famille ou, à défaut, un des proches. » (…) « Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l’article -(ci-dessus) ».

Certains n’hésitent pas à qualifier ces décisions professionnelles réfléchies, assumées et collégiales concernant Vincent Lambert «d’assassinat», de «meurtre», de «régression de civilisation», de «mise à mort» ou «d’euthanasie». On accuse violemment d’infamie l’arrêt des traitements quand parfois ce sont les patients eux-mêmes qui le réclament quand leur état devient «intolérable» ou «inacceptable». la cour d’appel de Paris a désavoué les verdicts médicaux. Les justiciers ont réouvert une brèche dans la laïcité. Chaque année des dizaines de milliers d’arrêts de traitements sont faites (soit 60 % de ceux qui meurent à l’hôpital) et faites en bonne intelligence, dans le respect des principes, avec toutes les parties pour humaniser la fin du passage sur terre… C’est simplement admettre que la mort fait partie de la vie ! Rien de plus et rien de moins.

Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    D’où l’intérêt, pour éviter de genre de faux, mais tragique dilemme, de rédiger des « directives anticipées » (Ministère des Affaires Sociales et de la Santé, arrêté du 3 août 2016). Evidemment cela n’était pas possible en 2008 !

    Ce qui est tragiquement paradoxal chez ces religieux de tous bords, , c’est que l’on y trouve par exemple, des condamnations sans appel du droit à la contraception et à l’avortement, comme les malades mentaux qui ont aboli ce droit en Alabama.
    Et ce sont les mêmes qui militent pour la peine de mort et la prolifération des armes, aussi bien à l’échelon local que mondial.

    Décidément, croyances, logique et raison ne font pas bon ménage, elles demeurent inconciliables.

  2. Qu’il soit possible (comme le don d’organe) de donner ses volontés en cas de dépendance (ou, et) de souffrances extrêmes qui ne peuvent être soulagées, dans une maladie qui ne peux être soignée, ou progresser vers du mieux.
    J’espère, que je serais à même de pouvoir « choisir » la fin de vie arrive quand il n’y a plus de vie, plus d’échange, d’inter-action, quand il n’est même plus possible de sortir de son lit, quand la souffrance à prit le pas sur tout le reste.
    Et puis…. si ma dignité ne peut être respectée, si mes couches sont « comptée », si mes enfants doivent en plus payer pour ce qui n’est (parfois) rien de plus qu’un mouroir….. qu’il me soit permis de dire NON.

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