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Le grand jeu des « chaises » fiscales

La communication gouvernementale fonctionne plein pot sur le dégrèvement puis la suppression de la taxe d’habitation. Les cartes interactives, les comparaisons d’une commune à l’autre, les annonces d’amélioration du pouvoir d’achat, les déclarations des ministres concernés, les compensations promises : c’est une véritable campagne officielle qui déboule avant les vacances dans les médias. L’objectif est double : satisfaire une opinion publique qui ne semble vivre qu’avec l’objectif d’avoir plus de services en payant moins et répondre aux inquiétudes des maires qui eux sont sommés de faire plus en craignant d’avoir moins. Une subtile partie de « chaises » fiscales est lancée avec au bout forcément des collectivités qui se retrouveront dans le vide.

Les municipales approchent et on sait fort bien qu’il y aura une campagne dépolitisée avec des promesses de gestions économes, écologiques et déconnectées des enjeux nationaux. Désormais il faut assurer cet enjeu avec un plan de réforme de la fiscalité locale pouvant satisfaire tout le monde. Les plus insatisfaits se situant en milieu rural la décision a été prise de leur appliquer la même recette que celle que l’on utilise sur la plan social. On supprime la certitude de « revenus » fixes et durables on ouvre la boite à prime non pérenne mais aux effets immédiats. Dans un entretien au quotidien « Les Échos » le ministre de l’Action et des Comptes publics et sa collègue en charge de la cohésion des territoires annoncent « un geste » pour 10.000 communes rurales…. qui représentent environ 110 000 élu(e)s et qui savent que le système proposé de compensation de l’exonération de TH leur sera très défavorable. En effet la taxe sur le Foncier Bâti (TFB) ne constitue pas l’équivalent partout des recettes actuelles. Alors il faut inventer une nouvelle usine à gaz « bercyenne ».

En effet le montant de la nouvelle ressource ne correspondra exactement à celui de la taxe d’habitation pour seulement « quelques centaines de communes », sur un total de 35.000. Globalement, environ 10.000 seront « sous-compensées », quand 24.000 le seront à l’excès. Ce sont les bases des habitations qui rendent les calculs problématiques. Parmi les communes « légèrement surcompensées » on en trouve environ 10.000 du monde rural. Pour elles, le gouvernement propose de leur laisser ce surplus de taxe foncière, dès lors qu’il n’excède pas 15.000 euros, sous forme de recettes fiscales supplémentaires. Une vaste lessiveuse de péréquation sera mise en route pour les autres ce qui procurera bien des joies aux nouveaux maires(esses) élu(e)s qui devront quelques mois après leur élection se lancer dans leur budget 2021 !

L’opération coûtera un gros milliard au budget de l’État ce qui explique que les 20 % des contribuables à la taxe d’habitation ne verront leur exonération effective qu’en 2023 puisque il faudra globalement trouver la bagatelle de 10 milliards d’euros pour l’État en 2020. On décale donc le coût des 20 % restant à des jours meilleurs. Il faudra trouver si l’on en croît les prévisions 2 milliards de plus en 2021, 3 en 2022 et au final plus de 4 en 2023 sauf à trouver des compensation inédite supplémentaire. Bizarrement tous ces problèmes sont repoussés après 2022 !

Pendant ce temps les départements qui assurent plus d’un milliard de dépenses sociales pour le compte de l’État défaillant seront privés de toute autonomie fiscale puisqu’ils ne lèveront plus d’impôt. C’est vrai que c’est catastrophique pour les oppositions qui basent toujours leurs contestations sur le pression fiscale trop forte. Les recettes départementales déjà insuffisantes seront compensées par une part de la TVA la taxe la plus injuste que la France ait inventée puisque pauvres ou riches acquittent leur contribution sur le même taux. On assistera à un dévoiement total des principes républicains puisque c’est le milieu économique qui collectera donc la recette (avec un taux de fraude colossale. Les chiffres varient en effet selon les sources mais se situent entre…. 20 et 30 milliards d’euros par an soit environ 12 % de ses recettes de TVA, qui est pourtant le premier poste de recettes fiscales.

En fait le pari est simple : doper la consommation et donc engranger des recettes supplémentaires procurées par une taxe payée par tous les foyers ou tous les individus et largement inégalitaire. Selon l’INSEE les 10 % des personnes les plus modestes consacrent 12 % de leur revenu disponible à cette taxe, contre 5 % pour les 10 % les plus aisées. L’opinion publique est bien loin de pourvoir apprécier ces parties de bonneteau menées par Bercy qui brouillent les pistes, décalent les décisions douloureuses (échaudés par la taxe sur le gazole) après deux années essentielles pour le pouvoir (municipales, départementales, régionales) qui a bien compris le poids des élu(e)s locaux.

Cette publication a un commentaire

  1. J.J.

    Un geste pour les infirmières et les infirmiers des urgences, un geste pour les communes, un geste pour les retraités, un geste pour x, un geste pour y …..et souvent un geste déplacé.

    Ce gouvernement n’est donc capable que de gesticulations ?
    Du reste il vaut mieux qu’il se contente de gesticuler, devant la propension qu’il développe à prendre des décisions calamiteuses.

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