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Les rediffusions estivales, perles de mémoire

Une bonne part des activités des soirées estivales, dans la caravane, dans le camping-car ou dans le gîte loué un an à l’avance,  après un dîner frugal reposant sur le concept des cinq légumes car on est au régime, consiste à céder à la tentation de la rediffusion télévisuelle. Une  spécialité bien française mais tellement prisée que ses dirigeant.e.s en sont tout excusés. Une sorte de madeleine de Proust annuelle, destinée au plus grand nombre, est en effet offerte chaque soir au téléspectateur payant sa redevance audiovisuelle. Incontestablement, c’est l’un des musts du service qui fut public de télévision que ces moments qui ramènent pour la énième fois sur le petit écran, des films ayant comme seul intérêt celui de nous éviter de deviner la fin !

La « rediffusion » appartient aux incontournables de l’été, surtout qu’elle permet de partir avec le premier épisode d’une série et de revenir avec le dernier. Bien évidemment, il arrive qu’un différend familial éclate autour de l’année de sortie de cette merveille du septième art, ou que l’on se chamaille sur l’âge présumé d’une actrice mais, dans l’ensemble, il y a consensus dans le salon car le spectacle proposé permet aux aînés de devancer le scénario et aux plus jeunes de découvrir un « collector ». Un été sans « gendarmes », sans « Angélique », sans « Pagnol », c’est véritablement un été de détresse absolue, susceptible de vous pourrir vos congés.

Bien entendu, il est vivement recommandé, pour les femmes, de ne pas raconter aux collègues, à la rentrée, qu’elles ont passé des soirées enflammées sur le canapé, devant un Louis de Funés en uniforme, grimaçant sur les bords de la grande bleue, un Robert Hossein claudiquant dans un palais oriental, un Raimu ventripotent dans son tablier de cafetier, servant les quatre tiers d’un mandarin, citron-curaçao. Ce n’est pas très « sea-sex and sun » pour le café pris entre copines bronzées au self service.

Bien évidemment, la fierté masculine peut elle aussi en prendre un coup si, devant un parterre féminin, un avachi estival fasciné, évoquait les formes généreuses de Michèle Mercier, la naïveté mélancolique d’Orane Demazis ou les baigneuses nudistes de plages de Saint Tropez !

La « redif » a cette particularité de n’avoir été regardée par personne, mais de toujours réaliser un carton à l’audimat ! Personne n’a revu, une fois l’été fini, ces séquences mythiques de la partie de cartes, de la conduite extravagante de sœur Clotilde, de la vente sur le marché des esclaves, d’une Angélique révoltée; personne n’a ré-entendu ces répliques merveilleuses comme « tu me fends le coeur ! », « je t’aime Jeoffrey ! », « les voies du seigneur sont impénétrables, lui seul connaît la route ! » et tant d’autres qui sont entrées dans la légende. C’est tabou !

N’empêche que si vous voulez passer un bon été, il vous faudra, d’une manière ou d’une autre, retrouver ces images d’une période durant laquelle vous ne rougissiez pas de vous détendre. Il est vrai que désormais, seule la violence permet de captiver un auditoire intéressé. L’amour impossible, c’est dépassé, les contes de fées, c’est obsolète, l’épée n’a plus cours, le sacrifice s’est ringardisé et la grimace ne se contemple que dans les zoos.

De Funés a rejoint Raimu, Fernand Charpin, Jean Claude Pascal, Pierre Fresnay, Orane Demazis, Jean Lefèvre, Christian Marin, quelque part dans un studio céleste. Sur l’écran noir de ces nuits d’été, ils sont les étoiles du plus formidable générique populaire, ayant réuni les générations dans la continuité devant des écrans blancs, dressés dans l’obscurité.

Il ne reste parfois que des souvenirs d’été joyeux de ces rencontres répétées avec ces membres de la famille « rediffusion » et, il devient impossible de s’en passer, comme ces psychotropes permettant de voir la vie autrement.
Tout devient simple si l’on entre dans le jeu de ces scénarios, oscillant en permanence entre l’espoir et la peur, la cruauté et la tendresse, la fortune et la misère, le dérisoire et le profond, l’exotisme et la proximité, la beauté et la laideur, le mensonge et la sincérité… 

Chaque film ouvre les portes à celles et ceux qui désirent aller se réfugier quelques instants hors du monde. Hier soir, les gendarmes étaient en balade, Angélique sortait ses griffes face à un sultan musulman intégriste, et il ne manquait que Marius, Fanny et César qui n’avaient pas été « enchaînés » ! Il reste encore un espoir, puisque l’été n’est pas fini… cette année la rediffusion débute sur les chaines des télés-perroquets avec « Faits divers d’été d’Alexandre ». 

Le héros principal en est un certain  Benalla, un héros comme on n’en fait plus ! Un scénario mélant les « Bronzés font du ski » et « Les hommes du Président » va à nouveau garnir les gazettes et les écrans. Il est de retour et ses mensonges, ses bévues, ses scnadales, ses trséors cachés, ses exploits, ses enquêtes, ses voyages  constituent une extraordinaire série estivale ! A rediffuser évidemment! 

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