Cachons ces mendiants que nous ne voulons plus voir !

En France, il est désormais classique de réinventer ce que les autres ont mis en place depuis très longtemps. C’est ainsi que si l’on se contentait d’appliquer les textes existants, une bonne part de la situation sociale critique serait vite résolue. Le principal  domaine reste celui de la sécurité. Les Ministres qui se succèdent, les parlementaires qui ont envie de se faire un nom, les maires soucieux de rassurer leurs habitants… continuent à faire des propositions soit-disant en adéquation avec les problèmes constatés, quand ils ont déjà tous les outils légaux.

Claude Bartolone, que j’aime bien par ailleurs pour son franc-parler et ses analyses sûres, a estimé qu’il fallait interdire la mendicité des adultes «avec des enfants mineurs», comme la pratiquent notamment certains Roms actuellement en France. Lorsque vous avez durant des journées entières des mères en particulier, qui mendient avec des enfants en bas âge, il y a des choses qui ne peuvent pas être acceptées», a t-il déclaré. «Il faut l’interdire», a-t-il répété. « Lorsque l’on a des enfants et des mères dans une telle situation, il faut être capable de les aider. Les collectivités locales savent le faire, il y a l’aide sociale à l’enfance, un certain nombre de structures qui permettent de prendre en compte ce genre de choses ». Or il se trouve que la mendicité sur la voie publique est interdite depuis des décennies.

La mendicité, d’après la loi, est « le fait de mendier ». Le terme décrit soit l’action soit la condition de celui qui y fait appel et ses formes sont variées (à la porte des églises, dans les moyens de transport, avec l’utilisation d’enfants pour apitoyer, à la suite d’une prestation de type artistique – généralement de la musique – ou de l’offre d’un service – vente d’un journal notamment). L’exercice de la mendicité ne constitue plus un délit, et heureusement, depuis l’entrée en vigueur du nouveau code pénal au début des années 1990. Cependant, elle peut être interdite dans certains lieux par des règlements de police pris par le maire, notamment pour des raisons de sécurité. Sur la voie publique, c’est juridiquement l’utilisation de cet espace pour une finalité particulière.

Juridiquement, les maires des communes disposent, en vertu du code général des collectivités territoriales (CGCT), de la possibilité de contrôler l’exercice de la mendicité dans leur commune en utilisant leurs pouvoirs de police sur le fondement de l’art. L. 2212-2 de ce code. En effet, cet article assigne à la police administrative la fonction d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. L’absurdité, c’est que le non respect de ces règlements de police est sanctionné par l’art. R. 610-5 du code pénal, c’est-à-dire par les amendes prévues pour les contraventions de première classe ! Autant dire qu’elle est inapplicable dans les faits. La mendicité ne devrait pas exister, car il existe bien des dispositions légales pour la faire disparaître. Faire une loi supplémentaire en servirait à rien !

Si l’action juridique locale dans sa dimension répressive peut parfois être nécessaire, elle ne peut prétendre être la panacée, car elle ne traite que les symptômes, et risque de seulement déplacer les problèmes dans les communes voisines. Réglementer de manière coercitive et sans ménagement, aboutirait à des formes de bannissement et à un traitement inhumain des plus démunis. Un texte supplémentaire est donc totalement inutile. donc jamais la loi… ou les arrêtés municipaux. La mendicité des enfants est plus grave parce que l’individu est stigmatisé par une image de déchéance avant même d’avoir un peu de prise sur sa propre vie. Les diverses allocations et aides, familiales et sociales, et l’obligation scolaire sont des instruments essentiels de prévention et de dissuasion de la mendicité enfantine.  Les Roms ne le sont pas, donc… c’est encore plus idiot de prétendre que l’on va les empêcher de mendier et de le faire avec les enfants… Chaque fois qu’une femme est dans cette situation, il serait souhaitable qu’un diagnostic social soit obligatoirement réalisé, car il existe des dispositifs de soutien à l’enfance qui peuvent être actionnés. Et ce n’est pas aux policiers de le faire.  En fait on entre dans une autre vision de l’accueil de ce constat social. Il devient urgent de ne pas prétendre que le tout répressif reste la solution à l’insécurité. Le Président de l’Assemblée nationale est formel : « sur la question des Roms, il faut aider les familles qui permettent à leurs enfants d’être scolarisés régulièrement à s’intégrer dans la société française ». Exact, et donc le corollaire est immédiat : la mendicité avec enfants est interdite et génère d’abord un diagnostic social, puis la condamnation des parents s’ils continuent à la mettre en œuvre. Souvent, on voit la mère ou la grande sœur, sans savoir si elle agit d’elle-même ou si les hommes sont derrière cette mendicité sûrement pas très spontanée.

L’enfant doit être protégé et non pas sanctionné, il doit être, en cas de récidive, pris en charge par les services publics et donc provisoirement placé dans une structure collective. Appliquons les lois, les textes, les règlements existants positifs et ce sera déjà une vraie révolution pour toutes les catégories sociales.C’est le premier courage !

Cette publication a un commentaire

  1. JLE

    Parler d’enfants en situation de misère me touche en ce début de semaine, et je conviens totalement de l’analyse faite, et du besoin de faire un constat social de la situation et de sanctionner l’adulte si faute il y a !!
    Mais qui peut faire ce travail ? vous le soulignez très justement est-ce un devoir de police? de responsabilité d’élu et de son CCAS, des services sociaux d’état(bien amputés par la RGPP) ou alors à des maraudes de bénévoles???
    Effectivement une loi ne sera qu’un texte de plus qui n’ôtera en rien la mendicité aux portes du supermarché du coin (même en campagne)
    Que faire ? Prendre son courage comme le dit Jean Marie se retrousser les manches et faire appliquer les lois existantes .

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