Entendez-vous dans nos campagnes….

Il n’est pas certain que les responsables du Parti socialiste, « spécialistes » des élections, aient effectué une véritable analyse des résultats du premier tour des présidentielles, et qu’ils en aient tiré les conséquences pour le premier tour des législatives. En effet, on est passé très rapidement à la suite, sans en tirer les enseignements utiles à la conduite des opérations électorales. En fait, avec un brin de recul et sans apparaître comme un « donneur de leçons » invétéré, il est possible de mesurer les problèmes que rencontrera tôt ou tard la Gauche dans certains secteurs du territoire. François Hollande a été élu par la France urbaine, mais à failli perdre à cause de la France périurbaine et rurale. D’ailleurs, ce constat se vérifiera dès le 10 juin au soir, car les résultats mettront en évidence la faiblesse croissante de la Gauche sur ces espaces en développement (rurbain) ou en cours d’appauvrissement (rural), dans lesquels il perd pied peu à peu sociologiquement. Et d’ailleurs, le renouvellement des municipalités dans 23 mois confirmera cette déliquescence, avec la montée irrémédiable d’une nouvelle forme de contestation, basée sur la conjonction de ce qui n’est que la défense d’intérêts individuels.

Les populations nouvelles se comportent exactement comme l’ont fait en leur temps les « colons ». Elles considèrent qu’elles on « acheté » un certain mode de vie porté par le retour à la nature, le repli sur la propriété et plus encore le refus de participer à toute démarche collective. La structuration de l’urbanisme, avec le principe du lotissement consommateur d’espace et générateur d’un étalement urbain déplorable, a transformé les zones périurbaines, instillant de nouveaux repères sociaux que le PS n’a pas pris en compte. Sa structuration en sections, repliées sur elles-mêmes, a largement facilité la tâche des médias qui ressassent des vérités toutes faites. Dans les années 70, le milieu enseignant qui, que ça plaise ou non, jouait encore un rôle clé sur ces territoires, par l’exemplarité de son engagement associatif, mutualiste, syndical, a basculé avec la naissance du PS vers la politique. Il a emmené avec lui, dans de nombreux combats locaux, ses valeurs, et surtout le fait qu’il mettait au service des autres de longues années d’investissement social désintéressé. Ce n’est plus le cas, mais plus le cas du tout. Dans les petites villes et les villages, les élus locaux actuellement en place, issus de cette mouvance, arrivent en bout de course et ils n’ont pas de relève. Les « adhérent(e)s » du PS se retirent, en raison de leur âge ou d’une certaine lassitude des milieux dans lesquels ils faisaient vivre des valeurs comme la laïcité (il ne reste par exemple que quelques centaines d’amicales laïques en France dans le milieu rural ou périurbain) la fraternité (quel encadrement pour les clubs sportifs?), la culture (peu de soutien !). L’action éducative populaire de proximité a quitté le devant de la scène, pour être remplacé par des combats internes répétitifs, déconnectés des véritables actes militants.

Le PS a déserté les conseils municipaux ruraux, en raison de la difficulté de se faire élire au scrutin uninominal qui ne fait aucune référence à l’étiquette politique, mais seulement à la qualité de l’engagement. La porte a été ouverte à « l’apolitisme » de façade, et aux compromissions conduisant à répéter sans cesse (et malheureusement souvent par des élus de gauche) que la gestion locale n’est pas une gestion « politique ». Cette désertion du terrain des affrontements inévitables sur des choix portés par des valeurs, conduit inexorablement à la dilution des certitudes électorales. Un sociologue Gaël Brustier confirme cette réalité : le PS est en difficulté dans « des zones périurbaines, situées entre 30 et 80 kilomètres des métropoles de plus de 200 000 habitants. Elles concentrent un tiers de la population, majoritairement des employés et des ouvriers. Ce ne sont pas des zones vieilles, au contraire, on y trouve surtout des actifs de 35-80 ans. Nicolas Sarkozy y a résisté de manière vigoureuse et le Front national y est très fort ». Cette réalité incontestable devrait obliger le PS à se réorganiser, mais il y a fort à parier que, pour des raisons simplement internes, il restera sur les bases actuelles du maillage du territoire et d’investissement social.

On observe pourtant selon Gaël Brussier « dans les zones périurbaines la naissance d’un imaginaire collectif très à droite. La confrontation politique n’y passe plus par la gauche, mais par la droite. Pourtant, ce sont des zones où les classes populaires sont massivement présentes. Outre ce côté périurbain, on peut aussi ajouter le fait que certaines régions sont plus ou moins conservatrices : le périurbain du nord-est est plus sensible au FN que le périurbain du grand ouest. Mais on peut néanmoins diviser la France en trois grandes zones : les métropoles, les zones périurbaines et la ruralité. Les métropoles sont très majoritairement à gauche ; les zones périurbaines massivement à droite et les zones rurales sont des zones d’affrontement. Le Front national y progresse fortement, mais la gauche arrive à être à l’offensive, notamment en s’impliquant dans la défense des services publics… » Si l’on prend l’exemple de la Gironde il faut bien constater que malgré des scores rassurants de François Hollande, ce sont les circonscriptions mixtes périurbaines et rurales (Médoc, Libournais et à un degré moindre Blayais, Entre Deux Mers et Sud-Gironde ouest) qui souffrent le plus. La non présence, au plus près des gens, de militants combatifs sur le terrain des municipalités, a laissé un vide. Et le constat est partout le même : là où il y a des élus locaux implantés, actifs, convaincus, les scores sont tempérés mais moins catastrophiques.

En fait, l’UMP avait parfaitement tablé toute sa réforme territoriale sur cette carence et cette erreur stratégique. Le conseiller territorial n’avait pas d’autre objectif que de casser la proximité ; et la disparition, par étranglement financier des communes pour les dissoudre dans des intercommunalités anonymes visait encore le même objectif. Accentuer la désertification politique de la Gauche sur des zones où elle est en position de faiblesse ! On en reparle le 10 juin au soir !

Cet article a 2 commentaires

  1. GUYON GERARD

    Tout à fait d’accord avec ton analyse;on peut y ajouter le fonctionnement pas toujours transparent d’un parti vieillissant,du moins dans mon secteur.Et puis,il serait de bon ton de respecter les votes des militants…Parité;non cumul des mandats…Amicalement. Gérard.(militant P.S. jusqu’à quand?

  2. Bonjour,
    excellent constat, sur ma circonscription le PS n’a rien trouvé de mieux qu’un candidat EELV pour défendre ses couleurs. Qu’ elle drôle d’idée dans une circonscription où bon nombre des voix de gauche proviennent des salariés directs et indirects de la centrale nucléaire, si l’on ajoute les agriculteurs qui voient rouge dès qu’un vert est à l’horizon… Autant dérouler le tapis pour l’indéracinable UMP local. La section PS de mon canton est un spectre qui a été incapable de faire une liste aux municipales, le maire UMP qui tient au chaud le siège du député UMP, était seul en lice. Lors de la dernière contestation en date, mouvement contre la redevance incitative, ils ont pointé aux abonnés absents. Si ils y était favorables pourquoi ne pas l »avoir dit, pourquoi fuir le débat ?
    Désespérant de constater que le seul qui pouvait secouer le cocotier a été exclu du PS en raison de l’accord EELV/PS. Et pourtant il y a à faire quand on constate que le candidat FN est un ex-Conseiller Général UMP!!!
    Les scores de l’abstention et de Marine vont encore s’améliorer.
    Hélas trois fois hélas! Il ne va nous rester que le vote UMP au deuxième tour si le Front de Gauche ne fait pas 12.5% des inscrits. Voter pour une chèvre verte fraichement repeinte en rose, non merci.
    bonne fin de journée

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