Hollande va payer cher les effets d'annonce de Valls !

Près d’une cinquantaine de Présidents de Conseils généraux de gauche présents autour de la table. Une ambiance pesante, Lourde et même parfois angoissante. C’est un moment clé de ma vie politique que d’assister à ce rassemblement d’élus connus et reconnus, de toutes les tendances et de tous les niveaux qui s’expriment sans ambages sur une réforme territoriale venant de leur tomber sur la tête. Impossible par respect pour le caractère confidentiel des débats de relater la déception, la révolte, la combativité et plus encore la forte désillusion que suscite les prises de position parisiennes. Tant pour la méthode que pour le contenu des annonces faites, l’unanimité se cristallise sur les propositions faites par François Hollande. « On en a marre d’être présentés comme des ringards, des égoïstes, des moins que rien et d’être jeté en pâture à un populisme ignorant tout de la réalité ! » explique l’un. « C’est la fin de la ruralité et la prise du pouvoir par les grandes villes et les métropoles » explique un vieux routier. « Je ne plierai pas ! » clame un jeune… Bref la révolte gronde avec en arrière-plan le risque de paraître comme simples défenseurs d’intérêts personnels. J’ai acquis une seule certitude : François Hollande est encore à contre-temps et hors du temps politique ! La note politique de la réforme territoriale s’annonce salée pour le Président , dont la nouvelle carte de France a réveillé les rivalités régionales de ses troupes et provoqué le courroux de ses alliés radicaux pour un gain incertain. C’est la leçon de cette matinée passée au cœur de la révolte. Il ne se remettra plus de ce choc qui lui a imposé son Premier Ministre par un annonce pour le moins intempestive devant le Parlement.

En préférant s’entourer de quelques amis qui ne lui veulent d’ailleurs pas que du bien au détriment d’un socle de soutiens concrets, pragmatiques, prêts à opter pour des mesures simples, efficaces mais peu spectaculaires il a brisé ses dernières chances de remonter vers la surface. Il a bien tenté une manœuvre de repli en revenant sur la disparition rapide des conseils généraux mais le mal est fait ! Le nombre et la forme des régions de la nouvelle carte n’ont été décidés que quelques minutes avant le bouclage de la presse régionale dans laquelle le président a publié les grandes lignes de sa réforme. Et c’est le fruit de ce fameux esprit de synthèse qui ne lui permet plus d’entrer dans le costume présidentiel.

De partout les critiques fusent car il existe des contradictions flagrantes entre le projet initial et le résultat d’une patchwork injustifiable ! Le Front de Gauche, les Radicaux, bon nombre de socialistes (même à la gauche de la gauche) ne soutiendront pas cette réforme de bric et de broc qui pas un seul instant a été évaluée dans son impact et qui n’est pas certaine d’arriver au résultat présumé. Pourquoi n’a-t-il pas laissé le père de la proposition (élargissement des régions et suppression des conseils généraux) assumer lui-même la révélation de cette carte et cette tribune ? Il est vraiment entouré d’incapables en matière de choix de communication ! Il s’est mis dans une nasse de plusieurs mois dont il ne sortira plus ! Il va s’épuiser à louvoyer contre le vent et en 2016 il n’aura plus de troupes et plus aucun soutien dans l’opinion publique ! Avant même que soit abordée la question du nom des nouvelles régions ou de leur capitale, la réforme fait l’effet d’une grenade dégoupillée sur l’ensemble de l’échiquier politique… Il va faire exploser le PS et il va lancer une fausse bataille des « anciens » et des « modernes » qu’il ne gagnera pas car la « proximité » et l’empathie restent des atouts fondamentaux dans la vie politique.Décidée au lendemain de la déroute du Parti socialiste aux élections européennes, l’accélération de la réforme nourrit les procès en indécision intentés par l’opposition et une partie de l’opinion à l’encontre du chef de l’État. Elle va produire l’effet contraire de celui qui a été espéré. Tout le monde dans les sondages, est d’accord pour fusionner des régions mais celles des autres ! Tout le monde est d’accord pour supprimer les conseils généraux sauf le sien !

La suppression des conseils généraux estd’ailleurs reportée à l’horizon… 2020 pour éviter une révision constitutionnelle hors de portée car illusoire. Cette procédure suppose en effet un référendum ou une ratification par le Parlement à la majorité des trois cinquièmes. Et le Sénat  un peu plus à Gauche qu’antérieurement va être sabordé par les résultats aux municipales, par les erreurs tactiques des fédérations du PS et par cette initiative sera bloqué pour 6 ans ! Dans un contexte de révolte d’une minorité grandissante de parlementaires socialistes et de la défiance de l’opinion, l’exercice aurait été extrêmement périlleux dans les deux cas. Pas question de référendum non plus. Une sorte d’errance de semaine en semaine avec une assemblée générale des conseils généraux explosive le 25 juin précédé d’un rendez-vous à Nevers ce 5 juin sur la ruralité où plus de 600 élus sont attendus !

Afin d’apaiser la « grogne » suscitée par la réforme, le Premier ministre a promis de laisser une part d’initiative, encore à définir, aux parlementaires en juillet au Sénat, après la présentation de deux textes de loi en conseil de ministre, le 18 juin. Le gouvernement espère boucler la réforme en novembre (mauvais mois car celui du Congrès de l’AMF), au prix d’une bataille parlementaire, afin de pouvoir procéder aux élections régionales et départementales l’année suivante Le coût politique de la réforme s’annonce lourd pour le président qui ne peut compter sur ses effets à court terme pour réduire la dépense publique. « Je pense qu’à moyen terme, entre cinq et dix ans, en faisant des économies d’échelle, en supprimant les chevauchements de compétences, les doublons, on peut arriver à une dizaine de milliards d’euros d’économies », soit un peu moins de 5% du budget global des collectivités locales françaises a expliqué Vallini. Chiche : qu’il le fasse valider par la Cour des Comptes ! Tous pour une redistribution, une clarification des compétences, uns suppression massive des syndicats intercommunaux, une économie via la compétence exclusive… mais pour le reste c’est suicidaire !

Cet article a 4 commentaires

  1. J.J.

    Sans me rassurer, ton opinion sur cette réforme me conforte dans la mienne (et je ne dois pas être le seul !). Cette réforme m’a tout l’air pour parler grossièrement, d’une belle c……
    Belle machine à perdre et à développer les mécontentements : promouvoir une occasion de plus de râler était-ce bien nécessaire ?
    Quant aux hypothétiques économies prévues et annoncées, on peut toujours rêver….

  2. fourny

    comme tu le dis tout cela n’est qu’un écran de fumée mais un écran de fumée toxique qui, se rabat dès maintenant sur celui qui a allumé le feu et qui va d’une part le rendre invisible, du moins la cohérence de sa politique, pour les français, et d’autre part qui va l’asphyxier. Du grand n’importe quoi et les annonces ridicules entre 10et 20 milliards d’économies rendent encore moins crédibles ce délire.

  3. Christian Baqué

    Bonjour Jean Marie
    D’accord avec toi sur l’essentiel (sauf sur ta conclusion concernant la suppression massive des syndicats intercommunaux). J’ai signé l’appel de Jean Bartholin, conseiller général de la Loire, et Gérard Schivardi, maire de Mailhac dans l’Aude. Dans leur communiqué ils dénoncent qu’au lendemain des élections européennes, malgré le rejet de la politique du gouvernement, le président de la République confirme vouloir mettre en oeuvre la réforme territoriale, avec un projet de loi dès cette semaine.
    Un projet « qui provoque dans tout le pays une véritable levée de boucliers des élus de toutes tendances politiques » commentent les élus de la Loire et de l’Aude sur le site de la rencontre nationale des élus de Saint-Haon-le-Châtel : http://democratiecommunes.wordpress.com/
    Un projet qu’ils qualifient « d’une contre-réforme de recentralisation / concentration des pouvoirs et des moyens de l’action publique, véritable métamorphose du fameux millefeuille territorial en un obscur pudding prétendument compétitif. »
    Le communiqué disponible sur internet informe notamment que:
    « 150 élus appellent déjà à une rencontre nationale le 28 juin à Paris pour :
    — la défense des communes, et donc de la démocratie locale,
    — la défense des départements, et donc de la cohésion sociale, des solidarités humaines et territoriales,
    — le retrait du projet de loi de réforme territoriale, qui bannit la proximité dans un contexte de crise globale où les citoyens veulent pouvoir contrôler la mise en œuvre du mandat qu’ils confient à leurs élus. »
    Christian BAQUE

  4. Vanmeulebroucke Guy

    Bonjour(?)JMD,

    Loin des yeux,loin du cœur.Cette régionalisation n’est ni plus ni moins qu’une forme d’étatisme régional centralisateur.Si le social doit rester au plus près des administrés,il en va de même entre autres,pour l’action économique et la création d’emplois et nous savons que les grandes métropoles comme Bordeaux et Toulouse par exemples seront toujours attractives du fait de leurs potentiels existants.

    Certes,chaque entité doit disposée de clauses de compétences particulières,mais si l’on veut réaliser des économies d’échelles et faire maigrir le mille-feuilles,c’est à l’échelon local que cela commence.Prenons l’exemple du découpage des cantons.On en réduit le nombre mais on double celui des CG,alors qu’un seul suffit avec une modification de la fonction et un supplément de traitement en conséquence tout en faisant des….économies.Me semble t-il ?

    Outre la région,le département,les communes la réalité même si toutes les structures ne sont pas inutiles,c’est l’action menée par tous les élus ( de tous bords) en multipliant des syndicats à tout va,des EPCI,des SEM,des SPL,des SPLA etc…. et autres organismes de toutes sortent qui se croisent et s’entrecroisent ont contribué à créer une situation de république bananière,politique rejetée par une majorité d’administrés.

    Gouvernance éthique et durable et gestion publique efficiente sont les maîtres mots,plus proches et au service de leurs concitoyens!

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