La reconstruction du pays sera longue et difficile !

Remarquable entretien d’Arnaud Montebourg donné à Sud-Ouest Dimanche. Des réponses claires. Un ton offensif. Des faits concrets. Un parler vrai qui réconcilie véritablement avec une certaine forme du socialisme. Il est bien différent dans sa démarche de Gérard Collomb, dont on se demande quelle mouche « barriste » l’a piqué. Il faudrait éluder les déclarations du Maire de Lyon et diffuser massivement celles du Président du Conseil général de la Haute Saône. Inutile de mettre en doute la sincérité des deux personnalités socialistes, géographiquement voisines, mais très éloignées dans l’analyse d’une situation qui ne souffre pourtant pas de double discours. Comparer Jean-Luc Mélenchon à Pol Pot devrait révulser toutes celles et tous ceux qui croient que les idéaux de la Gauche ne se résument pas à des caricatures aussi déplacées qu’odieuses. Il faut pardonner à ces caciques, qui ont bâti toute leur stratégie sur l’art de se servir dans le centre que d’autres appellent le « milieu » quand ça les arrange, sans se rendre compte qu’ils portent un tort considérable à ce qu’ils prétendent être leur camp !
Arnaud Montebourg a placé le débat sur l’essentiel, car jusqu’à présent le PS n’a pas assez insisté sur l’état de la France dont François Hollande aura la charge ! Elle sera en ruines. Totalement en ruines. Sur le plan économique, sur le plan social, sur le plan politique et plus encore sur le plan de sa crédibilité. « Les sarkozystes ont ruiné le pays. Ils ont laissé les comptes publics à feu et à sang, dans le rouge écarlate, avec 619 milliards de dettes de plus. Ils ont laissé le commerce extérieur avec des déficits de l’ordre de 70 milliards, un record historique depuis la Libération. En cinq ans, avec 1 million de chômeurs de plus, 350 000 personnes sont passées en dessous du seuil de pauvreté. Ces gens qui sollicitent un mandat de plus sont des incompétents notoires, car ils ont mis le pays à sac… » Ces quelques phrases doivent désormais constituer le leitmotiv de la campagne présidentielle. Tout est fait jusqu’à présent pour dissimuler, par de multiples subterfuges de communication, par des rideaux de fumée médiatiques, avec la complicité patente des gens qui bâtissent l’actualité, le bilan du candidat-président ! Dans le fond, même s’il circule dans le milieu politique un principe voulant qu’on ne soit jamais réelu sur un… bilan, il va falloir, au moment où le « programme » sarkoziste va sortir, rappeler qu’il découle d’une série de désastres dont la France mettra des mois et des mois à se remettre. Et inutile de se faire des illusions, la « mise à sac » se poursuit. Arnaud Montebourg sait bien que dans tous les Ministères, on se dépêche d’affecter les crédits encore disponibles, de verrouiller des dossiers, de se servir pour rebondir aux législatives ou plus encore aux municipales ! Dans les domaines dont je m’occupe au plan national, le sport et les déchets, les décisions fusent : toutes favorables aux copains ou aux coquins du monde des affaires.
La France a été dévastée par l’ultralibéralisme et la guerre menée à tous les secteurs d’une société républicaine reposant sur la liberté, l’égalité et la fraternité qui ont été remplacés par le profit, la concurrence,et la précarité. Les Sarkozystes nient l’évidence. La seule revendication qui puisse être portée en faveur de leur mentor c’est celle qui consisterait à demander que le gouvernement Fillon soit inscrit dans le livre Guiness des records ! Pourquoi ne demanderait-on pas que les sages qui apprécient la plus longue saucisse du monde ou le plus vieux chêne, se penchent sur les niveaux de la dette, du chômage, du commerce extérieur au soir du 6 mai, et fassent figurer le nom de Sarkozy parmi les titulaires du brevet Guiness !
Comme après la dernière guerre mondiale, il sera nécessaire de reconstruire. Le problème c’est que cette reconstruction ne concernera pas des bâtiments, des ponts ou des routes, mais des services méthodiquement démantelés, afin qu’il faille des années pour leur redonner efficacité et qualité. L’Europe des marchands et du profit veillera à ce qu’aucun retour en arrière ne soit possible et, inutile de le cacher, la tâche sera dramatiquement difficile ! La France n’échappera au sort de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal ou de l’Espagne qu’avec une farouche volonté de ne pas transiger sur l’essentiel.
Destruction volontaire des corps intermédiaires minés par les réformes de la fiscalité et de la territorialité. Destruction de la confiance dans le politique par le mépris ostentatoire à l’égard des engagements pris et par une campagne basée sur les apparences. Destruction de la solidarité dans les domaines de la santé ou de l’emploi. Mise à sac de la fonction publique d’État, en la « privatisant » au service d’un clan et de ses meneurs. Abandon volontaire du volet public du système éducatif pour le discréditer et le soumettre aux lois du marché. Exacerbation des haines en tous genres entre « privé » et « public » ; « fonctionnaires » et « usagers » ; « étrangers » et « Français ». La France revient à la fin des années 40 quand il a fallu tout reconstruire sur la base des principes définis par le Conseil National de la Résistance. « Le clivage majeur, dans la période actuelle, qui oblige à choisir son camp – ce que ne veut pas faire François Bayrou -, se situe entre les gens qui triment, n’ayant que leur travail pour vivre, avec les fins de mois qui commencent le 15 – en clair, les classes moyennes et populaires – et, de l’autre côté, la finance, sa cupidité, ses rémunérations délirantes, son système spéculatif et ses banques. La seule question intéressante aujourd’hui, c’est « qui paiera le prix de la crise ? » Comment ne pas être en phase avec Arnaud Montebourg ?

Cet article a 3 commentaires

  1. Christian Coulais

    « Comparer Jean-Luc Mélenchon à Pol Pot »
    Est-il là le Poisson d’Avril ? ou dans les 15% d’intentions de vote ?
    Un Poisson d’Avril génial : au second tour François face à Jean-Luc et vice versa !
    Comme fut évincé Lionel, ne peut-on pas imaginer que l’inverse se produise.

  2. Nadine Bompart

    La « saillie » de Collomb montre bien ce qu’est devenu le PS.
    Parce que, faut pas rêver, Montebourg est fort minoritaire! Il représente ce que Mélenchon représentait avant 2005, l’aile Gauche du PS, toujours écrasée et reléguée au fin fond du bureau….
    Vivant en Corrèze, je le connais bien le Hollande, je l’ai vu faire! C’est un gentil Social-Démocrate, pas un Socialiste! Jaurès, Marx et Hugo ne font pas partis de ses livres de chevet!!!! Et s’il traite Mélenchon par le mépris, c’est parce que dans sa tête il est absolument impossible que le Socialisme, le vrai, ait une quelconque chance de pouvoir réussir un jour! Tout ça c’est du blabla pour rêveurs impénitents…
    « tout reconstruire sur la base des principes définis par le Conseil National de la Résistance ». Ça, c’est nous qui le proposons, pas le PS….!

  3. Marae

    Bonjour;
    De toute façon, nous avons à faire à des carriéristes obsédés par leur nombril et/ou leur avenir, pour lesquels notre sort n’est intéressant que dans la mesure où nous pourrons voter pour eux et donner une caution/justification « démocratique » au « pouvoir » après lequel ils courent…
    Montebourg développe un don remarquable de contorsionniste pour celui qui le suit depuis les primaires – encore que « le suivre » n’est sans doute pas le bon verbe! 😀
    « Qui paiera la crise? »: poser la question n’est pas y répondre!
    Faut-il donc nous résigner à choisir entre deux pères fouettards qui ne rêvent que d' »être Président » à tout prix, et nous proposent chacun un avenir « raisonnable » à subir?
    Pouvons-nous entendre ce « Non! Une autre voie est possible! » qui nous donne – enfin – envie de nous lever le matin?

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