L'avenir n'est plus du tout à la vitesse à tout prix !

Il va falloir se rendre à l’évidence : nous n’avons aucun intérêt à bâtir une société coûteuse et irréaliste autour de… la vitesse ! Je deviens de plus en plus fier que Créon soit désormais inscrit dans une autre démarche qui, j’en suis certain, sera celle que nous serons collectivement obligés d’adopter dans une décennie. Désormais, l’équipe municipale a officiellement obtenu son label mondial « Cittaslow », devenant ainsi la quatrième ville de France a obtenir cette certification, qui vise à donner un autre sens à la vie collective. Il faut bien avouer que nous somme obnubilés par le temps, en pensant collectivement que nous devons combattre sa fuite par des économies ridicules qui pénalisent la qualité de la vie. Cette course effrénée pour aboutir à une diminution d’une vingtaine de minutes sur le trajet Bordeaux Paris en TGV appartient aux fantasmes de l’amélioration de la vie.

D’abord parce que cette réduction du trajet ne profite véritablement qu’à des gens qui ne payent pas leur déplacement car ils ont, comme ils le disent, des « obligations » à Paris. Le milieu économique réclame, au nom de l’efficacité, cette dépense de plusieurs milliards, alors que personne n’admet que ce sont les conditions du voyage qui comptent davantage que le temps passé dans le train. En 2013 le Conseil général de la Gironde consacrera plus de 15 % se son budget d’investissement au financement de quelques dizaine des minutes gagnées… C’est quasiment 3 collèges neufs qui sont engloutis dès l’an prochain sur ce dossier, et en 2014 la note sera encore plus salée ! On doit ensuite admettre que personne ne connait véritablement les retombées de cette économie de temps pour, par exemple, le… tourisme ou pour l’habitat. Pour les rencontres, les réunions, les rendez-vous, la visio-conférence est à cet égard beaucoup moins onéreuse, et relativiserait ces gains supposés. Rares sont les chefs d’entreprise qui prennent le TGV : ils préfèrent nettement l’avion et se moquent pas mal des différences d’horaires que génèrera le TGV ! Faites un sondage et demandez donc aux Parlementaires, anciens ministres ou premiers ministres, ardents défenseurs du rail, combien de fois ils utilisent ce support pour se rendre dans une autre ville ? Je ne les rencontre jamais, mais probablement sont-ils cachés ! Ils ont plaidé un dossier pour… les autres, sans avoir eu d’étude indépendante d’impact.

Le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, particulièrement brillant et incisif lors des questions au gouvernement, a enfin osé « parler vrai »  en déclarant : «L’État a prévu une multitude de projets sans avoir le début du commencement du moindre financement (…). Le gouvernement n’aura pas d’autre choix que de renoncer à certaines options.» La Droite (surtout celle qui a un cerveau de 4 ans), a, au cours des dernières années de son mandat,  vécu sur des « effets d’annonce », dans ce domaine comme dans d’autres. Le plus grand moment d’hypocrisie totale a été le fameux Grenelle de l’environnement qui s’est tenu en 2007. On a brassé beaucoup de spendides idées, mais personne n’a envisagé qu’il faudrait les payer dans tous les domaines. Le gouvernement avait admis qu’avant 2020 (soit en 13 ans !) on assurerait la construction de 14 lignes à grande vitesse, soit 2000 km. Un programme de 260 milliards d’investissement ! S’il était utile de relier des régions de France isolées, il y avait également des restructurations de lignes non encore amorties ou des prolongements qui auraient dû être pris en charge par l’Europe !

Or dans le contexte de crise, la France n’a plus les budgets indispensables pour régler cette facture. Les collectivités mises en difficulté par la réforme débridée de la fiscalité locale, refuseront de cracher une énième fois au bassinet. Le gouvernement va donc devoir choisir les lignes auxquelles il renonce. Une mission composée de parlementaires et d’experts sera nommée prochainement pour classer les projets par ordre de priorité. Elle devrait rendre sa copie d’ici à la fin de l’année.

Seule certitude, «les deux lignes en construction Tours-Bordeaux et Metz-Nancy, et les deux projets qui font l’objet d’un contrat signé, Le Mans-Rennes et le contournement Nîmes-Montpellier, ne seront pas remises en cause», souligne-t-on au ministère des Transports ! Les contribuables qui ne prennent jamais le TGV et qui se fichent comme de l’an 40 des minutes gagnées, apprécieront. C’est donc l’abandon des projets  comme celui vers Hendaye, et j’ose l’affirmer, au risque de me faire traiter d’arriéré mental, que ce n’est pas une mauvaise décision (l’arrêt à Dax serait largement suffisant), la ligne TGV Bordeaux-Toulouse, qui mettra la Ville rose à 3 h 15 de Paris, contre plus de 5 heures aujourd’hui. En définitive, il faut revenir à l’éloge de la lenteur mesurée et assumée, car c’est notre avenir qui en dépend !

 

Cet article a 3 commentaires

  1. ROCHER antoine

    Quelle surprise, cette conversion écologique, je croirais entendre certaines de nos proches relations…Mais le débat a déjà eu lieu, pendant des années, et il a été tranché à une énorme majorité. La vitesse est vraiment secondaire ! Nous construisons un réseau européen (comme les romains l’ont fait) parce qu’il n’y aura pas toujours du pétrole pour faire voler les avions ! Et aussi pour débloquer les voies existantes pour cadencer nos TER et les trains de frêt qui, devant laisser passer les voyageurs, n’ont plus de sillons pour arriver avant les camions. Le gain de temps sera un jour sur Bordeaux-Nice par une trans-occitane de l’ordre de 3 h pour 12 actuellement, il faut voir loin; Certes l’argent manquera peut être, mais le raisonnement des équipes régionales socialistes  » tient la route  » si j’ose dire.

  2. Boué

    Respirons, vivons et relisons « chemins aux vents » et « du bon usage de la lenteur » du philosophe lot-et-garonnais Pierre Sansot!

  3. Nadine Bompart

    Environnement ? Reçu hier dans ma ball:
    La Cour de Justice, par sa décision rendue aujourd’hui dans l’affaire Kokopelli c. Baumaux, vient de donner un satisfecit intégral à la législation européenne sur le commerce des semences.

    Pourtant, le 19 janvier dernier, son Avocat Général nous donnait entièrement raison, en estimant que l’enregistrement obligatoire de toutes les semences au catalogue officiel était disproportionné et violait les principes de libre exercice de l’activité économique, de non-discrimination et de libre circulation des marchandises. (V. ses conclusions)

    Ce changement de cap absolu ne manque pas de nous surprendre et de nous interroger.

    La Cour, aux termes d’une analyse étonnement superficielle de l’affaire, et d’une décision qui ressemble plus à un communiqué de presse qu’à un jugement de droit, justifie l’interdiction du commerce des semences de variétés anciennes par l’objectif, jugé supérieur, d’une « productivité agricole accrue » !

    L’expression, utilisée 15 fois dans la décision de la Cour, consacre la toute puissance du paradigme productiviste. Ce même paradigme, qui avait présidé à la rédaction de la législation dans les années soixante, a donc encore toute sa place en 2012. La biodiversité peut donc être valablement sacrifiée sur l’autel de la productivité.

    Cela fait 50 ans que cela dure et le fait que ce raisonnement nous ait déjà amenés a perdre plus de 75% de la biodiversité agricole européenne n’y change donc rien. (V. les estimations de la FAO)

    Si la Cour mentionne les dérogations supposément introduites par la Directive 2009/145 pour les « variétés de conservation », son analyse s’arrête à la lecture des grands titres. Comment les juges n’ont-ils pas voulu voir que les conditions d’inscription des variétés de conservation, dans la réalité, étaient restées pratiquement identiques à celles du catalogue officiel normal [1]? Le critère d’homogénéité, par exemple, particulièrement problématique pour les variétés anciennes, ne connaît aucune modération.

    La Cour n’a-t-elle pas lu les témoignages de nos collègues européens, déjà confrontés à des inscriptions impossibles de leurs semences sur cette liste ?

    Cette directive est un véritable leurre, que Kokopelli et tant d’autres organisations européennes ont déjà dénoncé, et ne vise pas à permettre la commercialisation des variétés anciennes ni même à conserver la biodiversité semencière.

    De plus, cette biodiversité, qui a nourri les populations européennes pendant les siècles passés, est l’objet de la plus grande suspicion. La Cour va ainsi jusqu’a écrire, par deux fois, que la législation permet d’éviter « la mise en terre de semences potentiellement nuisibles » !

    Cette remarque est totalement erronée puisque, comme l’avait justement relevé l’Avocat Général, l’inscription au Catalogue ne vise pas à protéger les consommateurs contre un quelconque risque sanitaire ou environnemental, auquel la législation ne fait même pas référence !
    Cette remarque, surtout, est choquante, quand on pense que les semences du Catalogue, enrobées des pesticides Cruiser, Gaucho et autres Régent, ou accompagnées de leur kit de chimie mortelle, empoisonnent la biosphère et les populations depuis plus de cinquante ans !

    Le lobby semencier (European Seed Association), qui a pris le soin, pendant le cours de la procédure, de faire connaitre à la Cour son désaccord avec l’avis de l’Avocat Général, se réjouit, dans tous les cas, de cette totale convergence de vues avec la Cour. (V. son communiqué et sa lettre adressée à la Cour.)

    Nos adversaires directs dans cette procédure, c’est-à-dire la société Graines Baumaux, mais aussi la République Française, le Royaume d’Espagne, la Commission Européenne et le Conseil de l’UE, doivent également s’en frotter les mains.

    Avec cette décision, les masques tombent : la Cour de l’Union Européenne est, elle aussi, au service de l’agriculture chimique mortifère et de son idéologie corruptrice.

    Et Kokopelli, au contraire de tout ce qui a pu se lire ces derniers mois, n’a aucun intérêt convergent avec Monsanto et autres semenciers-chimistes. Ces craintes exprimées par certains n’étaient qu’élucubrations fantaisistes, voire malveillantes, à l’égard de l’association.

    Mais tout cela se comprend par l’examen du contexte dans lequel prend place cette décision : en Europe, une réforme générale de la législation sur le commerce des semences est en cours. La procédure est placée sous le haut parrainage de l’industrie semencière. Les associations de sauvegarde de la biodiversité, petits producteurs, paysans et jardiniers passionnés, qui, à travers toute l’Europe, conservent clandestinement plus de variétés oubliées que tout ce que le catalogue des variétés appropriées n’en pourra jamais contenir, n’ont pas été invitées à la table des négociations…

    Verra-t-on, dans ce cadre, le législateur européen redéfinir ses priorités ? Les semenciers veilleront à ce que cela ne soit pas le cas.

    La France, dans ce cadre, joue un rôle particulier. Le Ministère de l’Agriculture a dépêché l’une des collaboratrices du GNIS [2], Mme Isabelle Clément-Nissou, auprès de la Commission Européenne (DG SANCO), afin de rédiger le projet de loi ! Mais les conflits d’intérêt, inadmissibles, ne semblent choquer personne au niveau des institutions européennes…

    Ainsi, l’étau se resserre et les perspectives pour la biodiversité n’ont jamais été aussi sombres.

    Et l’Association Kokopelli, qui depuis 20 ans veille avec passion à la préservation du patrimoine semencier européen, bien commun de tous, sans la moindre subvention publique, pourrait donc bien disparaître demain, car son activité, qui gêne l’une de nos sociétés commerciales les mieux installées, ne présente pas d’intérêt pour une « productivité agricole accrue ». Cette décision nous sidère, autant qu’elle nous indigne.

    Plus que jamais, Kokopelli a besoin du soutien moral de la population. Car il n’est pas admissible que les variétés anciennes, héritage de nos grands-parents, soient interdites de cité !
    Nous en appelons également à notre gouvernement. La gauche, sous les précédents gouvernements de droite, nous a dit pouvoir compter sur son soutien à de nombreuses reprises. Il est temps maintenant qu’elle transforme ses promesses en actes (en commençant par retirer son mandat à Mme CLEMENT-NISSOU) !

    Kokopelli, le 13 juillet 2012.

    [1] La directive 2009/145 prévoit que les critères de distinction et de stabilité sont laissés à la discrétion des Etats membres et que, par contre, «pour l’évaluation de l’homogénéité, la directive 2003/91/CE s’applique» : art. 4 §2

    [2] Le GNIS représente les semenciers professionnels en France et dit officiellement «défendre les intérêts de la filière semence» – V. son site Internet

    Ce que nous voulons, sur le plan législatif et réglementaire :

    Le Catalogue officiel actuel est le pré-carré exclusif des variétés protégées par des droits de propriété intellectuelle, hybride F1 non reproductibles. Qu’il le reste.

    Nous voulons que les semences anciennes et nouvelles appartenant au domaine public et librement reproductibles sortent du champ d’application de la législation sur le commerce des semences.

    Il n’existe pas de catalogue officiel obligatoire pour les clous et les boulons. Il n’y a pas de raison de soumettre les semences à une procédure préalable de mise sur le marché, comme les pesticides ou les médicaments, pour les cataloguer dans un registre.

    Des objectifs de qualité et de loyauté dans les échanges commerciaux peuvent être aisément atteints par un règlement de base fixant des critères minimums en termes de qualité sanitaire, faculté germinative, pureté variétale et pureté spécifique.

    Que demande la société Graines Baumaux ?

    Notre adversaire devant la Cour d’Appel de Nancy demande la condamnation de Kokopelli à lui payer 100.000 €uros de dommages-intérêts, ainsi que la cessation de toutes les activités de l’association. Pour information, au 30 juin 2011 la société Baumaux avait un chiffre d’affaire annuel de 14 millions d’€uros et un résultat net de 2 millions d’€uros.

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