Le foot de l'or noir et le foot de la poudre blanche

Le mondial et ses milliards a disparu des écrans. Il faut revenir au menu ordinaire des stades français avec ses duels devant enthousiasmer les foules estivales. L’ouverture de la Ligue 2 avait des allures de vaudevilles avec le cocu amer (Sochaux), le misérable désireux de coucher avec les vedettes (Luzenac), la mariée trop belle ayant pris le pouvoir chez les mecs (Clermont) et les prétendants ruinés cherchant fortune (Lens, Valenciennes). Le ridicule ne tuant plus grand monde dans le milieu du ballon rond on a fait débuter une compétition sans en connaître les participants et avec un calendrier totalement faux. Il n’y a qu’en France qu’un tel méli-mélo juridique peut se produire avec un mélange des étages de la justice « civile » (tribunal administratif), spécialisées (CNOSF), « interne » (DNCG) pour décider si une montée ou une descente obtenue par un classement validé peut être maintenue au annulée ! En fait au cœur de cet été on découvre une fois encore que la seule règle qui prime dans le football c’est celle du fric. Pas de fric pas de montée. Plus de fric et c’est la plongée. C’est la caricature de ce que l’on ne peut plus appeler la glorieuse incertitude du sport.
L’exemple du petit village ariégeois de Luzenac en est la preuve. Impossible de ne pas penser à la situation identique du Club de Saint Seurin sur l’Isle qui accéda grâce à la passion de son président-maire Marcel Berthomé, en 1989 au monde des professionnels… A l’époque l’été avait été exceptionnel dans cette commune de Gironde de moins de 2 500 habitants où personne n’avait pu imaginer un seul instant que leurs footeux se confronteraient aux clubs de très grandes villes. Aucune règle : simplement avoir conquis sa situation de promu et pouvoir en jouir sur un stade de campagne bordé de platanes, doté d’une tribune miniature située quasiment au-dessus de la ligne de touche ! Une ambiance de feu avec le peuple derrière les mains courantes plutôt que des nantis cloîtrés dans une loge champagnisée donnait des allures surréalistes à chaque rencontre. On y vibrait collectivement, solidairement, humblement célébrant les victoires et relativisant les défaites.
25 ans plus tard les textes et règlements ont évolué et Luzenac capitale du talc doit déployer plus d’efforts que durant toute sa saison de National pour évoluer en L2. Et encore son stade placé à quelques dizaines de mètres des lignes de téléphériques portant les wagonnets descendant des tonnes de matériaux à apurer ne verra jamais une rencontre face à des ténors. Il faudra aller à Toulouse pour supporter ces « prolos » du foot qui sont dans l’incertitude sur leur boulot depuis 111 jours !
La mobilisation de Fabien Barthez ne suffit pas car le club des ouvriers de la mine de talc a le vice rédhibitoire de ne pas être capable de distribuer des salaires faramineux à des pousse-citrouilles venus faire fortune. Un mois d’une faible part des chèques mensuels dévolus aux vedettes du PSG suffiraient à financer une année d’activité  des footeux des montagnes mais sur la route d’Andorre aucun émir du Qatar n’a l’opportunité de jouer au roi mage. Alors on se bat pour rassembler 5,5 millions d’euros. 
Ce football me révulse mais il est bien de cette époque dans laquelle la seule référence reste celle de la capacité à faire du profit. C’est ainsi que les producteurs d’or noir sont largement plus généreux que ceux qui ne savent que traiter la poudre blanche. Luzenac indique que ses comptes sont aux normes : « Contrairement à ce qui est communiqué par la FFF et relayé par tous les médias , le club n’a aucun déficit et présente des comptes équilibrés avec des fonds propres validés par le commissaire aux comptes. Il répond à tous les critères réglementaires imposés par la LFP. » Mais que vaut un club ayant pour faire vivre un an son équipe seulement ce que Ibrahimovic gagne en 5 mois ?
Quel est le regard réel des contrôleurs du PSG sur la provenance de son pognon ? Est-ce vraiment de l’argent aussi blanc que celui de Luzenac ? Doit-on considérer que celui qui peut dépenser 45 millions pour acheter un joueur est plus digne de confiance que celui qui fait de la promotion sociale en offrant un avenir à des gens en fin de carrière ? Qui peut prétendre qu’un club ayant gagné sur le terrain son niveau peut le perdre par la seule décision de comptables évaluant des recettes potentielles ? Les routes de ces deux équipes pourra peut-être se croiser un soir sur un stade baigné de lumière. Que penser ? Quel est le plus digne d’être montré en exemple ?
Deuxième de National derrière Orléans la saison passée, Luzenac, petit village de 650 habitants niché sur les rives de l’Ariège, là_haut dans les montagnes des Pyrénées avait gagné sur le terrain le droit de fouler les pelouses de L2. Ce fut difficile exigeant, improbable mais pas autant que pour obtenir de tenir le rôle du Petit Poucet pauvre parmi les ogres de L2.

Cette publication a un commentaire

  1. Phaidon

    Les poudres blanches ont pourtant fait perdre des têtes pour une accession sociale détournées ……!

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