Le trio qui masque la réalité des mutations

Il suffit que trois hauts fonctionnaires soient déplacés pour que les donneurs de leçons de l’UMP se déchaînent. Il est vrai que ces personnages, connus pour leur engagement à l’égard du président sorti, étaient irréprochables dans leurs rôles respectifs et n’avaient jamais manqué à l’obligation faite à un employé de l’État d servir les valeurs républicaines plutôt que des intérêts partisans. Il faut avouer que l’indignation de François Fillon a quelque chose de pathétique, dès lors qu’il n’a jamais eu à faire pareille besogne, puisqu’il faut remonter à 1995 pour se retrouver dans une situation identique. Quand Chirac est arrivé au pouvoir, il n’y avait eu aucune modification des organigrammes au sommet de la Police ou des services de renseignements ! En définitive, il semble que tout ce beau monde ait oublié qu’il existe dans la fonction publique un certain nombre de postes dont la nature même implique l’acceptation de mutations liées aux mouvements politiques. Les cris d’orfraie ne changent rien à la réalité. Il faut même rappeler que l’UMP voulait précariser le sort des fonctionnaires, en leur imposant des contrats à… durée limitée, calqués sur le système privé ! Là, en l’occurrence, les « mutations » vers des postes tout de même « confortables » n’apparaissent pas comme des sanctions très pénibles. L’un devient délégué interministériel à la sécurité routière, l’autre se retrouve « provisoirement » Préfet hors cadre (il ne lui manquera que des primes et des avantages en nature), et le troisième, conseiller d’Etat en service extraordinaire… il faut reconnaître que les socialistes sont plus prévenants que ne l’était le Président sorti.

Le préfet du Var, Jacques Laisné, avait été muté alors qu’il devait suivre une affaire d’égoûts. Ceux du Cap Nègre. La belle-famille du président de la République, les Bruni-Tedeschi, possèdent une résidence dans cette commune. En août 2008, Nicolas Sarkozy était intervenu pour que cette affaire soit réglée… Faute de solution, le Préfet avait été muté ! François Fillon n’avait pas jugé l’affaire immorale ! Jean Charbonniaud, préfet de la Manche, avait lui, été nommé préfet hors cadre pour siéger comme membre du Conseil supérieur de l’administration territoriale de l’État. Une décision intervenue deux semaines après la visite houleuse de Nicolas Sarkozy à Saint-Lô. Le directeur de la police de la Manche avait lui aussi été muté. Le président de la République s’était déplacé le 12 janvier à Saint-Lô pour présenter ses vœux aux enseignants, mais le bain de foule attendu avait dû être annulé devant l’hostilité des manifestants. Pas de communiqué de François Fillon…

Thierry Tesson, sous-préfet de Saintes depuis le mois de juillet dernier, a été démis de ses fonctions par décret du président de la République Nicolas Sarkozy, en date du … 7 mai 2012. Alors que l’État affirmait que c’était à la demande de l’intéressé, l’ancien directeur de cabinet de Fadéla Amara, ex-secrétaire d’Etat à la ville, avait publié un communiqué qui ne laisse guère de doute sur le caractère forcé de cette éviction. Allez hop ! Encore une occasion perdue de s’exprimer pour l’ex-leader putatif de l’UMP ! Les Girondins se souviennent aussi du départ « non consenti » du préfet Schmitt vers les dorures du Conseil d’État, dans la semaine ayant suivi la victoire de Michèle Delaunay aux cantonales, sans que personne ne s’étonne de la coïncidence des événements !

Il y a eu, avant la défaite de Nicolas Sarkozy, des dizaines et des dizaines de « mutations » promotions de membres des cabinets ministériels ! Selon certains ,ce sont près de 120 personnes qui ont regagné leurs corps d’origine ou qui ont intégré des postes hors système habituel de nominations dans la fonction publique. Inutile de préciser que la « morale » à laquelle l’ex-Premier Ministre semble maintenant très attaché, a été la valeur de référence. La palme d’or du cabinet le plus efficace dans le « recasement » méthodique est attribuée au Premier ministre, avec 23 départs en quatre mois. Les collaborateurs de François Fillon ont choisi le privé (pour cinq d’entre eux) plutôt que l’administration. Les 13 autres se répartissent les préfectures, ambassades, établissements publics, mais aussi les Grands corps d’État ou l’enseignement et la Justice.

Arrive en deuxième position le ministère des Affaires étrangères et européennes d’un certain Alain Juppé et ses 13 départs. Le Quai d’Orsay cumule à la fois un fort taux de départs et un taux maximum de départs dans une seule direction : les ambassades. On notera aussi l’annonce du dernier départ d’avril : Véronique Gomez, fille de Michel Mercier et conseillère parlementaire de son père à la Justice, pour la Caisse des Dépôts et Consignations.

La majorité des mouvements se sont faits en faveur de l’administration, au sein d’un même ministère, dans un ministère différent ou encore dans l’un des nombreux services déconcentrés de l’État. On enregistre ainsi 37 départs de ministères vers l’administration. L’autre grand mouvement des collaborateurs s’est fait vers le corps diplomatique, au service des ambassades, avec 19 départs – dont les fameux 13 du ministère des Affaires étrangères. Ensuite 11 acteurs publics ont quitté les cabinets pour un établissement public, et une dizaine se sont engagés en Préfecture. Mais ces mouvements ne sont pas politiques pour un sou, et plus encore, ils respectent, selon saint François de Fillon, le code de l’éthique républicaine… alors que pour les trois hauts fonctionnaires déplacés, il s’agit d’un vrai scandale !

 

Cette publication a un commentaire

  1. J.J.

    La mauvaise foi étant le pain ordinaire de ces « braves gens », il ne faut pas s’étonner de ce genre de réaction (terme combien propre au personnage !).

    Ces grands croyants, qui étalent leur foi(souvent très mauvaise) ont oublié les Evangiles :

    «  »Tu vois la paille qui est dans l’œil de ton voisin mais tu ignores la poutre qui est dans le tien… » »

    Qui donc a été crédité de cette déclaration, au fait ?

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