Les saignées contraintes sont-elles préférables aux traitements mesurés ?

La Grèce n’en finit plus d’agoniser sous la pression des organismes internationaux qui lui imposent une politique de rigueur drastique. Les mêmes causes produisant les mêmes effets (négatifs en l’occurrence) on a du mal à comprendre les raisons qui poussent la fameuse « troïka » (FMI, BCE, UE) a accentuer sa médecine de crise. Des doutes ont été émis au sein des structures concernées mais sur le terrain les « purges » continuent. On se croirait au XVII° ou au XVIII° siècle quand les docteurs préconisaient massivement les saignées pour réconforter les malades.

Les députés grecs ont donc adopté le projet de budget 2014. Il est marqué par une baisse de 3,1 milliards des dépenses, sur fond de crispation des discussions de la Grèce avec ses créanciers de l’UE et du FMI insatisfaits du cours des réformes, là où Athènes voit au contraire d’importants progrès…. Réduite à une étroite majorité parlementaire de 154 sièges sur 300, la coalition conservateurs-socialistes, dirigée par le Premier ministre, a obtenu 153 votes favorables à la loi de finances qui mise sur un retour de la croissance en 2014. Le gouvernement prévoit en l’état une hausse de 2,1 milliards des revenus tirés des impôts pour une baisse de 3,1 milliards des dépenses, via de nouveaux coups de rabot dans les secteurs de la santé, des assurances sociales et de l’éducation. Il table sur un PIB en légère progression de +0,6%, après six années consécutives de récession dont une contraction de -4% prévue pour cette année.  La Grèce devrait également se retrouver dans une situation inédite depuis longtemps: être en capacité de subvenir à ses dépenses ordinaires grâce à la réalisation d’un excédent budgétaire primaire (hors service de la dette) d’environ 3 milliards d’euros en 2014, après un premier excédent de 812 millions cette année. Il s’agit d’une grande nouveauté mais à quel prix !

Personne n’évoque les drames personnels et humains que génère cette politique. La troïka n’en a aucune idée. Pour elle la gouvernance se résume à un plan comptable. Certes les responsables grecs commencent à évoquer une sortie des plans d’aide internationaux, à l’échéance du second programme de sauvetage en juillet 2014, et assurent préparer un retour du pays sur les marchés mais pour eux il ne faut surtout pas faiblir dans la rigueur. Les créanciers ont alors annoncé qu’ils viendraient bientôt mais en attendant ils ont gelé le versement d’un prêt d’un milliard d’euros. Et le Premier ministre n’a pas caché  au Parlement que les discussions avec les bailleurs de fonds du pays UE-BCE-FMI étaient « difficiles »  

Les Grecs se sont débattus et ont constaté que rien ne les libérerait de cette menace de mort lente. D’ailleurs Les syndicats avaient appelé à manifester contre un budget qui va conduire à « une hausse du chômage, un appauvrissement de la population, l’effondrement de la cohésion sociale et une crise humanitaire sans précédent ». L’an dernier, la mobilisation, à laquelle s’étaient joints des partis d’opposition, avait rassemblé 15.000 personnes à Athènes le soir du vote du budget et jusqu’à 70.000 personnes lors de défilés organisés les jours précédents ce vote. Depuis la rentrée, la contestation sociale sous l’égide des syndicats marque le pas en Grèce, même si des grèves sectorielles, comme dans l’éducation et la santé, ont été très suivies. Les deux grandes centrales syndicales du public et du privé, GSEE et Adedy, ont même annulé un défilé lors de la dernière grève générale du 6 novembre, faute de participants. C’est un signe inquiétant d’impuissance qui devrait au minimum interroger dans d’autres pays européens.

En fait on peut facilement imaginer ce qu’il se serait passé en France sans alternance . Les demandes des visiteurs UE-FMI-BCE sont en effet totalement conformes à ce que prône la droite dans notre pays. Pour eux le déficit budgétaire pour 2014 est encore trop élevé, Ils exigent la vente ou la disparition de l’entreprise publique d’armement déficitaire EAS ce qui améliorerait considérablement le niveau du chômage et les ressources fiscales. Le sort du moratoire sur les saisies immobilières comme sur les expulsions doit être levé. La troïka va jusqu’à imposer un changement dans les règles de licenciement collectif. Enfin elle souhaite la poursuite du plan de restructuration de la fonction publique. Ces mesures s’ajoutent à celles prises depuis 4 ans dans bien d’autres secteurs de la vie sociale.

Chez nous l’annonce de 4 000 postes en 2015 dans les collèges n’a pas soulevé la moindre approbation. La réforme de la fiscalité (les Grecs sous la menace viennent de créer une taxe très élevée sur le foncier)ne suscite que des quolibets et des doutes. L’intervention de l’Etat en Bretagne ou ailleurs en faveur de l’économie privée est toujours jugée insuffisante. L’adaptation du code du travail a été vécue comme une atteinte intolérable au statut des salariés ayant un travail. Bref toute tentative librement réformatrice en France n’a aucune chance d’être soutenue. Mieux vaut agir le dos au mur et la corde au cou. 

Cet article a 3 commentaires

  1. Eric Batistin

    « Mieux vaut agir le dos au mur et la corde au cou » !!
    Cela ressemble bel et bien à une fin de non recevoir.
    En dehors des villes vivent bon nombre de chasseurs,
    chasseurs de petits oiseaux ou chasseurs de sangliers,
    peu importe, tous ont un fusil.
    Tous ont signé lors de l’achat de leurs armes un contrat
    stipulant clairement l’interdiction de la chasse à l’homme.
    Dans les casernements vivent des militaires,
    tous ont signé un accord avec la Nation,
    accord comportant, sauf erreur de ma part,
    une clause de protection des citoyens.
    Sauf qu’ils travaillent maintenant pour des gouvernements
    subjugués par la finance et ne faisant plus aucun cas du citoyen.
    Dans les universités vivent de jeunes gens,
    tous ont à leur disposition une pléthore de textes
    dont le but est de les instruire.
    Pourtant plus rien ne servira à leur avenir que de savoir compter.

    Alors, quand toute la population est prise au piège,
    quand les institutions sont trompées,
    quand la jeunesse est privée de tous sens commun
    et de tout humanisme,
    quel est donc cet ennemi dont nous parlons tous
    et qui semble inaccessible, invisible, impalpable?

    Quel est donc cet ennemi qui nous oppose une force violente,
    pouvant aller jusqu’à l’emprisonnement, la guerre,
    la privation des libertés les plus élémentaires ?

    Quel est donc cet ennemi qu’aucun chasseur ne saurait atteindre,
    même armé d’un fusil à lunette ?

    Quel est donc cet ennemi qu’aucun militaire
    ne parvient à identifier, repérer, encercler, pour l’empêcher de nuire ?

    Quel est donc cet ennemi que nos jeunes gens prennent parfois pour modèle,
    pensant pourtant lutter contre lui, encouragés par des discours trompeurs ?

    Quel est donc cet ennemi ?..

    Et bien ce ne sont semble-t-il que quelques hommes,
    fait comme nous de chair de sang et d’os,
    fort sensibles eux aussi aux murs et à la corde.

    Comment les identifier?
    Et bien de la façon la plus simple qui soit:
    toute entreprise ne respectant pas un et un seul
    des articles de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme
    devra être sérieusement empêchée de nuire.

    Il faut bien (re)commencer par quelque chose !

    http://droits1789-2014.blogspot.fr/

  2. Huet

    Les manifestants en France vont dans la rue, non pas pour défendre l’intérêt général, mais uniquement un privilège individuel..Je repense aux manifestations de céréaliers qui se plaignaient de ne plus recevoir les aides aux exportations de l’UE..Et que dire de ces deux milliards gaspillés en Bretagne, pour repousser à dans quelques mois, les faillites d’aujourd’hui. On fait du saupoudrage d’argent public sans résoudre les problèmes.
    Pour commencer, il va falloir intégrer le fait que la France vit au dessus de ses moyens depuis de trop nombreuses années. Diminuer les dépenses (ce n’est pas un gros mot) et optimiser les recettes..Souvent, ceux qui se plaignent de payer trop d’impôts sont les mêmes qui critiquent les déficits de l’Etat..L’intérêt général on disait…

  3. Get Smart

    Pour la CGT, la mobilisation doit se poursuivre à l’occasion d’un nouveau passage au Sénat dès le mois de décembre et à l’occasion de la publication des décrets publiés dès la fin 2013 début 2014.

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