On réussit mieux sa vie politique hors du "tunnel" !

Dans un texte publié sur son blog, Michèle Delaunay, femme de conviction et de franc-parler, a largement déchaîné les passions. « Comment faire carrière sans mettre un pied dans la vraie vie » a secoué bien des personnes qui se sont reconnues dans les parcours décrits. Elle avait appellé cela «le tunnel», une fois dedans, la carrière de ces jeunes élus va se dérouler (c’est le cas depuis longtemps) sans accroc en dehors de toute réalité sociale ou économique. «Ces élus n’ont jamais connu la vie réelle. Entrés tôt dans le tunnel, ils n’en sont jamais ressortis, dénonce-t-elle. S’il est élu, le parachuté devient un conquérant. Nul, sur le terrain, ne le connaissait avant, ne sait vraiment quelles études il a fait ou s’il a eu jamais la moindre responsabilité. Son document électoral est son seul passeport.» Dans son billet, Michèle Delaunay raillait cet entre soi politique, d’élus tous originaires du même milieu social et fabriqués dans le même moule qui actuellement tente de donner des leçons permanentes à celles et ceux qui ont été élevés à l’air libre. Consanguins des membres des cabinets ministériels ils sont pour beaucoup dans les erreurs répétitives du gouvernement actuel car ils se confortent les uns les autres. Mais personne n’a vraiment le courage de l’écrire car ce serait remettre en cause la solidarité interne aux partis politiques. Ils sont à paris là où se font et défont les carrières. Il arrive cependant que des parcours politiques n’aient absolument rien à voir avec celui des tunnels parisiens. Certes c’est de plus en plus rares et ce ne sont pas les réformes en cours qui vont consacrer des « gouverneurs » provinciaux, des « administrateurs métropolitains » ou des « gestionnaires intercommunaux » taille « patrons » qui iront contre cette tendance voulant que le peuple réel n’ait plus d’élus dans le système de la démocratie représentative. Et c’est déjà valable pour le FN !
En étant largement choisie par ses pairs socialistes (66 voix et première de toutes les candidatures) comme vice-présidente du Sénat la girondine Françoise Cartron casse cette logique. Pour elle j’ai en mémoire une phrase du testament d’Antoine Victor Bertal qui constatait que l’on ne pouvait arriver aux sommets qu’en « empruntant des sentiers pentus et étroits ». Et elle connait tous ces chemins de la politique tortueux et parfois parsemé de chausse-trappes. Elle sera bien évidemment classée très vite par ses amis qui lui veulent du mal ou ses adversaires qui ne lui veulent surtout pas du bien dans la catégorie des « opportunistes », des « carriéristes », des « individualistes ». C’est la loi du genre dans la période actuelle où l’on juge forcément les acteurs du monde politique à l’aune de ses propres ambitions déçues. On ne cherche plus ce qu’il y a derrière l’arrivée au pouvoir sauf si l’on est certain d’y trouver des diplômes, des expériences, des prédestinations, des compromissions, des échanges de services, des prestations fraternelles. Être, comme elle, enfant du peuple, restée dans le peuple et ayant consacré sa vie à servir le peuple ne constituent pas nécessairement maintenant un viatique pour le succès.
Fille d’un artisan charpentier tyrossais, Françoise n’a jamais changé d’un iota dans ses certitudes. Son père a trouvé la mort après une honteuse affaire médicale ce qui a laissé, son épouse et sa fille désemparées. Cette épreuve ne fut surmontée que grâce à cette école publique qui tendait alors la main, à travers ses hussards noirs aux jeunes qu’elle estimait aptes à jouer un rôle exemplaire dans la vie sociale.
Il n’y avait alors, comme pour des milliers d’entre eux, qu’une seule solution : progresser au mérite et sans cesse se battre pour gravir les échelons en passant par ces fameux creuset républicain qu’étaient les écoles normales. Portée par ses professeurs du collège tyrossais elle échappa ainsi au sort promis d’ouvrière dans l’usine d’espadrilles landaises de sa cité natale. Ce n’est ni le roman de Cosette ou celui de Blanche-neige mais la réalité d’une période où l’espoir passait encore par la réussite scolaire. Elle s’est forgé le caractère dans cette période où tout dépend de vous et pas des autres !
Dans sa biographie on ne rappellera pas probablement que, quand après avoir, comme moi, longtemps hésité elle se lança dans la conquête d’une ville où les donneurs de leçons avaient renoncé à aller. Un combat ingrat et de longues années à se battre contre un affairiste dynastique qui aimait bien l’humilier en l’appelant « Tampax ». Accrocheuse, battante, courageuse elle fut toujours en prise avec ce milieu politique qui a toujours refusé les têtes fortes, atypiques, minoritaires et les gens ne renonçant jamais à leurs valeurs.Le « tunnel » elle ne s’y sent pas bien, elle ne s’y s’est jamais bien sentie. Mieux elle le déteste. Elle a habité dans un immeuble de ces ZUP et a fait la majeure partie de sa carrière d’institutrice ou de directrice de maternelle dans la zone d’éducation prioritaire de Lormont qu’elle connaissait de longue date.
La réalité ! La dure réalité ! La triste réalité ! Le bonheur de servir ! La volonté de faire progresser les autres. le choix du service public. La volonté d’être à la hauteur de sa mission. La force de la conviction. La solidarité sous toutes ses formes. Le combat politique concret. La préférence pour la sincérité face aux combines. La résistance quand tout vous incline à renoncer. La fidélité à ses vrais amis. Le besoin de justice. Françoise Cartron a conquis tout ce qu’elle estimait utile à ses idées et a résisté à toutes les tentations depuis son époque de rocardienne ( « c’est mon étoile jaune » explique-t-elle). Désormais elle sera la première femme et même la première représentante de la gauche girondine à accéder au « plateau » du Sénat. Elle ne changera pas pour autant !
J’ai une seule certitude : elle sait d’où elle vient ! Elle a été « élevée » socialement dans les Landes et en Gironde à l’air libre de l’égalité, de la fraternité, de la liberté, de la laïcité et elle ne l’oubliera jamais. Je sais aussi ce que ça veut implique !

Cette publication a un commentaire

  1. ipotheque

    Reprenez les situations professionnelles de chaque représentant(e) à l’Assemblée Nationale et vous comprendrez beaucoup des milieux et de l’éducation retenue pour chacun des sujets qui font de la politique au non du peuple……!

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