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La France vire au théâtre permanent de guignol

On voit chaque jour des « accros » de Facebook fermer leur profil, le restreindre considérablement ou ne plus l’utiliser. Il arrive aussi que le ménage soit obligatoire parmi ce que l’on appelle abusivement la plupart du temps des « amis » alors que ce ne sont que des témoins occasionnels de vos prises de position ou des événements marquant de la vie personnelle ou collective. En fait c’est un vrai révélateur de l’état de l’opinion quand on analyse les commentaires accompagnant un post. En fait c’est tout l’intérêt de ce réseau : savoir comment évolue l’opinion dominante. Une simple statistique permet de le vérifier en comptant après une publication combien elle suscite de prises de position positive ou négative. C’est un signe social fort : seule la polémique attire l’attention et l’éducation, l’explication jugées trop longues n’intéressent plus personne. Une petite phrase intitulée sur mon profil « grain de sel » peut déclencher des réactions en chaîne contradictoires ou incompréhensibles alors qu’une chronique informative et explicative n’attire plus personne. C’est à l’image du système médiatique actuel que bien des femmes et des hommes ne supportent plus. La France n’a jamais été aussi superficielle : on compte les tweets pour établir des records quantitatifs, on scrute le nombre de supposés affiliés à un profil, on publie des courts extraits d’un exposé ou d’une conférence sous prétexte que l’opinion n’a pas le temps d’absorber autre chose.
Les événements qui se succèdent depuis une semaine mériteraient une étude particulière sur les réseaux tellement ils ont été commentés selon les nouveaux critères. Le premier constat c’est que la politique est devenu un théâtre de guignols au moins aussi authentique que celui que l’on trouvait dans les jardins et sur les places des villes. Et le public est toujours le même : il s’amuse quand Guignol et son compagnon Gnafron tapent sur la tête du gendarme et il suffit de lire le fil de Facebook pour constater que cet tradition enchante la grande majorité des commentateurs. Si en plus Madelon s’en mêle et ajoute sa verve à la scène on en rit d’autant plus que Flageolet ne tient plus la route et devient la risée de tout le monde.
C’est révélateur de l’état d’esprit actuel : le gendarme de guignol remplit une fonction et il peut être ridiculisé dans l’exercice de sa fonction. Normal. Logique. Indispensable au nom de la liberté. Par contre il est scandaleux et dangereux de s’en prendre à la femme ou l’homme qui l’exerce et de le rabaisser en permanence. Il est devenu de bon ton de taper au nom de la vertu qui est celle du censeur sur la personne intuitu. Les fameux chansonniers du « Grenier de Montmartre » pratiquaient avec bonhomie la caricature ou l’humour vache mais jamais ils n’attaquaient les individus. On assiste sur les réseaux sociaux à ce que les « spécialistes » appellent du « bashing » mais qu’il faudrait appeler la curée. Depuis hier le nouveau ministre de l’économie est devenu un punching-ball pour les porteurs de prêt à porter idéologique.
Sa concierge, sa voisine, sa surveillante générale du collège, ses copains de classe et pourquoi pas son coiffeur ou son boulanger ont été appelés en renfort pour que le peuple s’approprie une image positive de ce nouveau prodige baptisé « chouchou » du Président ou « hémisphère droit ». il n’a pas dit un seul mot que les uns le vilipendent en rappelant sa carrière professionnelle et que les autres le couvre d’éloges en lui prêtant des mérites qu’il n’a sûrement pas. On rappelle même l’écart d’âge avec son épouse ce qui revêt une importance capitale pour l’avenir du pays ! On ne sait pas encore la couleur de ses chaussettes, s’il met un caleçon ou un slip, s’il prend du café ou du thé au petit-déjeuner ! Et sur Facebook ou par tweets c’est qui sera le plus vachard sur la base d’à priori dévastateurs relayés en boucle. On va bien lui dégoter des ancêtres pas très catholiques pour étayer la thèse des compromissions avec le grand capital dont on a besoin détourner l’attention sur l’accessoire non prouvé au détriment de l’essentiel vérifié !
Dans le castelet de Guignol on trouve aussi le « Bailli » ancêtre de l’élu rendu responsable de tous les maux de la société. Sur les réseaux sociaux règne un climat irrespirable de détestation systématique et quasiment maladive des baillis quel que soit leur niveau d’action. Durant tout le mois d’août jour et nuit les maires des communes touchées en Gironde par un terrible orage le 25 juillet dernier ont avec les conseillers municipaux fait face, simplement fait face à des situations individuelles et collectives angoissantes. Peu importe ils sont dans le sac de Géronte sur lequel on frappe avec délectation car ils sont élus et peut-être même pour certains socialistes ce qui aggrave leur cas. Dévouement, sacrifices, angoisse, solidité morale, efficacité maximum et au bout du bout le même sort que les autres ! Lisez Facebook si vous n’en êtes pas persuadés !
Ce terrible déchaînement de poncifs permanents tirés des comportements erratiques des vedettes médiatisées de la politique assassine la République, fait le lit des extrémismes et plus encore ruine la confiance des peuples dans la démocratie représentative. Le seul fait d’écrire, de se dévouer, d’agir au nom de valeurs politiques devient une tare rédhibitoire voire mortelle. Facebook à cet égard devient le déversoir des atrabilaires de la vie sociale. Ils ne rêvent que d’un génocide collectif à la Pol Pot d’élus de tous poils car dans la montée du populisme fasciste il y a toujours eu des boucs-émissaires à exterminer! La France est devenue un pays de la défiance permanente irraisonnée, de l’insulte banalisée, de l’approximation érigée en vérités, des peurs irraisonnées, des comportements politiciens immoraux… Un vrai terreau de qualité pour ce Front national que l’on condamne mais que l’on fait prospérer par des commentaires constituant autant de bombes à retardement !

Cet article a 12 commentaires

  1. Patrick Roulleau

    J’en partage le fond d’analyse….. mais cela prouve bien que les gens sont dans la difficulté et que notre pays perd de sa superbe dans de nombreux domaines ou le déclin est tangible depuis ce début du XXI siècle les valeurs nationalistes surgissent comme de vieux reflexes d’autonomies…..alors l’Europe d’après….. la guerre 1945 à des relents d’autodestruction parce que…… Utopique ou rêves envolés…….

  2. vinz

    …c’est bien pour cela que Facebook n’a pour moi aucun intérêt… Ceci dit, les réseaux sociaux dans leur ensemble sont gangrénés par des paroles et idées populistes voire fascistes depuis de nombreuses années. Je ne suis pas d’accord avec toi car on retrouve sur internet, non pas l’opinion dominante, mais bien le déversoir de toutes les idées les plus nauséabondes. Quant aux chaînes d’infos permanentes qui cherchent à remplir le vide, elles ramassent dans le caniveau de quoi remplir leur grille de programmes…
    Sur le fond par contre, je te trouve bien magnanime avec notre nouveau ministre de l’économie. Sa nomination est un symbole fort du virage néo-libéral pris par l’exécutif. Certes, il ne s’est pas encore exprimé, mais avec le message fort donné par Valls hier au Medef, on peut avoir les pires craintes notamment pour le detricotage du droit du travail (35 heures, travail du dimanche, cdi…). Et n’attendons pas qu’il le fasse pour dire après « mince, on l’a pas vu venir… » C’est pour cela que j’admire le courage de G. Filoche qui reste au PS et qui vitupère contre cette nouvelle politique qu’applique Hollande et qui ne figurait pas du tout dans son programme de candidat.

    PS (ah,ah): Puisque tu dois rencontrer aujourd’hui les candidats socialistes aux sénatoriales, pourras-tu leur demander de ma part quel sera leur vote le jour où ils devront voter pour le travail du dimanche, pour la fin des 35 heures… Je ne suis pas un grand électeur, mais leur réponse m’intéresse…

  3. Bernard Gilleron

    Pour une fois je n’aime pas du tout ce billet ou le peuple est rabaissé au rang de gamins riant des coups de bâtons sur les gendarmes en l’occurrence le « banquriste » des finances,Valls, et Hollande. Ce déchainement de colères a toujours eu lieu lorsque des groupes étaient dirigés par de mauvais maitres ou de mauvais seigneurs, le jacqueries se déclenchaient. La jacquerie se déclenche sur Facebook et c’est une chance pour les socialiste qu’elle n’aille pas plus dans la rue.
    L’État est aux mains de menteurs et de larbins du patronat: le peuple français a le souvenir de la lutte de classes, mais ne le dit que par Facebook, la faute aux endormeurs du FDG (PCF en tête) et des Syndicats (CFDT, CFTC, UNSA, CGC, avec un coup de main accessoire de LePaon)

  4. Denis Chandon

    Un pays qui va bien se moque des discussions de comptoir
    Un pays qui va mal se nourrit des ragots, il faut bien retourner la vindicte sur quelqu un. Il n y a qu a voir la reaction de certaines personnes ayant à priori un sens politique superieur au citoyen lambda puisqu ils sont ou proche ou a l interieur de l appareil. C est d une navrante pauvreté! Maintenant il faut quand meme avoir l honneteté de reconnaitre que quelque soient les qualités de notre Président, le costume est trop grand pour lui et qu en plus, au nom de la sacro sainte liberté de parole beaucoup au PS parlent à tord et à travers alors qu ils seraient plus urgent pour eux de la fermer…..!
    Mon commentaire vaut pour une Droite nullisime aujourd hui
    La somme de ces errements donne FN plus absention!

  5. Torquemada

    De tous temps se moquer des puissants a été un exutoire pour les dominés Le pain , les jeux sont les outils de gestion des masses . Dans les dictatures la critique est combattue , dans les démocraties elle est tolérée et même institutionnalisée ; c’est le fusible , la soupape de sécurité. Guignol a une fonction sociale , un dés-amorceur de la colère et des rancœurs .
    De tous temps l’opinion a été manipulée . Ainsi la doctrine libérale ,chère à certains ,a recours à tout un panel de mesures pour imposer ses principes . La surconsommation érigée en mode de vie a été initiée en quelques décennies et la société en a fait son principal moteur de croissance .
    Et gare à ceux qui osent remettre en cause le bien fondé de ce système absurde qui table sur une croissance infinie dans un monde dont les ressources ne sont pas infinies .Ceux la sont ringardisés et combattus sur la scène médiatique .
    Ce .n’est pas le cas du FN qui se garde bien de dénoncer l’absurdité de l’économie consumériste . Aussi le meilleur accueil lui est il réservé par les médias et sa trés relative progression au regard de l’abstentionnisme est le fruit d’une promotion savamment orchestrée par la sphère politico- médiatique . Les peurs et les rejets qui sont des outils puissants de manipulation , sont mis en avant car ils fédèrent l’opinion et éclipsent toute autre réflexion sur le monde et le sens à donner aux sociétés humaines au regard des défis qui attendent l’humanité .Si elle veut profiter le plus longtemps possible des conditions de vie que des équilibres naturels ont permis , la civilisation humaine doit penser global et s’organiser .Mais remettre en question la course au profit n’est pas dans l’air du temps et les lanceurs d’alerte sont marginalisés . La différence de traitement médiatique réservée à Mr Mélenchon , Mr Dupont Aignan , et Mme Le Pen est révélatrice de la volonté libérale à faire perdurer une politique qui n’a pour but que d’enrichir toujours plus une minorité dominante au détriment d’un nombre croissant de dominés.
    Outre l’absurdité et la dangerosité des dérégulations engendrées par un système libéral axé sur la consommation , celui ci contient en son sein ,son principal paradoxe qui est la non re-distribution des richesses . Pas d’argent , pas de consommation . L’économie est à l’image d’une fontaine dont le jet serait capté avant de retourner dans le bassin et dont on s’étonnerait de la pénurie d’eau .

  6. Vent d'Est

    Bonjour Monsieur Darmian,

    Je lis toujours avec intérêt vos billets justement parce qu’ils ne tiennent pas en quelques lignes (facebook) ou pire encore, en quelques signes (Twitter). Ils sont un espace au contraire dans lequel pensée et réflexion peuvent s’épanouir. À l’inverse votre billet d’aujourd’hui que j’ai pris le temps de lire plusieurs fois sans toutefois être certain d’en avoir vraiment saisi le sens, pour une fois me laisse perplexe. Je le ressens comme un coup de gueule légitime lancé par une personne que l’on aurait entravé à l’aide d’une camisole et qui se débat dans tous les sens, consciente de l’état de déliquescence de ce qui l’entoure et désespérant de ne pas être entendu.

    Si c’est le cas je vous comprends. La chute est dure pour tous ceux qui ont mis leurs espoirs et qui ont même œuvré avec leurs moyens et leurs diversité pour un changement vers plus de Liberté, d’Égalité et de Fraternité. Des citoyens y ont cru ou essayé d’y croire une fois encore en soutenant le candidat, Président actuel. D’autres se sont engagés pour le camp d’en face, les plus désabusés ont exprimé leur rancoeur en rejoignant le camp de la haine et de l’exclusion. Enfin un bon nombre s’est abstenu. Cette tendance s’est d’ailleurs amplifiée quelques mois plus tard seulement lors des élections qui ont suivi la présidentielle.

    Moins qu’un théâtre de Guignol, sorte de catharsis populaire permettant aux exploités de transcender leur souffrance et d’échapper au désespoir, la pièce jouée par certains hommes politiques actuels puisque c’est ce qui nous concerne et l’avenir qu’ils nous préparent, relève davantage d’un scénario nauséabond dans lequel règnent en maîtres mensonges et trahisons. Un bal abject de faux-culs qui à l’inverse de Guignol ne s’attaquent pas aux puissants pour défendre les plus faibles mais claquent des talons et jouent des coups de menton pour essayer de reprendre l’autorité qu’ils ont perdu tant leurs compromissions et renoncements les ont et continuent de les déconsidérer. La rage est forte qui va finir par se transformer en haine contre ceux qui n’ont même pas fait semblant de tenter de changer le cours des choses. Le sentiment d’être dupé, une fois de plus, est très fort chez ceux qui croyaient encore dans les valeurs de la République. Comment s’étonner de la méfiance, de la défiance de toute annonce venant de la part de ces acteurs frelatés.

    Hélas, les commentaires Facebook les plus désagréables, les twits les plus outranciers se sont révélés en de ça de l’image donnée par le jeu des responsables politiques de premier plan, tout comme la réalité dépasse la fiction ; c’est ce que l’on dit en pareil cas, n’est-ce pas ?

    Ce n’est pas Facebook ou Twitter qui a imposé à M . VALLS, cette pantomime obscène devant le MEDEF et les patrons qui lui offrent en retour une « standing ovation » (ce qui ne veut d’ailleurs rien dire car elle se pratique aujourd’hui pour un oui ou pour un non). M. VALLS a réouvert aujourd’hui son compte Twitter qu’il avait fermé le jour même de la victoire de 2012. Il a pris soin bien entendu d’effacer tous les messages postés pendant la campagne. Il faut dire qu’ils faisaient un peu tâche avec ses prises de position récentes ou actuelles.

    À J+1 de la mise en place du second gouvernement VALLS, le ministre de l’économie relance le débat sur ce qui reste des 35 heures. Le premier ministre est obligé de rectifier. La machine à couacs est relancée !

    Je ne sais pas si M. VALLS aura beaucoup de « Like » de la part des patrons mais ce dont je suis certain c’est que ce clone de Blair et de Thatcher, c’est dire s’il est moderne, va surtout en désespérer plus d’un, dans ce qui devrait être son camp.

    Vers qui vont-ils se tourner ? Dans ce climat de défaite des idéaux humanistes, M. HOLLANDE et M. VALLS, ainsi que tous les moutons qui les suivent, par opportunisme ou par manque de courage, pire par manque de lucidité porteront la lourde responsabilité d’avoir enterré le socialisme et une certaine idée de la République, quasiment un siècle jour pour jour après l’assassinat de JAURÈS.

    Il y a de quoi se débattre effectivement, comme lorsque l’air vient à manquer, emmêlé dans ses draps lors d’un terrible cauchemar…

    Cordialement et avec mes salutations respectueuses.

    Vent d’Est

  7. Francis Bouchard

    On prend les cartes on mélange les cartes,, on prend les cartes on remélange les cartes,, c’est tjrs le même jeu

  8. Gérald Elbaze

    Vaut le coup d’être lu … rien que pour le bonheur de redécouvrir le mot « atrabilaire » 😉
    Blague à part.. Attention … Les réseaux sociaux sont pour paraphraser Stiegler reprenant lui même le Phèdre de Platon un pharmakon: un poison ou un remède… Ce qui compte c’est comment on l’administre… La thérapeutique en somme… Pharmakon qui en grec signifie également le bouc émissaire. Ce que semble vérifier certains commentaires sur le site… 😉

  9. Fabienne Jouvet

    Moi je veux bien être Guignol, tu sais celui qui tient le bâton….car y’en aurait quelques un à distribuer……

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