Une vraie réforme profonde et simplificatrice des minimas sociaux

Lorsque la Cour des Comptes vient contrôler une collectivité territoriale ou un service public elle a déjà une idée directrice. Elle s’installe et ne pouvant tout examiner elle se contente de scruter certains secteurs des compétences mises en œuvre. Ainsi elle établit des rapports nationaux thématiques à partir des remontées des examens thématiques sur un panel défini nationalement. C’est ainsi qu’en Gironde le Conseil général a été « auditionné » sur la politique des aires des gens du voyage et l’Aide personnalisée à l’Autonomie des Personnes âgées. En fait la Cour venait chercher des éléments lui permettant de mettre en cause les choix politiques effectués localement ou nationalement. Et dans cet état d’esprit les allocations individuelles de solidarité sont depuis des années dans le collimateur de la Cour. La synthèse de ce qui relève d’un principe républicains vient de sortir et comme sur bien d’autre sujets dépendant de choix politiques la CDC se montre particulièrement critique.
Les minimas sociaux ont un coût non négligeable pour la société sans être réellement efficaces, estime la Cour des comptes, dans un référé. Entre 2008 et 2014, cette dépense a progressé de 43% en euros courants pour s’établir à 24,8 milliards d’euros (1,16% du PIB contre 0,87% en 2008). Une hausse de la dépense qui s’explique surtout par la croissance du nombre d’allocataires. A titre d’exemple, il a crû de 35% pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). En Gironde les allocations RSA versées par la Caisse d’Allocations familiales a augmenté entre décembre 2014 et décembre 2015 de 9 % ! Le vrai problème c’est que la Cour se contente de constater mais qu’elle ne fait aucune analyse des causes de cette croissance le jour où on annonce une forte hausse du chômage.
Pourtant, les minimas sociaux « ne permettent pas  aux  allocataires de  sortir de  la  situation  de  pauvreté », même s’ils réduisent le taux de pauvreté de 7,8 points, soulignent les juges. En outre, le taux de sortie des allocations au profit d’une insertion sur le marché de l’emploi est  » extrêmement faible »,  avec un taux compris entre 2 et 4%, selon les allocations. A l’inefficacité du système actuel, s’ajoute le manque d’équité, selon la Cour. « D’un  dispositif  à  l’autre,  la  variabilité  des  ressources  prises  en  compte  pour liquider les droits des allocataires, des montants garantis et des conditions de majoration des allocations  en  fonction  des  configurations  familiales,  aboutit  à  une  forte  dispersion  des montants moyens versés « , explique-t-elle. Résultat : le dispositif manque de cohérence et de lisibilité, « qui nuit à son efficacité ». Le jugement est sans appel sur un revenu mis en place en 2009 (qui était au pouvoir?) et que personne n’ose véritablement réformer en profondeur.
L’idée du Revenu de solidarité active (RSA) est née d’un triple constat ; Les dispositifs d’insertion sont devenus de plus en plus complexes et fonctionnent de plus en plus sur des logiques de cloisonnement, source d’exclusion. Le 17 janvier 2008, , le Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté indique ainsi que si certains résultats des politiques d’insertion menées depuis vingt ans « ne doivent pas être oubliés, ni niés », les mesures prises avec de « louables intentions », mises bout à bout, ont abouti à produire « un système de relégation » où « nous avons finalement eu à la fois le chômage et la pauvreté au travail, l’exclusion et la précarité ». La CDC fait dans le fond exactement le même constat près de 8 ans plus tard ! Pour le salarié, les gains obtenus lors de la reprise d’un emploi sont annulés par la diminution des prestations sociales qui lui étaient attribuées lorsqu’il était sans emploi.
En mars 2008 dans un rapport il était déjà précisé que cette logique – qui est notamment celle du revenu minimum d’insertion (RMI), de l’allocation parent isolé (API) et de l’allocation adulte handicapé (AAH) – n’est pas adaptée à la reprise d’un emploi et engendre, du fait des effets de seuil, des trappes à inactivité. C’est sans appel car on a depuis accentué cet écart. Il faudrait comme le suggère la Cour des Comptes une vraie réforme générale pour aller vers une simplification profonde du système.
D’abord on doit absolument regrouper comme le prône la Cour des Comptes tous les minimas sociaux autour de trois grandes allocations : le RSA dont l’objet serait clairement le soutien au revenu et l’incitation à l’insertion sociale et professionnelle », l’allocation adulte handicapé (AAH) « qui resterait une allocation  de  soutien au  revenu  intégrant  la  prise en compte des difficultés spécifiques liées au handicap » et enfin l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) « qui  résulte elle-même d’une unification des dispositifs  du minimum  vieillesse et qui n’appelle pas d’autre réforme que celle de certains paramètres de sa gestion ». Mais il y a fort à parier que l’on en restera là et que l’on ne touchera qu’à la marge un système de solidarité qui pour être plus juste, plus efficace, plus utile devrait être revu en profondeur. Un choc de simplification entre les organismes instructeurs, les organismes verseurs, les organismes assurant le suivi serait une telle révolutions culturelle

Cet article a 3 commentaires

  1. Fabienne Sartori

    Le revenu de base (ou revenu minimum de vie) pour tous. Refonte complète des aides existantes. Suppression d’une administration coûteuse qui vit de la misère et a un droit de regard sur la vie privée des autres. Il faut une proposition véritablement nouvelle et généreuse pour le XXIème siècle.

  2. Chez.xyz

    Oui, entre les organismes instructeurs, les organismes verseurs, les organismes assurant, cela fait quand même au moins trois emplois pour un dossier de pauvre à gérer.
    Si l’on réunit ces organismes en un seul, cela risque d’augmenter gravement le nombre de pauvres..

  3. faconjf

    bonsoir,
    c’est vrai c’est très compliqué de s’y retrouver dans qui paie quoi et à qui. D’autant plus que les sommes sont considérables et sont loin de produire l’effet escompté. Ainsi les bénéficiaires du RSA activité doivent en permanence avoir l’œil rivé sur les décomptes fournis par la CAF et les revenus de leur activité. Le naufrage peut très vite survenir du fait de la suppression des indemnités après une augmentation temporaire des revenus d’activité. Les impayés sont souvent décuplés par l’action des banksters qui pénalisent très sévèrement quelques euros de découvert. Le système se complique encore du fait de la prise en compte des revenus à N-2 pour les aides au logement. On chercherait à plomber les pauvres que l’on ne s’y prendrait pas autrement. Complexité + manque de transparence concourent à rendre le système inefficace voire même nocif aux bénéficiaires. Réformer oui c’est nécessaire mais il faut éviter à tous prix les usines à gaz bureaucratiques. Il faut un système simple, souple, réactif et transparent pour les bénéficiaires et les décideurs.
    Le retour à l’emploi qui devait se situer au cœur du dispositif s’est vite retrouvé en extrême périphérie et le RSA est devenu un simple amortisseur social.
    Et que dire du magot de la formation professionnelle …

    Salutations républicaines

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