L'ESPRIT DE FAMILLE

Mon, 19 Sep 2005 00:00:00 +0000

D'après les affirmations  » devilepinesques « , évidemment largement relayées par les médias, il règne aux journées parlementaires UMP une  » ambiance familiale « . Cette affirmation lénifiante recouvre sûrement des réalités différentes dès que l'on entre dans la réalité de la maisonnée.

En effet, on sait qu'en matière de famille, il ne faut jamais se fier aux apparences. Les familles ressemblent aux icebergs : leur partie visible resplendissante s'appuie sur celle immergée, infiniment plus impressionnante. Ce n'est pas pour rien que l'on parle d'ailleurs, très souvent, de secrets lorsque l'on ne veut pas évoquer des périodes plus ou moins avouables dans le cours de la vie de ces groupes constitués. Il faut bien reconnaître, et toutes les observations sociologiques le prouvent, la vie est loin d'être un fleuve tranquille dans les familles nombreuses. Et celle des parlementaires UMP peut se targuer d'être l'une des plus fournies de l'histoire. Les rancunes, les chamailleries, les ambitions sont au moins aussi nombreuses que celles qu’on rencontre dans l'immeuble d'en face.

AU NOM DU DIEU GAULLE

Vous y trouvez les ancêtres, chenus, courbés par le fardeau des ans, bardés de titres gagnés au combat, pouvant se réclamer de  » Dieu Gaulle « . En général (sic), les plus jeunes leur portent des pantoufles estampillées du logo du Sénat où ils prennent une retraite méritée. De temps à autre, on leur demande d'évoquer leurs souvenirs, de donner une onction historique, de bénir une union, ou de soutenir un prétendant au pouvoir? Il faut bien avouer qu'ils se raréfient. Heureusement, car ces briscards se plaignent souvent de leur sort, rabâchent des principes surannés et ressassent que  » de leur temps?ça ne se serait pas passé comme ça ! « . Ils ont eu la joie, ce week-end, de voir arriver Raffarin qui aura bien du mal à leur expliquer comment il a pu jouer du rock et couvrir de louanges un certain Giscard dit d'Estaing, qui n'eut jamais une vénération exagérée pour  » Dieu Gaulle « . Tant pis, on saluera son retour à l'hospice en se plaisant à faire remarquer que, là au moins, il ne causera plus de dégâts. De Villepin les connaît bien, ces  » vieux de la vieille « , car avec papa, il leur rendait visite le temps d'un thé discret dans une ville paisible de province ou un hôtel ministériel douillet. Le problème pour lui, c'est qu'ils aiment bien aussi le  » Roquet de Neuilly «  qu'ils ont vu légèrement grandir depuis son entrée fracassante chez les jeunes gaullistes boutonneux. Mais le feu follet les agace, car il bouge dans tous les sens, et à leur âge, ils aspirent à davantage de sérénité. Entre l'élégance apprise au Quai d'Orsay, et la rudesse des commissariats, ils auront vite fait leur choix. Il n'est pas sûr que la témérité du Roquet soit faite pour leur déplaire.

PESER SUR LES GRANDES FAMILLES

On sait aussi que la consanguinité longtemps pratiquée pour protéger les héritages finit par pesersur les grandes familles. Sûrement qu'au cours de ces journées au bord du lac, on retrouvera des déclarations jugées idiotes de quelques  » fils à papa « . Nul ne pourra mettre leur bévue sur le compte d'un coup de trop puisque Evian n'est pas réputé pour engendrer l'ivresse. Un haussement d'épaules suffira, puis on les écoutera poliment. On les suivra peu, même s'ils se veulent les porte-parole officiels de celui qui se dit encore le chef.
 » Ambiance familiale «  vous dit-il. Celle du moment où l'on s'espionne pour savoir à qui reviendra l'héritage.  » Volpone « , sorti du Val de Grâce, regarde d'un ?il, le ballet de ses prétendants. Il jauge les arabesques et évalue les crocs en jambe. Il lui manque encore le  » fils maudit  » parti aux Amériques faire oublier ses incartades commises au nom de la solidarité familiale. Il guette donc seul, derrière les carreaux des fenêtres de l'Elysée, les réactions des uns et des autres. Il s'amuse, c'est sûr, en voyant les impatients pariant que son testament ne sera jamais exécuté et se livrer trop vite. Ils clament que le  » papé  » est foutu politiquement, qu'il ne choisira personne et laissera le conseil de famille décider. Moyennant une retraite sûre. Il apprécie, en connaisseur, les prudents qui ne se précipitent pas aux repas pouvant engager leur avenir. Ceux là n'ignorent pas que la valeur peut attendre le nombre des années? Les cousins germains ne viennent-ils pas de démontrer qu'il ne fallait pas se partager la peau d'un ours, fut-il de Berlin, avant la sortie des urnes ? Alors, en cachette ou dans les salons feutrés des hôtels d'Evian ayant abrité des négociations autrement historiques, la famille chuchote et suppute sur la santé du  » Papé « . On est certain qu'il aura un sursaut d'orgueil.
DILAPIDER LE TRESOR
L'ambiance sera, de toutes manières, on vous le garantit, aux amabilités. A la fin des repas, ceux qui veulent réussir assureront les présents qu'ils pensent beaucoup à eux, que sans eux, sans leur soutien rien n'est possible, qu'ils les aiment et les respectent. Ils les mettront en garde contre le danger potentiel de dilapider le trésor qu'ils ont « entre leurs mains  » Le seul moyen de le protéger de l'appétit de la gauche, affirmeront-ils, c'est de m'accorder votre confiance « . Le patrimoine familial dépend de leur loyauté, de leur sens de l'intérêt général. «  Je vous ai compris  » assurera l'un en répétant la fameuse devise de la famille. «  Je vous comprendrai  » affirmera l'autre en promettant des lendemains qui chanteront la victoire. Tous deux auront les yeux rivés sur les travées. Malheur à celui ou celle (rares) qui n'applaudira pas. Le ban de la famille l'attend. Mieux on l'enverra en maison de redressement chez Bayrou s'il fait sa mauvaise tête. Là, il apprendra à dire beaucoup de mal de ses proches tout en les assurant que c'est pour leur bien mais pour sa part d'héritage promise en 2007, il se brossera ! On vous l'assure, il règne  » une ambiance familiale  » à Evian. Celle du jeu des «  deux familles « ,
beaucoup plus facile à pratiquer, il est vrai, que celui des  » cinq familles «  que viennent d'inventer les socialistes. La règle essentielle de la partie repose sur le principe  » je t'aime, moi non plus « , caractérisant toute la vie politique française?Pour gagner il faut être contre quelqu'un et sûrement pas pour un idéal ou un programme.

L'essentiel c'est que le bon peuple le voit et le croit.
Mais je déblogue…

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