MON TONTON A MOI

Sat, 22 Jul 2006 00:17:00 +0000
 

Ce matin, il y a dix ans que François Mitterrand a quitté ce monde. Ecrire sur lui, c'est tout bonnement suicidaire, car la particularité essentielle de cet exercice réside dans l'extraordinaire complexité du personnage. C'est encore plus suicidaire car, comme tous les hommes publics qui comptent, il suscite des passions contraires allant de la haine viscérale à l'idolâtrie coupable. La « mitterrandolâtrie  » me condamne ipso facto à la vendicte populaire ou à une suspicion de ralliement intéressé. Tant pis, je l’assume. 
C'est à partir du moment où rien ne dérange dans une vie qu'il faut se méfier de l'image qu'on en donne. Pour ma part, je n'ai jamais adulé François Mitterrand dont les conceptions de la politique ne correspondaient pas à ce que j'avais vécu et appris dans le sillage du PSU. Michel Rocard correspondait davantage à la démarche initiatique qui avait été la mienne. Elle était entrée en moi, et je n'ai jamais pu véritablement m'en détacher, d'autant qu'elle s'est renforcée au fil des ans grâce à la lecture attentive des écrits de Pierre Mendés France.
J'ai donc été un adepte modéré, car j'avais été échaudé, dès mon arrivée au PS (76), par une exclusion d'un an pour non respect des décisions fédérales correspondant aux élections municipales créonnaises. L'intégrité, la clarté, la sincérité, la liberté, n'étaient pas des vertus cardinales à mettre en avant. Je l'ai payé d'une première désillusion.

LES IDEES NOUVELLES ALLAIENT GERMER
J'ai pourtant loyalement participé à la campagne électorale de 1981, sans aucun état d'âme, en me démenant nuit et jour, avec  le sentiment que des idées nouvelles allaient enfin germer, avec l'accord du Peuple. Je me revois encore, au milieu de la nuit du 9 mai, me lever, me déguiser en monte-en-l'air, pour aller coller, sur l'affichoir du Créon Ciné, une caricature de Giscard, dépositaire des diamants de Bokassa.
Je conserve quelque part en moi le bonheur immense du champagne bu pour fêter son élection, chez Roger Caumont, mon maître, comme moi hérétique réconcilié avec la discipline du parti. Sincèrement, elle m'a procuré l'une des toutes premières joies profondes d'un militantisme exubérant, mais convaincu de son utilité. Faire élire quelqu'un en qui l'on croit appartient à la plus merveilleuse des tâches politiques. Le voir l'emporter accorde la plus superbe des récompenses : l'espoir !
Je m'étais battu, pied à pied, pour un instant tenant du miracle. Oui, je l'avoue, j'avais été peu regardant sur tout ce qu'il y avait eu avant. D'autant qu'en 74, je m'étais autant battu dans le bataillons de harkis rocardiens arrivés avec armes et bagages (avant d'être virés du PSU), et je n’avais rencontré que l'échec. Je m'étais fait laminer par ses troupes, lors du Congrès historique de Metz, en 1977, au cours duquel il avait fallu être solide pour ne pas sombrer. Les cicatrices pansées, je m'étais fait une raison, car en politique il faut admettre la défaite pour ne jamais être en contradiction avec ses principes.
J'ai cru en lui, non pas par dévotion intéressée, mais tout simplement parce qu'un printemps venait de se lever. J'ai toujours continué, malgré cela, à être méfiant, mais quand on fait de la politique il faut savoir que rien n'est pire que le renoncement, la fuite, ou la trahison. La déception enrichit. Le repli sur soi affaiblit. J'ai donc mon droit d'inventaire, dont je suis fier, en ce jour anniversaire de sa mort. Je sais que chacun aura sa vision du personnage, mais il faut analyser ma réaction en comparaison.

MES REPERES SUR TONTON
Je vous propose donc mes repères sur Tonton. Ils sont discutables, et vont faire fulminer, bondir, hurler, détourner de mon blog quelques un(e)s d'entre vous, mais je les assume. A vous de juger :
La plus belle journée de Mitterrand : le 21 mai 1981 lors de son passage au Panthéon
La pire journée de Mittterand : le 1° mai 1993, jour du suicide de Bérégovoy
La plus belle mesure de Mitterrand : l'abolition de la peine de mort
La pire mesure de Mitterrand : l'instauration de la proportionnelle aux élections de 86, qui favorisa l'émergence du FN
Mon meilleur souvenir sur l'arrivée de Mitterrand : les larmes de Mendés-France lors de la cérémonie à l'Elysée
Ma plus belle image de Mitterrand : la cérémonie à Douaumont avec Helmut Kohl
Ma plus belle phrase de Mitterrand :  » Laissez le tyrannie régner sur un mètre carré, elle gagnera bientôt la surface de la terre « .
Ma phrase détestable de Mitterrand :  » La démocratie, c’est aussi le droit institutionnel de dire des bêtises. 
Le lieu symbolique de Mitterrand que je préfère : Le bois de chênes de Latché
Le lieu mitterrandien que je déteste : La Roche de Solutré
La femme mitterrandiste que j'admire le plus : Danielle Mitterrand
La femme mitterrandiste que je respecte le moins : Edith Cresson
L'homme de Mitterrand que j’admire le plus : Robert Badinter
L'homme de Mitterrand que je respecte le moins : Roland Dumas
La passion de Mitterrand que j'aime le plus : les mots
La passion de Mitterrand que j'aime le moins : le goût du pouvoir à tout prix
L'événement phare de la période Mitterrand : la chute du mur de Berlin
Le pire événement de la période Mitterrand : l'affaire du Rainbow Warrior
La qualité de Mitterrand que je voudrais avoir : le courage face à la maladie
Le défaut de Mitterrand qui me révulse : le mensonge institutionnel
Le reproche que je formule à l'égard de Mitterrand : son cynisme dans l'utilisation des autres
L'admiration que j'ai pour Mitterrand : sa résistance aux échecs
La force essentielle de Mitterrand : sa capacité à gérer le temps
La faiblesse irrémédiable de Mitterrand : sa haine de Michel Rocard
Je sais, ce petit jeu est subjectif, incomplet, inutile, mais sincère et désintéressé. A vous d'en juger?
Mais je déblogue?
Chronique du 10 janvier 2006

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