Le calice jusqu'à la lie

La grêle a violemment touché, il y a une semaine, le Créonnais. Ce fléau climatique, qui aurait pu être artificiellement contré si le système d’alerte agricole avait parfaitement fonctionné, intervient au pire moment. Outre les dégâts souvent ponctuels causés aux habitations il ajoute au désarroi actuel du monde viticole.

La crise touche désormais les producteurs de toute les filières, puisque le lait s’effondre, la forêt est en piteux état et que le marché du vin ne décolle pas. Il se murmure que, pour avoir un minimum de trésorerie, certaines exploitants, pourtant connus pour leur bonne santé financière antérieure, céderaient des bouteilles de Bordeaux à 1,15 euro ! Ce niveau est tellement bas que le marché ne tiendra pas longtemps sur ce qu’il faut bien identifier comme une vente à perte.
Dans le contexte actuel le seul espoir reste en effet de… vendre, puisque la demande est tellement faible qu’aucune offre ne parvient dans les chais. Même le secteur de la distribution directe aux particuliers patine puisque les commandes qui arrivent sont inférieures en quantité. Cet état de fait mériterait un autre intérêt que celui que lui témoigne actuellement le gouvernement, dont le seul souci est de taper sur le vin…à travers des textes répressifs, dont l’impact réel sur l’amélioration de la santé n’a jamais été démontré (le cancer après un verre de vin!)

En fait, la seule filière qui aura été soutenue via le plan de relance aura été celle de l’automobile, dont on pourrait comparer le poids économique réel à celui de la filière viticole, tant à l’exportation que pour les emplois qu’elle représente.

Ces faits sont révélateurs d’un système social qui privilégie la production industrielle, pourtant facilement délocalisable plutôt que celle, traditionnelle, ancrée sur des territoires déterminés. Il est vrai que l’une est concentrée, visible, organisée, capitalisée, alors que l’autre est éparpillée, diffuse, individualisée, endettée, et qu’en terme de présence médiatique, il n’y a pas photo : on abandonne les uns aux mains du Crédit Agricole et on aide les autres avec des crédits à fonds perdus (Arcelor Mittal à Gandrange!)

Les grêlons ont, dans une partie du Bordelais, totalement détruit les derniers espoirs de redressement de nombre d’exploitations, qui ont perdu de 30 à 100 % de leur récoltes potentielles. Des traitements coûteux urgents s’imposent pour cicatriser les plaies et protéger ce qu’il reste de végétation, un travail extrêmement délicat à programmer et une espérance de réussite très réduite. Toute autre activité que celle de la viticulture, touchée sur plus de 15 000 ha, aurait depuis très longtemps obtenu un soutien de l’Etat… car l’effet de masse aurait joué en sa faveur. Il faut bien constater que les filières agricoles ne dépendent que de la puissance des lobbies qui les représentent… Or celui du vin, écartelé entre les organismes professionnels, les organismes syndicaux, et les spécificités régionales, ne pèse pas nationalement. Il se fait régulièrement tailler en pièces par l’Europe et les lobbies adverses, faute de solidarité réelle autour de ses préoccupations. Les filières agro-alimentaires n’ont que des crises épisodiques qui les décrédibilisent puiqu’elles n’existent pas le reste du temps.

Dans le contexte actuel, il serait peut-être bon de se souvenir d’un vieil adage : « le malheur des uns fait souvent le bonheur des autres ». Ce ne sont pas les banquiers qui vous diront le contraire. Quant aux assureurs il se frottent les mains en constatant que bien des exploitations après la dernièr grêle et els aides aux assurances données par le Conseil général durant 5 ans ont abandonnés leurs contrats. Ouf ! Ils ont eu chaud !
En attendant, les élus locaux du Créonnais qui n’ont pas besoin de voyages touristico-politiques organisés pour connaître les réalités de leur territoire, se retrouveront, à mon initiative, ce vendredi 22 mai à 18 h 30 dans la salle citoyenne de l’Hôtel de ville de Créon. Ils tenteront de ne pas être les « exploitants » d’une situation désespérée, mais bel et bien des « soutiens concrets » à une filière en péril ! Ils essaieront d’être solidaires ce qui ne sera pas déjà inutile !

Cette publication a un commentaire

  1. Annie PIETRI

    Il faut avoir vécu cette tempête de grêle pour comprendre l’ampleur du désastre que viennent de vivre les viticulteurs bordelais! Bien sûr, ce n’est pas de Paris et des Palais de la République,que les politiques qui nous gouvernent peuvent y comprendre quelque chose : on en a eu la preuve cet après midi au cours de la séance des questions au gouvernement et de la réponse apportée par le ministre à la question des élus bordelais sur ce sujet….En
    gros,on les renvoie à leurs assurances et à l’indemnisation des calamités agricoles dont la grêle fait partie…..
    Et débrouillez-vous ! Heureusement qu’il y a des élus de terrain pour se pencher sur le problème et tenter de trouver des solutions. Ou au moins apporter un réconfort aux victimes !

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