Attention, service non compris !

Le gouvernement table sur les «services à la personne » pour relancer un tant soit peu l’emploi qui va s’effondrer début 2010, en raison de l’insuffisance des investissements des collectivités (voir article antérieur). On dissimule sous des flots de Grippe H1N1 une triste réalité qui, passée la période semi-euphorique des fêtes, deviendra beaucoup plus délicate à cacher. La réouverture, hier, des restos du cœur, avec une affluence inédite de milliers de gens sous le seuil de pauvreté, donne le ton des mois de janvier et février. L’Eldorado supposé des « services à la personne » (APA, aide ménagère, aide familiale…) va également devenir un désert financier, et poser des problèmes graves, à la fois à celles et ceux qui ont pris l’habitude d’en avoir, et à ceux qui attendent un soutien régulier. Qui va payer ? Comment va-t-on pérenniser des emplois sans aucune sécurité sur leur financement ? Qui viendra en renfort des Conseils généraux qui ploient sous les obligations sociales que leur transfère un Etat qui n’a plus rien de protecteur ?

En Gironde, au 31 octobre, le Conseil Général avait engagé 114,4 millions d’euros pour l’APA (contre 88,4 à la même date en 2008) ; 120,6 millions d’euros pour le RMI-RSA (contre 112,2 à la même date en 2008) ; 25 millions pour la prestation compensatoire du Handicap (contre 14,4 millions en 2008). Et ce, sans les compensations attendues de l’Etat qui n’a plus un fifrelin à mettre sur ses engagements, ou qui les décale sans cesse dans le temps  ! Tous les écrits et les grandes déclarations, du genre  » Monsieur de Sévigné rentrant de la cour et tentant d’évangéliser le bon peuple des croyants », ne changeront rien à la réalité

Réuni à Lyon  en forum, le réseau des associations d’aide à domicile en milieu rural (ADMR), qui ne relève pas de l’association de dangereux gauchistes, a donc tiré la sonnette d’alarme sur ses moyens de financement….
Alors que le secteur s’est fortement professionnalisé (souvent à la demande des conseils généraux, soucieux de la qualité du service) sous l’impulsion des pouvoirs publics, la tarification ne prend pas toujours en compte les coûts de revient des services, et cela malgré les règles fixées par la loi du 2 janvier 2002 et du décret «tarifaire» du 22 octobre 2003. L’ADMR observe notamment des écarts importants : la prise en charge horaire varie entre 16,80 et 23 euros selon les départements, ce qui constitue une injustice criante à l’égard du principe d’égalité d’accès aux services républicains.  La perte de la TP et le manque criant de péréquation des richesses entre les ressources, par exemple, de l’EPAD de la Défense et du  département de la Creuse ou de la Haute Loire, va accentuer ces différences, inadmissibles dans le cadre de l’application d’une loi de la République!

Elle constate également que les plans d’aide personnalisée à l’autonomie ont tendance à multiplier le fractionnement des interventions à la demi heure, voire au quart d’heure, ce qui empêche la reconnaissance «de la compétence des personnels et les temps de déplacements à leurs coûts réels.»
«Cette inquiétude s’inscrit dans le contexte budgétaire très tendu des conseils généraux et sur l’absence de lisibilité quant aux ressources dont ceux-ci disposeront après la réforme de la taxe professionnelle» affirme l’ADMR. Mais c’est mentir ou exagérer quand ce constat est fait par un élu socialiste, et c’est incomplet quand il émane d’une association pourtant sérieuse et crédible. Heureusement que l’ADMR n’est pas réputée pour son engagement partisan, car « Monseigneur » Lefevre de l’UMP aurait crié au scandale médiatique. Dommage cependant que ce type de constat reste inconnu des médias dominants… et qu’en Gironde, on se contente de l’écume de la vie sociale et politique, sans entrer dans le fond des débats.

Aujourd’hui, les dépenses publiques et privées pour accompagner les personnes en perte d’autonomie s’élèvent à 19 milliards d’euros, dont les deux tiers sont couverts par l’assurance maladie. Près de cinq milliards correspondent à l’allocation personnalisée d’autonomie. Un million de personnes bénéficient de cette dernière.  En 2015, le dispositif concernera 1,3 millions de personnes… Qui va payer ?  Devinez.

Cette publication a un commentaire

  1. vinz

    Le constat de l’ADMR est édifiant. C’est aussi ce que vivent l’ensemble des structures associatives ou publiques de l’aide à domicile. On a voulu professionnaliser un secteur d’activité qui fonctionnait jusqu’alors dans une logique de petits boulots mal rémunérés (souvent au noir), sur des temps partiels subis et sans réelle formation des intervenants. Cette professionnalisation a été positive puuisqu’elle a permis à ce secteur de sortir de cette logique de précarisation.
    La création de l’APA, puis la loi de janvier 2002, puis la loi sur le handicap ont accompagné cette évolution en obligeant les Conseils Généraux à financer davantage les structures qui développaient des emplois de qualité. Aujourd’hui, c’est toute cette politique de professionnalisation des métiers de l’aide à domicile qui est remise en cause par la suppression de la TP et l’éclatement des moyens financiers des Conseils Généraux.
    C’est un véritable recul en arrière et ce sont les personnes dépendantes qui feront en premier lieu les frais de tout cela.
    Si gouverner c’est prévoir, on peut réellement avoir des doutes sur les capacités de nos actuels gouvernants à anticiper les conséquences de mesures purement idéologiques et issus de calculs bassement politiciens.

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