Le soleil, le vent et l'amer Grenelle

Photo d'archives/REUTERS/Jean-Paul Pélissier
Je l’ai écrit dans de très nombreuses chroniques, les fameuses négociations dites de Grenelle, comme toutes celles qui les ont précédées dans le domaine social ne sont que de la poudre aux yeux médiatique. Elles ont permis de cautionner, durant quelques mois, une politique de réformes, ayant mis le pays dans un marécage institutionnel, qui conduira tôt ou tard à un plan d’austérité au moins aussi drastique que celui des Grecs. Tout sera fait dans les prochaines semaines, pour profiter de l’apathie actuelle du corps social et pour détourner l’attention : burqa, retraites, sommets internationaux, voyages de noces diplomatiques, exploitation sécuritaire des moindres événements malheureux, banlieues, et qui sait, coupe du monde de football. Borloo a tiré un trait sur tous les engagements du Grenelle, car ils touchent toujours un secteur « protégé » de l’activité économique ! Et dans un système non régulé de l’activité, on trouve toujours des chantages à l’emploi, à la concurrence, à la rentabilité…pour tricher sur l’avenir. Les accords de Grenelle sont donc totalement faux, et les députés ne vont examiner qu’une coquille vide de sens, mais remplie de textes réglementaires, qui pèseront surtout sur les collectivités locales. Fin de la taxe carbone, fin de la taxe à l’essieu, instauration de taxes sur les matériels ferroviaires, absence de mesures sur les transports alternatifs (vélo notamment), capitulation sur le principe « pollueur-payeur » en matière de déchets. Chaque jour, une reculade. Chaque semaine, un renoncement. Le grenelle accouchera d’une souris, qui ne sera même pas verte !
Les lobbies industriels ou commerciaux, les filières en place, les syndicats professionnels, ont fait bonne figure autour des tables pour ensuite, dans les couloirs du parlement, rameuter leurs soutiens traditionnels. Le gouvernement a coulé le photovoltaïque qui, malgré ses défauts, dans une période difficile, pouvait amorcer une prise de conscience collective des possibilités accrues offertes par le solaire. C’est quasiment fini.
Le projet de 600 m² de concession de ses toitures par la commune de Créon est aux orties, car les entreprises volontaires se sont retirées à cause de la baisse du prix du Kwh et de sa réactualisation annuelle, divisée par trois !
La production photovoltaïque mondiale s’élevait en 2007 à 12 400 MW, 3 800 MW supérieure à celle de 2006. La production double tous les deux ans depuis 2002. L’Allemagne demeure la championne en terme d’installations sur son territoire. Du côté des fabricants, les trois premières positions sont occupées par Sharp (Japon), Q-Cells (Allemagne) et Suntech (Chine)… la France n’existe même pas !
Désormais, les 5 premiers pays producteurs de photovoltaïque sont le Japon, la Chine, l’Allemagne, Taiwan et les États-Unis.  La Chine affiche une progression spectaculaire : après avoir doublé l’Allemagne l’année dernière, elle se retrouve à la première place mondiale en 2008. De 1% de part de marché en 2003, le pays en représente aujourd’hui 18%. Malgré cette performance, ses habitants n’en profitent pas : le photovoltaïque demeure inaccessible pour la majeure partie de la population, et 90% de la production chinoise est destinée à l’exportation. Les installations photovoltaïques en Allemagne doivent produire 4.134 GWh ou 0.83% de la consommation totale d’électricité en 2008; l’énergie éolienne doit produire 41.143 GWh ou 8.26% de la consommation. Ce pays est le troisième fabricant de cellules photovoltaïques (après la Chine et le Japon) avec 20% du marché. Le secteur employait en 2008 environ 60.000 personnes, pour la plupart à l’Est de l’Allemagne, pour un chiffre d’affaires d’environ 7 milliards d’euros. La filière compte environ 15.000 entreprises dont des leaders sont Q-Cells, le premier fabricant de cellules solaires de la planète, SolarWorld ou SMA Solar.  L’industrie allemande de l’énergie solaire a réalisé un chiffre d’affaires de 7 milliards d’euros en 2008 . Environ 46 % de la production est destinée à l’étranger. Le secteur emploie actuellement 70.000 personnes outre-Rhin. Ce chiffre pourrait monter à 200.000 en 2020, selon les industriels du secteur. En France, on donne des primes, des subventions, des remises d’impôts, des prêts à taux zéro et finalement on détruit, pour épargner Edf enlisée dans la filière nucléaire les équilibres qui suffisaient ailleurs au développement d’une filière qui ne demandait rien à personne. Est-ce parce que la France n’a pas travaillé sur les panneaux en amont, et qu’il faut les importer que l’on asphyxie le photovoltaïque ? Où sont les bonnes résolutions du Grenelle ? Même déclin pour l’éolien et mêmes conséquences. Borloo reste silencieux et fait du vent !
France énergie éolienne, qui représente la branche éolienne du Syndicat des Energies Renouvelables, est particulièrement préoccupée par les conséquences que pourrait avoir le vote des amendements issus de la Mission d’information commune sur l’énergie éolienne présidée par Patrick Ollier :
un seuil minimal de 15 MW et de 5 mâts en Zone de Développement de l’éolien, appliqué aux unités de production dont la demande est déposée après la publication de la future loi Grenelle II. Une interdiction de création de nouvelles Zones de Développement Eolien (ZDE) en dehors des schémas régionaux de l’éolien et, après le 31 décembre 2011, un moratoire sur les ZDE en l’absence de publication d’un schéma régional. Un classement en régime d’autorisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement, pour les éoliennes terrestres de plus de 50 mètres, au plus tard un an après la publication de la future loi Grenelle II. Sachez que si ces propositions ne sont pas mises en échec lors de la discussion en séance publique qui s’engage mardi prochain, puis en commission mixte paritaire Sénat-Assemblée, je pense que le nouveau régime donnera un coup de frein brutal au développement de l’éolien, clé de voûte des engagements français en terme d’énergies renouvelables.
C’est le troisième changement de régime d’implantation que connaît la filière éolienne en l’espace de sept ans. Il cumule exclusion par principe, superposition de zonage et conditions d’implantation inutiles, en disproportion manifeste par rapport aux impacts environnementaux et paysagers des parcs. Les dispositifs législatifs et réglementaires existants encadrent déjà fortement l’implantation et l’exploitation des parcs éoliens : implantation au sein des ZDE, mise en conformité des documents d’urbanisme, autorisation de construire après étude d’impact et d’incidence, enquête publique, application pendant l’exploitation de la police du bruit et de la sécurité publique…  La filière éolienne française représentait en 2009 l’équivalent de 10.000 emplois directs et indirects, en forte croissance depuis plusieurs années. Avec un marché de 25.000 MW, de nouvelles unités de construction de mâts, de pales et autres composants d’éoliennes pourront s’implanter. En 2020, l’énergie éolienne sera en mesure d’employer 60.000 personnes… dont celles de l’ex-usine Ford de Blanquefort qui attendent une décision d’un repreneur allemand. Il doit être méfiant, très méfiant quand il voit comment sont traitées les alternatives énergétiques en France. C’est sûr que venir y fabriquer des pales d’éoliennes ne paraît pas évident. Mais on y pensera sûrement parmi les députés UMP qui vont voter les amendements Ollier !

Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    Et l’on massacre évdemment l’éolien dans les infos également. NOus eûmes droit aux infos de l’A2 vendredi soir, il me semble à une interviouve d’un député UMP franchement hostile à l’éolien. Motif : le désordre qui régnerait dans les projets d’aménagement du territoire, ou quelque fadaise de la même eau.
    Et bien sûr la sempiternelle tarte à la crème du voisin (à 2 km environ…) qui ne supporte ni la vue ni le bruit.
    C’était peut-être dans « Envoyé Spécial » que l’on a eu les points de vue les plus objectifs : avantage, inconvénients et magouilleurs de toute sorte qui font leur beurre sur la naïveté des bonnes gens. Et encore une fois, il nous faut l »Editorial de JMD pour avoir une vue réelle de la

  2. J.J.

    …encore une fois le coup est parti trop vite…
    Il faudra mettre une sécurité sur cet espace « Commentaires ».

    Et encore une fois, il nous faut l « Editorial » de JMD pour se faire une opinion objective et avoir une vue réelle de la situation, permettant de comprendre pourquoi on « fusille « les énergies dites vertes.

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