Les Bleus inanimés ont-ils une âme?

A l’Elysée, on croise les doigts : pourvu que l’équipe de France de football ne gagne pas demain soir. Il faudrait alors revoir toute la communication présidentielle. En effet, les bleus sont au plus bas dans les sondages. Ils ont une telle image avant leur match couperet face au Mexique que Nicolas Sarkozy apparait avec ses 37 % comme une vedette adulée par les foules. Il suffirait que les troupes de Domenech, hétéroclites dans leur motivation perdent, pour qu’ils tombent dans les oubliettes et fassent du Président de ce qu’il reste comme République, un héros du courage politique. Le choix d’annoncer par anticipation les orientations de la réforme des retraites relève du pur calcul de communication. Demain, les journaux seront tentés de mettre le boisseau sur ce qui fait mal, pour consacrer leur une au sujet qui compte : Gourcuff sera-t-il titulaire ou remplaçant ? Et, dès samedi matin, tous les salariés commenteront le résultat d’un match de millionnaires indignes de la confiance d’un pays (au fait combien d’entre eux payent réellement des impôts ? Combien en payent en France ?…) qui n’a plus pour eux les yeux de Chimène. Il est vrai que les « bannis » potentiels font le maximum pour se faire haïr. Ils cumulent indifférence, arrogance et suffisance : les trois péchés mignons de la vedette qui ne mérite pas son statut. En cela, ils ressemblent assez au gouvernants actuels, mais ils y rajoutent une pointe de mépris pour leurs supporteurs, qui accentue la rupture. C’est le « plus » des Bleus qui a en partie disparu (en raison des résultats) chez Nicolas Sarkozy ! Lui, au moins est devenu, en public, plus méfiant.
Les mécréants de la balle ronde ont à leur tête celui qui symbolise à merveille ce comportement agacé par des personnes pouvant discuter ce qu’il croit être son pouvoir divin. Raymond Domenech fait le maximum pour conforter son impopularité, en se payant ouvertement des journalistes et une opinion publique, obligés d’écouter ses balivernes, ses provocations et son humour caustique. Le coach se sachant condamné souhaite couler avec le navire. Autour de lui, c’est à la fois la désolation et le silence coupable… en tentant de se persuader qu’il a encore, sous l’influence d’un orgueil meurtri, la possibilité de gagner au poker sur une ou deux donnes. Domenech a décidé de mourir debout, sous les quolibets et les critiques, drapé dans sa dignité, persuadé que ses « réformes possibles » sont des trouvailles uniques pour combattre la crise ! Il tente de naviguer à vue au milieu des querelles intestines, des complots générationnels, des clans rivaux, en faisant semblant de maîtriser ce qu’il ne maîtrise absolument pas ! Parfois, certains se demandent si ce gars là ne se dope pas à l’adversité et s’il n’a pas besoin d’exister en s’attirant l’inimitié générale. La France, peuplée de sélectionneurs de comptoirs de bistrots n’aime pas la provocation. Et elle est servie ! Dans le fond, rien n’arrêtera le « chef d’équipe », tellement il a une haute idée de lui-même.
A l’intérieur de son groupe, c’est aussi catastrophique. Gallas ressemble à un « bioman » en panne. Mollet droit, mollet gauche, intestin…réparé de partout, utilisateur intensif des kinés, le capitaine limogé a choisi l’isolement. Lui aussi a choisi le mépris des faibles, en refusant tout contact avec l’extérieur. Il est vrai que les autres ne font guère plus d’efforts. Ils sont allés, de blanc vêtus, en pénitence, passer une demi-heure dans un township. Terrible contraste entre cette troupe venue d’ailleurs, entourée de flics, évitant les flaques et loin de ses frasques. Ils n’avaient pas que l’air d’être contraints aux travaux forcés, mais se sont comportés comme des collégiens consignés au pensionnat, et que les surveillants conduisent en sortie obligatoire. Quel écart entre le regard des gamins et celui d’un Evra perdu dans le vague. On avançait par petits groupes. Les « anciens » ont décidé que le « nouveau » était susceptible de leur voler une part de leur notoriété ressemblant à une rente de situation. Gourcuff qui sait lire, écrire et compter, qui joue avec sincérité, qui respecte les consignes, même si elles lui paraissent absurdes, ne leur convient pas, et ils l’ont nettement signifié à celui qui prétend être le décideur. Cette France des querelles internes, des mises à l’écart, des promotions claniques, commence à devenir détestée. Elle sent les privilèges, les égos surdimensionnés, les combines d’appareils, et donc forcément elle est détestée… mais, enfermés dans une sorte de bulle aseptisée, les Bleus ne se rendent même pas compte de cette triste réalité. Ils s’enfoncent dans leurs certitudes, persuadés qu’il suffira d’un coup d’éclat pour que la popularité revienne. Le pire c’est qu’ils n’ont pas tort. Ils ont voulu, avec cet orgueil mal placé, faire, par exemple, payer à Rama Yade ses propos impudents sur leur confort matériel ! Avant la visite dans le township, Eric Abidal avait expliqué que la présence de Rama Yade ne réjouissait guère ses coéquipiers. « Je sais qu’elle y va, avant ou après nous. Donc qu’elle y soit ou pas, c’est pareil. On n’y va pas dans le but de voir Rama Yade, on va voir des enfants, le maire, un entraîneur, ça va nous permettre de nous enrichir sur la culture du pays », avait-il expliqué. Devant les journalistes, Abidal était revenu sur les déclarations de Mme Yade, qui voulait que « l’équipe de France nous éblouisse par ses résultats plutôt que par le clinquant des hôtels ».
« On en a déjà parlé entre nous, a-t-il commenté. On a fait remonter des infos jusqu’à Rama Yade. De l’extérieur, il y a des choses qui viennent pourrir le groupe, on essaye d’en faire abstraction ». « Le message qu’on a fait remonter disait simplement que le groupe n’était pas content, on voulait qu’elle le sache », avait ajouté le défenseur central. Superbe ! Sauf que les Français ont tranché entre la fierté blessée des uns et la maladresse plutôt sympathique de l’autre. La secrétaire d’Etat aux Sports, pointe en deuxième position du baromètre des personnalités politiques dans la foulée de ses reproches sur le « clinquant » de l’hôtel de l’équipe de France de football. Selon le baromètre Ifop-Paris Match publié mercredi, 70% des Français ont une bonne opinion de Rama Yade, taux en hausse de trois points dans un contexte de baisse générale de la popularité des personnalités politiques. Sa ministre de tutelle, Roselyne Bachelot, qui a cru clore la polémique, a perdu deux points de popularité à 42%… Les Bleus ont 80 % d’opinions défavorables. Quand je vous dis que le Chef de l’État français a tout intérêt à ce que les Bleus mangent leur sombrero ce soir !

Cet article a 2 commentaires

  1. quinquin

    Hors football, je crois le contraire notre (leur ) gouvernenemnt espère une qualification pour les huitièmes de finale : Cela fera un peu moins de monde dans la rue le 20 juin contre cette réforme abjecte des retraites…Je fatigue de cette brochettes d’incapables. Ayant connu en tant qu’acteur (avec un rôle minime de lycéen aux grandes colères de mon père Gaulliste ) mai 68…je donnerais tout avant que la grande faucheuse ne passe..connaître encore cela..D’un mouvement lycéen (Goupil ) qui s’est étendu aux étudiants ( Cohn-Bendit, Geismar, et bien d’autres…la colère men fait oublier les noms ! ) 11 millions de travailleurs se sont mis en grève…la grève de l’ennui, de l’exploitation, de la révolte contre une société stéréotypée…Là ce serait dire non à un dictature « soft »….
    A++++

  2. Annie PIETRI

    A la mi-temps, les bleus inanimés m’ont bien l’air d’être toujours sans âme!
    C’est Sarkozy qui va être content : pas besoin de revoir sa communication, sa cote de popularité ne souffrira pas de celle des bleus….
    Et Domenech a jugé bon de nous priver de Gourcuff, le seul qui était agréable à regarder….Au point où on en est, il vaut mieux en sourire pour ne pas en pleurer !

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