La France… claques, clans, peurs

Durant presqu’une vingtaine d’années, j’ai cotoyé le monde du football professionnel. Même si je n’ai jamais eu l’immense privilège de vivre une Coupe du Monde de l’intérieur, j’ai suivi pour le moins attentivement les épreuves de … à 98, et toutes les épreuves intermédiaires. Je sais, ça fait vieux con qui ramène un brin de science mais je ne peux pas m’empêcher de vous proposer une analyse du comportement de ces Bleus qui font tache dans le paysage déjà désastreux de la France sarkozyste. Inutile d’écrire qu’elle risque d’être véritablement différente de celle que vous entendrez sur les médias bien-pensants, mais comme je l’assume, je suis prêt à me couvrir de ridicule. Il faut revenir sur l’épopée de 98 pour comprendre ce qui s’est passé en Afrique du Sud. La France de cette époque reste celle des conquérants, de ceux qui ont tout à prouver. Aucun d’entre eux, à part Zinedine Zidane, n’a la stature internationale et ne peut espérer rejoindre un très grand club. Ils n’auront, pour beaucoup d’entre eux, une ouverture vers le pactole qu’après leur victoire. Et encore, beaucoup se contenteront de brefs passages dans le monde des « saigneurs » du ballon rond, celui où on tente de tirer le maximum de sa notoriété plus que de ses performances. D’ailleurs, l’épopée suivante va tourner au fiasco, puisque personne n’a plus rien à gagner, et que des querelles intestines éclatent au sein du groupe. Les germes du passage du statut de « conquérant » à celui d’héritier « s’amorce ». Chaque saison en voit partir pour des lieux cléments sur le plan de la fiscalité, et surtout très éloignés des réalités françaises. Les égos enflent au même rythme que les comptes en banque, enterrant cet esprit de conquête qu’avait miraculeusement ramené la dernière participation à la Coupe du Monde, marquée par l’échec en finale. L’évolution sociologique française n’avait pas franchi le seuil des vestiaires, bien que quelques signes soient apparus, mais sans véritablement perturber la solidarité du groupe.
Pour cette édition, la France réelle est entrée chez les Bleus, et elle a joué un rôle déterminant dans ce qui a paru étonner des médias superficiels et se contentant de vivre sur les effets, sans jamais chercher les causes. En fait, Raymond Domenech n’a jamais pu réguler la vie interne d’une équipe traversée par plusieurs maux irrécupérables. La France de 82, 86, 98 ou 2006 était encore un brin laïque, c’est à dire à l’image de la France. Que n’a-t-on pas entendu sur cette formation « Blacks, blancs, beurs » solidaire et homogène… qui avait rendu le pays fier de sa tolérance et de son unité ? En 2006, on a également eu le sentiment d’expier, grâce au même phénomène, en plus atténué, la déception de 2002. Cette année, les esprits avaient totalement changé : la France du « communautarisme valorisé » a pourri l’ambiance interne chez les Bleus. On va beaucoup parler de « clans ». Je préfèrerais que l’on évoque des communautés au sens actuel de ce terme. Durant des mois, ils se sont constitués, avec des variantes, sur les thèmes « Blacks », « Blancs », «  Beurs » que Domenech, son staff et la Fédération, incapables de tailler dans le vif, ont tenté de gérer par des artifices divers.
Il y a même des sous-communautés avec par exemple Gallas, Evra, Anelka ,le trio pivot des « Anglais » sûrs d’eux et installés dans la certitude que, sans eux, les Bleus ne sont qu’une formation de second ordre. Ils ont pesé depuis des mois sur l’ambiance, et ce sont les raisons qui ont parfois conduit Domenech à les dissocier, et à tenter de les isoler. Il a eu des différents aussi musclés que ceux de la semaine dernière, avec au moins trois d’entre eux : Anelka n’a pas fait autrement que ce qui s’est produit antérieurement.
La qualification dont on oublie qu’elle avait été miraculeusement acquise (et même injustement acquise), a vite cristallisé la communauté qui a toujours imposé sa loi aux autres. Domenech s’est tiré une balle dans le pied en faisant confiance à Gallas, mais c’était ça où le trio restant se mettait en veille. Benzema, Ben Arfa et Nasri ont payé cash la prééminence de ces barons anglais, constituant le vrai contre pouvoir. Refusant de trancher dans le vif, Domenech a subi, et n’a jamais dominé la situation, d’autant que Ribery et Henry ont rejoint après leurs déboires respectifs ce groupe d’intérêts partagés. Tout s’est compliqué avec une communauté des DOM-TOM, différente de celle ayant ses racines en Afrique… et d’autres liées à la religion où à l’origine sociale. A partir du moment où on a toléré ces déviances communautaristes, plus rien n’est maîtrisable et la société française va prendre la même direction. La notion idiote, débile, d’identité nationale, n’a rien arrangé ! La preuve : les porteurs du maillot bleu ont fait la preuve par l’absurde de l’inutilité de ce débat qu’ils ont simplement transformé en guerre des communautés. Elle a fait rage, terrorisant une partie du groupe, peu habitué à un tel contexte. Au fait, vous y avez cru à l’élongation de Carrasso ?
Une autre erreur a résidé dans une sélection basée sur des noms et pas sur des performances. Rien ne justifiait les présences d’Henry, de Gallas et de Ribery qui, au cours des derniers mois, n’avaient pas fait preuve d’une activité très brillante. Blessés ou délaissés, ils n’avaient participé à aucun rendez-vous de haut niveau, et rien ne garantissait que trois matches amicaux leur redonnerait une forme qu’ils n’avaient plus. Le trio, complété par Anelka (plus ou moins titulaire à Chelsea), restaient les figures de proue des contrats… publicitaires. Il faut rappeler que tous les films ont été tournés bien avant la publication de la liste des sélectionnés.
Qu’auraient dit les sponsors, si ces « vedettes » avaient été remplacées en Afrique du sud par des Nasri, Ben Arfa ou Benzema… qui sont peu porteurs ? Les autres n’ont signé aucun accord digne de ce nom. Les enjeux financiers étaient considérables, et justifiaient pleinement la présence de ces stars de la pub. Benzéma, qui avait été jugé comme « partant pour le Mondial » avait, à un degré moindre té « sélectionné» par anticipation par les annonceurs. Il n’y a eu que cette belle gueule de Gourcuff pour « voler » une part du gâteau… Ça ne vous dit rien ? Çà ne vous explique rien ? Le huis clos a accentué les clivages… Durant les stages, tout était acceptable, car Domenech pouvait jouer sur les « essais », sur les « absences », sur les joueurs « émergents »… (comme Valbuena et Gignac), ce qui n’a pas été possible dans un groupe figé après qu’il y ait eu durant quelques jours un semblant de concurrence.
Les larmes qu’auraient vues Bachelot étaient soit celles de naïfs invétérés, soit celles des crocodiles. Dans quelques heures, on ne parlera que de trahisons, de rivalités, d’impunités accordées aux uns et refusées aux autres, d’interdits occultes, de fric, mais surtout pas de jeu. En fait, tout le monde cherchera des responsables, faute de pouvoir aborder de front le vrai problème : cette équipe représente tout autant la France actuelle que celle de 98 était censée le faire. Une France éclatée, balkanisée, déstructurée, individualiste, arrogante et plus encore tricheuse. Les Blacks contre les Blancs sans les Beurs : c’est la nouvelle vision en Bleu !

Cet article a 3 commentaires

  1. marie-claire

    Eh oui, Hélas! Tout cela était prévisible!
    C’est juste très dommage pour les jeunes comme Gourcuff, Loris, Valbuena….. qui faisait leur première coupe du monde et qui se sont retrouvés en otage (par les soi-disanT « cadres ») dans ce panier de crabes!

  2. gilles baillet

    Le foot c’est du cinéma. L’opium des peuples.Que le pays se regarde en face… Au moins un point positif: on ne nous a pas joué la fable de l’unité nationale derrière l’équipe… La lutte des classes doit revenir au premier plan et casser le communautarisme… On se fait plumer sur les retraites sans se battre: c’est ça le scandale… Dans ces conditions, je ne vois pas pourquoi il faudrait faire l’union nationale autour de la bande qui nous gouverne.
    Cordialement

  3. quinquin

    Ancien footeux de haut niveau ( D1 et par la suite D4…à l’époque de clubs à 18 et de ses formidables barrages pour la monter ou pour éviter la descente, je crois que je n’ai jamis vu un tel désastre et poutant à mon époque la France ne brillait guère ! l’irrespect vis çà vis de son entraîneur ( ah ! oui ! maintenant on dit » Coach » ) est inexcusable..Quant à Raymond la science, il n’est que le fusible d’une fédération d’incompétents, avec à sa tête Escalettes. Les Ribéry, Gallas,Anelka et compagnie ne doivent plus l’honneur de porter le maillot bleu floqué du Coq…Allez « Basta »..On passe à autre chose !
    A++++

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