La semaine décisive pour la crédibilité du socialisme européen

Il faut avoir à l’esprit ce qui se passera dans un an si la gauche emporte les échéances électorales nationales. Dans toutes les strates de la société française en difficulté, les propos sont les mêmes : telle ou telle réforme mise en place par l’ultra Droite libérale devra être détruite et remplacée. Les fameux 100 jours pour tout bouleverser se profilent comme « LA » solution à tous les maux du sarkozisme, et personne n’ose affirmer que ce ne sera pas de cette façon que la gauche pourra agir. Dix ans de noyautage UMP de tous les rouages de l’État, la mise en place dans l’appareil d’État d’une culture libérale outrancière, le fait que tout aura été fait pour satisfaire le maximum de revendications par des effets d’annonce démagogiques, des caisses vides et plombées par une dette abyssale, des engagements européens contraignants, l’épée de Damoclès des agences de notation qui se retiennent actuellement, mais qui bondiront dès qu’un ministre de gauche s’installera à Bercy, la destruction du concept même des choix politiques dans la gestion économique : la liste des handicaps est telle que, forcément, il y aura en 100 jours une véritable désillusion. Comment éviter ces pièges tendus par la solidarité souterraine du libéralisme ?
La crédibilité de la gauche passera par sa capacité à surmonter, dans les 100 jours, tous ces éléments, car la pire illusion serait de penser que la « mondialisation financière » acceptera facilement de laisser filer un pays comme la France. Le FMI aux mains de Madame Lagarde pourra enfin mettre un « grand » à l’épreuve, puisqu’il ne peut pas s’attaquer de front aux États-Unis. Malgré le risque de sa situation de justiciable potentielle, il faut absolument qu’elle s’installe dans le fauteuil de DSK, afin de maîtriser toutes les réactions défavorables qui pourraient intervenir sur la situation réelle de son pays d’origine, avant les présidentielles. Dans un an, il en ira tout autrement… et il y a fort à parier que la vérité sera tout autre, puisque le FMI n’admettra jamais un desserrement quelconque de l‘étreinte de la financiarisation de la vie sociale. La Grèce n’est qu’un domino de cette crise mondiale de la dette publique qui ravage actuellement la planète. Il est le premier qui tombe, car les fameux « marchés » ne font plus confiance à sa capacité à juguler son déficit. Il n’y a donc plus que des États plus ou moins endettés qui peuvent sauver le système, en payant pour elle des emprunts à des taux quasiment usuraires.
Le « politique » peut tout tenter, il n’arrive pas à faire rentrer des fonds, car c’est là le véritable problème sur lequel la Gauche butera. Les socialistes grecs doivent assumer une contradiction dévastatrice : réduire massivement les dépenses ne suffira jamais à résoudre les problèmes, si les recettes ne s’améliorent pas. Plus on appauvrit le pays, plus on le paupérise, et moins on a d’espoir de récolter des taxes, des impôts, des contributions ! En fait, le gouvernement grec se retrouve dans la situation des sapeurs-pompiers qui savent que leurs ressources en eau se réduisent, et qui tentent de pratiquer la part du feu pour éteindre l’incendie. Tous les regards seront donc tournés vers le parlement grec, qui devient une caserne de soldats du feu assiégée par le feu ! Le gouvernement a fait part de sa « totale confiance » dans le fait que le Parlement adoptera mercredi et jeudi prochains le nouveau plan d’austérité dont l’UE fait dépendre la poursuite du sauvetage du pays. « Nous sommes totalement confiants » sur les résultats des votes mercredi du plan cadre pluri-annuel et jeudi de la loi d’application, a déclaré à l’AFP le porte-parole du gouvernement, Ilias Mosialos. « Il s’agit de votes extrêmement cruciaux, nous croyons que les députés de la majorité assumeront leurs responsabilités », a-t-il ajouté, alors que la grogne qui montait au sein des 155 parlementaires socialistes (sur 300) a été jugulée par un remaniement, suivi d’un vote de confiance, mardi dernier… On peut y croire, mais ce vote ressemble à un hara-kiri collectif, puisqu’il y aura un décalage considérable entre cette prise de position et le sentiment d’un peuple, persuadé qu’on l’a tout simplement trahi. Les premiers coupables seront ceux de la proximité et pas ceux cachés derrière le diktat des… marchés ! D’ailleurs, leurs représentants (cette Droite grecque qui a flirté avec le régime des Colonels) n’entretiennent pas l’ambiguïté : ils ne voteront pas, malgré les pressions européennes (sincères ou factices ?), les mesures qui sont imposées par une situation à laquelle ils ont contribué.
« Nous devons franchir cette première étape pour nous diriger vers la prochaine », soit « la possibilité de négocier » sur le deuxième plan de sauvetage, a affirmé le ministre des finances, appelant l’opposition de droite, qui a indiqué qu’elle voterait contre le plan en dépit d’asphyxiantes pressions européennes, à épauler cette fois le gouvernement.
Il s’est inscrit en faux contre l’idée, qui se répand en Grèce, que l’UE n’a pas d’autre choix que de sauver le pays pour sauver l’euro, en cas de refus grec de durcir son régime sec. Les socialistes grecs devront donc assumer seuls les décisions exigées par le sauvetage des marchés financiers. Rien d’autre. Il est à craindre que quelques-uns aient des états d’âme… au moment de soutenir « leur » gouvernement. Et le lien sera vite fait : ils seront responsables de la faillite d’un système qu’idéologiquement ils auraient dû condamner au moment des décisions européennes. Mais c’est une autre histoire… que leur Ministre résume d’une étrange façon : »Le Dieu de la Grèce est grand » . Que vient faire Dieu dans cette affaire ? Surtout chez les socialistes !

Cet article a 6 commentaires

  1. Pado

    Bonjour;

    Je ne vois qu’une seule solution à TOUT cela: la Révolution!
    Dans le calme et le sang-froid…
    Prendre le temps d’expliquer que cette construction du Monde ne l’a été QUE par la volonté/le pouvoir de quelques-uns, et à leur seul profit, et ce en dépit de toute « Raison »: non, le Temps n’est pas (que) de l’Argent, sauf à être le Sang de la Bête! 😀

    Amicalement

  2. Garnier

    Chez les socialistes pourtant je n’en connais qu’un qui tienne a peu près ce discours contre l’économie privatisée, c’est Arnauld Montebourg. Ses deux livres plaident pour détricoter la financiarisation de l’économie pendant que les autres veulent l’habiller. Nous ne nous en sortirons pas comme ça. Il faudra plus de 100 jours pour y arriver et surtout pour faire comprendre qu’il faut changer de monde. Moi j’y crois, mais je suis un peu isolé.

  3. J.J.

    Pado dit : « « Je ne vois qu’une seule solution à TOUT cela: la Révolution!
    Dans le calme et le sang-froid… » »

    On le souhaite de tout cœur, certes, mais quand le peuple en arrive à se révolter (et on ne le laisse pas faire, voir l’actualité), ça finit forcément toujours par la violence et le drame.

    Et les historiens « bien-pensants » sont toujours prêts à ramener sur le tapis les massacres de septembre, la guillotine et la terreur qui sont évidemment d’horribles moments de notre histoire.
    Mais les mêmes passent volontiers sous silence les terreurs blanches et l’oppression des peuples par des tyrans primesautiers ou sanguinaires, pendant des siècles. Le résultat pour le peuple fut à peu près le même.

    On nous ressert les regrettables massacres de septembre, les prêtres réfractaires soit disant martyres etc, etc..

    Mais on oublie d’évoquer la persécution et le véritable génocide des protestants dans toute la France en général et dans les Cévennes en particulier, un exemple entre autres parmi une multitude.

    Il faudrait un grande REVOLUTION mais qu’elle soit MONDIALE !

  4. Sylbain BAHLIA

    1. Sur une banderole, en Grèce, on lisait « Nous ne devons rien, nous ne paierons rien » Quel parti socialiste, vraiment socialiste, fera sien cette phrase ? Pas ceux de Grèce, du Portugal ou d’Espagne, qui appliquent la politique du FMI et de l’Union européenne…
    2. La révolution ? Elle ne se décrète pas. Mais elle viendra. Peut-être leur imposera-t-elle cette fois une autre politique, une rupture ? Mitterrand avait joué là-dessus en 1981, pour faire le contraire dès 82-83 avec Delors…
    3. JJ a peur de la violence ? Mais c’est cette crise capitaliste qui est violente, et l’on veut faire payer aux peuples une dette qui n’est pas la leur !
    4. Ce qui fait peur, c’est le consensus des partis institutionnels sur la “nécessaire réduction des déficits” prônée tant par le gouvernement Sarkozy que par le Parti Socialiste. On nous mène à la catastrophe. En France, trois grandes confédérations syndicales n’ont-elles pas pris le même chemin que les confédérations syndicales espagnoles qui ont signé un “pacte social” accompagnant la politique anti-sociale du gouvernement, lequel vient d’être désavouée dans les urnes? Cette orientation politique quitte le terrain des revendications pour rejoindre “la nécessaire réduction des déficits publics” …
    5. N’est-il pas temps de sortir de ces politiques qui nous mènent au pire, alors que partout les travailleurs montrent qu’ils sont mobilisés pour défendre leurs acquis sociaux, qu’il suffirait d’accepter de s’appuyer sur eux? N’est-il pas temps de construire le parti réellement socialiste qui fera ce qu’il dit dans son programme : qui rompra avec l’UE et le FMI ? Car il ne suffit pas de dénoncer.

  5. J.J.

    Tout ça est bien joli, mais pour avancer, il faut avoir le fric, et le fric ce ne sont pas les partisans d’un socialisme qui le possédent et le contrôlent.

    Arrivés au pouvoir, ils sont bien obligés de passer sous les fourches « Claudines », (comme disait un orateur fantaisiste), des possédants.

    « Point d’argent, point de suisse,
    Et ma pore était close…. »

    Et si par hasard quelqu’un qui se dit « de gauche  » est un nanti, qui pourrait mettre son pouvoir au service de ses idéaux (peut-être que ça existe ? ), on lui reprochera d’être un nanti et de ne pas savoir ce dont il parle…

  6. Pado

    « Tout ça est bien joli, mais pour avancer, il faut avoir le fric »…

    Ah! L’Argent!!
    Je crois que c’est là la plus grande imposture de la fin du XXème Siècle! Déjà, « avant », ce n’était pas triste, mais nous atteignons les sommets de l’absurdité la plus totale!
    Il est pourtant évident, ou cela le devient, que ce sont les banquiers/financiers qui ont pris les rênes de l’orientation de ce système fondamentalement absurde qu’est le Capitalisme, et le dirige pour le seul intérêt de… d’eux-mêmes!!
    Que penser d’entendre que la Grèce – oui, la Grèce!! – est à vendre???
    Et personne ne trouve cela « fou »?
    L’Argent DOIT-il servir à cela??

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