La démocratie déracinée par le vent mauvais magyar

Il y a maintenant plus de 7 ans que j’entretiens aussi fidèlement que possible quotidiennement ce blog et celui qui l’avait précédé (l’Autre quotidien). Le problème, c’est qu’après plus de 2 000 chroniques différentes je ne me souviens plus toujours de ce que j’ai pu écrire et qui aurait été démenti par les faits. Récemment sur ma page du site Le Post.fr un commentaire anonyme laconique m’a refroidi puisqu’il se condensait en deux mots méprisant : « pigiste censeur »… et d’après moi, il émanait d’une « professionnel courageux ! ». C’est exact compte tenu du contexte actuel. Je n’ai plus donc en mémoire ce que j’ai pu écrire sur l’évolution des pays de l’Europe de l’Est et donc je cours le risque de devenir un pigiste radoteur.
Je suis toujours de ceux qui pensaient que le passage de régimes « communistes » oppresseurs, mais socialement faussement protecteurs, au système ultra libéral du marché encore plus « oppresseurs » et socialement encore plus faussement protecteurs aurait des conséquences terribles à terme. D’autant qu’il existait dans certains de ces pays (Pologne, Hongrie, Roumanie, Slovaquie…) des relents extrêmement forts d’extrême droite fasciste revancharde. Le pire aura été, pour les ôter de l’orbite réputée soviétique, de précipiter leur entrée dans l’Europe des marchands sans remise à niveau sociale !
Le culte du veau d’or a vite pris le dessus sur toutes les autres considérations, et lentement ces pays ont été rattrapés par leurs vieux démons : racisme exacerbé en Roumanie ; intégrisme religieux en Pologne ; un parfum de peste brune en Slovaquie et maintenant une constitution d’une autre époque en Hongrie. La nouvelle Constitution – aux accents très nationalistes – est entrée en vigueur le jour de l’an nouveau. Élaborée par et pour le premier ministre hongrois Viktor Orban, elle instaure des réformes très controversées de la banque centrale, de la justice et de la loi électorale, et ce en dépit des critiques internationales. L’appellation « République de Hongrie » y disparaît au profit de la seule « Hongrie », et une référence explicite à la religion – « Dieu bénisse les Hongrois » – y est désormais inscrite… Apparemment, ces décisions très inquiétantes n’ont pas motivé de réactions épouvantées de Élysée (ou pourtant le pays n’est pas…inconnu !) ou du Ministre des Affaires étrangères à Bordeaux, pourtant si sourcilleux sur le sort d’autres contrées lointaines.
A Budapest, ville martyrisée par les chars soviétiques et donc forcément motivée pour faire vivre une autre forme de démocratie, réapparaissent les nostalgiques du régent Horty qui a mené avant-guerre une politique autoritaire. Le « Royaume » de Hongrie sous la régence n’a pas été un régime de nature fasciste comme celui de Benito Mussolini, et il a maintenu le régime parlementaire et une sorte d’état de droit… similaire à celui que prévoit la nouvelle constitution. Le régime, parfois qualifié de « semi-dictature », fut de tonalité antidémocratique et rétrograde. Les campagnes étaient étroitement surveillées par la gendarmerie, et les structures sociales rurales restaient immuables dans un pays où l’agriculture est encore prépondérante.
La Hongrie connaissait une vie parlementaire, et des élections « libres » s’y sont tenues, bien que leur régularité n’ai pas été toujours plus garantie que celles prévues par le texte récent : le mode de scrutin excluait déjà pratiquement l’alternance démocratique. L’aristocratie, qui dominait alors l’armée et la classe politique, et les propriétaires terriens, restaient les principaux appuis sociaux du régime. Elle a changé de genre, mais elle est revenue aux affaires avec l’argent gagné après le départ du communisme. La politique du régime comportait en outre de nets aspects antisémites.. La politique d’alors fut un mélange ostentatoire d’ultra-conservatisme et de libéralisme économique. Désormais, on en est au même point mais… l’Europe motivée des Sarkozy, Merckel, ex-Berlusconiste, a bien du mal à réagir. Il est vrai que ce n’est pas encore en France que des centaines de milliers de personnes descendraient, comme en Hongrie le 2 janvier dernier, dans la rue, pour dénoncer « l’installation à tous les postes de responsabilité de l’appareil d’État, notamment dans les secteurs de l’économie, de la police, de la justice et de l’armée de proches de Viktor Orban, dont beaucoup disposent d’un mandat de neuf ou douze ans. Un futur gouvernement d’une autre couleur politique sera par conséquent confronté à un appareil d’État hostile, entièrement aux mains du Fidesz.
Dans le domaine politique, la Constitution rend rétroactivement « responsables des crimes communistes » commis jusqu’en 1989 les dirigeants de l’actuel Parti socialiste (ex-communiste), ce qui a poussé ces derniers à dénoncer « la mise en place d’une dictature ». Côté religion, elle réduit d’environ trois cents à quatorze les communautés bénéficiant de subventions publiques. La nouvelle Constitution touche également la vie privée en décrétant que l’embryon est un être humain dès le début de la grossesse, ce qui fait peser des craintes sur l’accès des Hongroises à l’avortement. De même, le texte stipule que le mariage ne peut avoir lieu qu’entre un homme et une femme, excluant ainsi les mariages homosexuels… Outre ces lois restrictives, Viktor Orban a aussi mis au pas les médias publics, avec des licenciements massifs ou la mise en préretraite de journalistes indociles, en dépit d’une grève de la faim de plusieurs d’entre eux, aussitôt licenciés. Et Klubradio, seule radio d’opposition, a perdu sa fréquence.
Allez, ne cherchez pas, c’est à peu près ce qui nous attend. Mais au fait, Nicolas Paul Stéphane Sarközy de Nagy-Bocsa…n’est-il pas le fils de Pal Nagy-Bocsa y Sarközy qui est né à Budapest, en 1928, dans une famille de hobereaux hongrois possédant des terres et un petit château à Alatayan, à 100 km de la capitale, et son grand-père a été adjoint au maire de la ville de Szolnok à l’époque de la Hongrie fasciste. Mais ce n’est qu’une affirmation d’un « pigiste censeur ! »

Cet article a 3 commentaires

  1. batistin

    Au bout d’un moment, c’est à dire depuis l’arrivée de l’Homo Habilis il y a 2.4 à 1.6 millions d’années, en Afrique, on finit par se demander si l’être humain n’est pas complètement con.
    Entre rêver de posséder le nain de jardin de son voisin et
    être prêt pour cela à organiser un système légal pour faire pendre haut et court tout ceux qui n’en rêvent pas, il y a une différence .
    La différence qui divise les hommes en deux tribus,
    celle de ceux qui aiment les pelouses tristes, arrosées malgré la sécheresse, entretenues vertes à coup d’engrais ravageurs et
    celle de ceux qui aiment les mauvaises herbes, le coquelicot et le bleuet dans le champ de blé.
    La même différence qui sépare aussi
    deux mots lancés en insulte et qui tombent en s’imbriquant au hasard et font joli bruit, et un phrasé harmonique, plaisant et documenté.
    Ce qui sépare donc les colonnes des journaux à la botte, friands de « petites phrases en politique », et les journalistes écrivains.
    Ou écrivains journaliste d’ailleurs.
    Salut à vous, Monsieur Darmian !
    L’homme est con !
    En tous cas dans son incapacité à jouir du bonheur offert de vivre, ce que savent faire toutes les autres êtres, animal, végétal ou minéral vivant sur la planète Terre.
    Donc, entre subir une dictature de plus, ou imaginer un socialisme libertaire et commercial, sans oublier ceux qui rêvent de décroître, franchement, « quand on est con, on est con ».
    Peut-être finirons nous par accepter un jour d’être, ensemble, heureux !

  2. Nadine Bompart

    « Pigiste censeur » ?????? Elle est bien bonne, celle-là!!! Des « censeurs » comme vous, j’en souhaite à toutes les dictatures!!! Et aux démocraties aussi…
    Comme vous l’expliquez si bien, le retour de bâton des pays de l’Est n’a rien d’étonnant. La démocratie est un véritable travail en profondeur, qui prends du temps pour s’installer au sein d’un peuple.
    Comme les pays Arabes qui, le vote libre obtenu, élisent les Fous de Dieu, c’est toujours les « mauvais plis » des mentalités de base, écrasés par les dictatures, qui relèvent la tête en premier.
    Pas de démocratie sans éducation à la démocratie…

  3. Michel d'Auvergne

    Sur le « Post » Le meilleur côtoie le pire, personnellement, j’aime bien mais il faut reconnaître que c’est à consommer avec une grande modération et cette publication souligne, si besoin était, que de « posteur » à journaliste il y a un abîme…
    Quant à l’éducation à la démocratie, pour reprendre les mots de Nadine, c’est ce que veulent « karcheriser » nos actuels « gouvernators ».
    Debout les « pigistes-censeurs » !
    Chalut d’ichi.

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