Le football est hors jeu depuis longtemps

Le monde du football est en émoi : il vient de découvrir qu’il pouvait y avoir sur la planète des matches truqués pour assurer des profits à de pauvres joueurs, dirigeants et managers qui, on le sait, sont tous déshérités ! Comme l’affirmerait le scénariste des Guignols, ce ne peut être qu’à l’insu du plein gré des responsables de tous niveaux qui n’ont jamais rien vu, rien entendu, et surtout rien perçu ! Une enquête d’Europol, d’une ampleur sans précédent, a mis au jour l’existence de plusieurs centaines de matches truqués à travers le monde, dont des rencontres… de Ligue des champions, mettant en jeu l’intégrité du football. Excusez du peu. On va même jusqu’à la Coupe du Monde, et le handball des frères Karabatic ressemble à de la roupie de sansonnet ! Des gagne-petits ces champions du Monde, car le cartel criminel basé à Singapour, à la tête de ces opérations, a réalisé plus de 8 millions d’euros de bénéfices pour une mise totale de 16 millions d’euros. On entre dans l’industrialisation du truquage ! Ce n’est pas, pour les grands présidents et les instances internationales, une surprise dont ils se sont bien gardé de parler. En janvier, Interpol avait en effet averti le monde du football que la corruption en son sein aidait à financer d’autres activités criminelles comme la prostitution ou le trafic de drogues, sans provoquer le moindre émoi parmi ces gens qui ne savent que compter.
Dans un premier temps, quelques 380 matches truqués ont été identifiés, principalement en Europe, parmi lesquels environ 425 arbitres, dirigeants de clubs et joueurs des championnats turcs, allemands et suisses. Sur les 425 suspects, 151 vivent en Allemagne et 66 en Turquie. En Hongrie, aussi, 50 personnes, dont trois joueurs et quatre arbitres, sont soupçonnées d’avoir manipulé les « résultats de 33 matches », contre des pots-de-vin pouvant aller de 40.000 à 600.000 euros. Et là, c’est le coup de massue : personne ne s’en doutait !
Il se trouve que durant plus d’un an, en 82-83, j’ai enquêté sur les pratiques d’une grand club, alors au faîte de sa gloire. Malgré toutes les menaces ( j’avais écrit un article au printemps 83 qui m’avait valu des menaces verbales du Président), j’avais déniché divers systèmes de financement occulte de ce qui était déjà le « milieu », au sens péjoratif, du ballon rond professionnel. Déjà, des systèmes étaient en place pour truquer des matches de Coupe d’Europe, lors des premiers tours dangereux pour un club ayant besoin de rentrées de la Coupe d’Europe pour boucler son budget. Voici comment fonctionnait cette machine à assurer le résultat.
Pour les arbitres, on parlait alors de « chambre garnie » lors de leur venue en terre française. Sur les rencontres du premier tour, l’UEFA désignait souvent des hommes en noir venant de pays « pauvres » de second rang. Ils étaient beaucoup plus vulnérables que les autres en une époque où, à l’Est, le niveau de vie était maigre. A l’hôtel, ils trouvaient sur la table de nuit quelques attentions particulières, revendables à des prix intéressants, et souvent une visite galante figurait au menu. Au moment des fêtes de fin d’année arrivaient également quelques caisses de grand cru, à posteriori, au domicile d’une personne relais « habilitée « … Les juges de touche et les délégués n’étaient pas oubliés mais, bien entendu, aucune rencontre n’était truquée. Il existait un autre volet plus facile car parfaitement légal : le transfert alibi ! Parfois, il était accompagné de cautions bancaires de la mairie, avec des clauses subtiles permettant de transférer la dépense privée sur les comptes publics durant des décennies !
Lors de la venue d’un club, il était fait une proposition d’achat d’un joueur du club visiteur à un tarif très avantageux. Cette procédure était contractualisée par un contrat daté qui devenait exécutoire lors de la période légale, car rien n’interdit de payer à prix d’or un élément qui, en définitive, n’était pas au niveau et jamais utilisé. On l’accueillait avec les honneurs dus à son prix et ensuite on le prêtait à un autre club à l’étranger, ou mieux, on le renvoyait (je l’ai connu pour un Hongrois) dans son club d’origine ! C’était tout bénéfice pour les visiteurs d’un soir qui ainsi assuraient leur budget de la saison car, même en passant le tour initial, ils n’auraient jamais autant engrangé. Personnellement, j’ai été ébahi par le débarquement d’un jeune irlandais ou d’un maître à jouer hongrois, ou par des achats surprenants ou des départs discrets vers des horizons improbables. Mais bien évidemment, ce fut présenté comme des exploits financiers !
On trouvait aussi des tournées ou des matches amicaux ponctuels dans des paradis fiscaux permettant d’alimenter une caisse noire à l’étranger sur des comptes offshore. Elle était alimentée par des frais surestimés lors des déplacements aux USA, en Écosse, aux Émirats arabes unis ou au Qatar, en Écosse, au Portugal ou au Sénégal… Des lieux où l’on dépensait sans compter dans des hôtels, des boites de nuit et où on était réputé jouer gratuitement. Les fonds collectés servaient à rémunérer d’autres clubs, des arbitres ou des joueurs étrangers peu payés en France, mais grassement arrosés depuis le Luxembourg dans leur pays d’origine, sur la base de contrats d’image. Il existait aussi la récupération de toutes les entrées réglées en liquide et qui quittaient le stade sans entrer dans la recette « officielle », avant de filer dans un attaché case vers l’aéroport et un jet privé, durant le match. Il y aurait tellement d’autres pratiques (transferts sur évalués, sponsors officiels subventionnant des tournées, paiement de joueurs par des entreprises…) à évoquer. Je suis certain que ces pratiques existent encore, avec des intermédiaires discrets, et inspirés par des mafias soucieuses de rentabilité. Alors, des matches truqués, il en a existé, il en existe encore, et il en existera tant que le football servira de pompes à fric pour parasites affamés de profits faciles !

Cette publication a un commentaire

  1. PACIOS Vanessa

    Et oui le monde du foot est moche et il n’est pas le seul je suppose…
    Vu de l’extérieur, on ne voit trop rien mais une fois qu’on a le pied dedans même sans être en ligue 1, il y a beaucoup de choses moches…
    Le sport est devenu moche…
    Dessous de table, fric, dopage….
    🙁 🙁 🙁

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