Les patrons banquiers se sucrent sans vergogne

Dans toutes les mairies de France, il est un nom qu’il ne faut plus prononcer, celui de Dexia. La banque née de l’alliance en 1996 entre le Crédit communal de Belgique (1860) et le Crédit local de France (1987), société anonyme à caractère commercial issue de la privatisation de la CAECL (Caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales), un établissement public administratif, dont la vocation première était de répondre aux besoins des collectivités locales a perdu toute crédibilité. Une gestion désastreuse, de contrats sibyllins et malhonnêtes ont causé des ravages dans les comptes des villes ou de grandes autres entités publiques.

Face à une vraie banqueroute les États belge, français et luxembourgeois ont transmis le 21 mars 2012 (qui était encore à la manœuvre?) à la Commission européenne un plan contenant la stratégie, le plan d’affaires ainsi qu’une présentation des perspectives du groupe prenant en compte la cession d’entités et l’obtention de la garantie définitive sur ses financements de 90 milliards d’euros à un coût supportable pour le groupe. « L’affaire Dexia » reste considérée par certains médias comme étant « la plus grande catastrophe de l’histoire de la banque en France »1 et « le fiasco le plus cher de l’histoire des banques en Europe ». Selon la Cour des Comptes, la faillite, a coûté au moins 6,6 milliards d’euros à l’État français et au moins autant à l’État belge. Autant écrire que ramené aux impôts français l’ardoise est salée et même cette année dans la loi de finances il a fallu sacrifier une part des dotations de l’Etat pour couvrir les emprunts toxiques qui écrasent des départements ou des grandes villes ! Dexia c’est l’illustration parfaite du principe de la « mutualisation de gestions catastrophiques » après avoir privatisé les « bénéfices tant qu’il y en avait ». En cours de démantèlement, la banque n’a pas mis un terme à son fonctionnement traditionnel. Les dirigeants nouveaux se sont bien installés comme dans toutes les entreprises du secteur, dans les principes antérieurs.

C’est ainsi que trois dirigeants de l’établissement financier franco-belge voient leurs salaires respectifs être revalorisés de 30% à compter du 1er janvier. Pierre Vergnes (Directeur financier), Marc Brugière (Responsable des risques), Johan Bohets (Secrétaire général) percevront chacun 450 000 euros annuels, soit des salaires comparables à ceux de dirigeants de grandes banques françaises. Une broutille direz-vous vu le trou actuel bouché par les joyeux contribuables prêts à rugir quand un maire augmente la fiscalité d’un euro par jour ! Karel de Boeck, PDG de Dexia, obtient quant à lui déjà à 600.000 euros avec un argument massue : liquider les 238 milliards de prêts au bilan « nécessite d’avoir des compétences pointue » selon le service communication de la banque ! A apprécier à sa juste valeur !

Si l’on ajoute au tableau, selon le JDD, un « séminaire stratégique » d’intronisation des trois dirigeants qui, en 2 jours pour 70 cadres, aurait coûté la bagatelle de 20 000 euros, hammam et sauna compris on a une idée exacte sur la gouvernance de ce gouffre bancaire. Bien évidemment le Medef va défendre ces dirigeants exemplaires qui se tuent au boulot pour réparer les énormes gaffes faites par des dirigeants ayant été encore mieux rémunérés ! C’est vrai qu’il faut longuement réfléchir pour faire évoluer une dette colossale ! Nationalisée en 2008, Dexia a perdu plus de 15 milliards d’euros en trois ans et rappelons que Dexia est détenue à 44% par la France et à 50% par la Belgique. Et donc il faut admettre que nous payons une belle partie de ces émoluments de confort mais dans le fond on va continuer encore longtemps à réparer les conséquences de la crise des « subprimes » et la négligence affligeante des responsables politiques d’avant 2012.

Le système bancaire n’a tiré absolument aucune leçon réelle de ses défaillances. Au contraire il est revenu au fonctionnement antérieur de manière plus discrète et plus serrée afin de se refaire une « santé » plus conformes aux intérêts des actionnaires. On peut donc se rémunérer à sa guise d’autant que les oracles prévoient le retour du bon vieux temps des bilans confortables. Pour la première fois depuis 2007, c’est un horizon assez dégagé qui se présente en effet devant les banques françaises. Cette nouvelle année s’annonce bien sûr comme celle du grand audit du secteur par la Banque centrale européenne, mais de cette épreuve de vérité, nos acteurs nationaux, sauf peut-être Dexia (ce n’est pas une hypothèse mais une certitude!), paraissent assurés de sortir sans dommage majeur. Leurs niveaux de solvabilité et de liquidité, conformes ou supérieurs aux standards réglementaires exigés, sont suffisants pour les mettre à l’abri de toute mauvaise surprise. L’économie réelle peut encore tirer la langue… les banquiers sont repartis ailleurs !

 

Cet article a 2 commentaires

  1. gege31

    Ancien cadre bancaire de la Caisse des dépôts, je connais fort bien Dexia (autrefois CAECL puis Crédit Local de France) filiale du groupe public créée avec l’argent du groupe au profit d’un cadre totalement mégalo qui, par ses recrutements a tué l’esprit même du CLF. Ce mégalo a un nom : Pierre Richard cadre de la CDC, polytechnicien de son état qui a su créer, pour une grande partie à son profit, Dexia d’abord introduit en bourse puis associé pour «faire de la banque» avec un seuil critique minimum.

    A l’époque où j’exerçais, les structures régionales CDC et Dexia étaient communes ce qui m’a permis de constater, sur le terrain, la déviance du système. Beaucoup de polytechniciens on été recrutés pour imaginer des prêts totalement illisibles par les élus. En plus, le réseau de proximité de la CDC étant le Trésor Public, il était facile à Dexia, via les receveurs municipaux, de faire de l’entrisme…

    Nous avons hérité de la facture … et Pierre Richard se la coule douce avec ses indemnités de licenciement.

    Honte à un établissement public d’avoir cautionné et toléré Dexia qui, c’est vrai, ne manquait pas de verser chaque année des dividendes à ses actionnaires dont la CDC … qui elle, n’ayant pas d’actionnaires pouvait vivre grassement comme elle le fait toujours nourrie par ses monopoles (dépôts des notaires, mandataires judiciaires, consignations, centralisation du Livret A … )

    Facile de conduire une politique sociale de « pointe et démagogique » quand on est riche … avec l’argent des français bien entendu.

Laisser un commentaire