Je suis devenu un ringard durable qui s'assume

Il faut bien que je me rende à l’évidence : je deviens de plus en plus ringard ! Je me sens en décalage complet avec une évolution socio-médiatique qui me révulse. Mais dans le fond c’est certainement une affaire d’âge ! A moins que ce soit une éducation ratée ou une question de gênes dont je ne pourrais pas me débarrasser. J’ai bien pensé également à un maladie , syndrome frontal qui me ferait voir le monde avec un regard d’un pessimisme excessif. J’ai tout tenté : le vin rosé, les tisanes arrosées, les champignons les plus bizarres, les blagues les plus lourdes, les séjours au comptoir du café, les lectures avec des lunettes roses… et je reste dans le marigot de la ringardise. Je m’enlise de jour en jour partagé entre la tentation de me résoudre à déposer les armes idéologiques et une envie de convaincre. C’est éprouvant car la journée se déroule selon une courbe sinusoïdale permanente avec le soir un sentiment d’inutilité que la nuit n’arrive pas à effacer pour le lendemain. En fait je suis devenu progressivement hors du coup sans m’en apercevoir vraiment. Et c’est ça le plus inquiétant car on entre en ringardise exactement on tombe dans les sables mouvants.

On n’ose pas bouger tellement on a peur d’accentuer le phénomène d’enlisement. Parfois je crois avoir rencontré un esprit secourable mais il passe avec une excuse valable : il a piscine, un mépris profond pour les vieux cons ou une activité absorbante ou urgente. En fait peut-être que personne ne souhaite accoler son nom ou sa personne à un « ringard » dans une période qui confond progrès et modernisme, ténacité et entêtement, fidélité et soumission, valeurs et apparences. C’est devenu une honte de s’avouer obnubilé par la tolérance la laïcité, la fraternité, la solidarité, la proximité démocratique, l’intégrité morale et matérielle, l’égalité car c’est assimilé à de la faiblesse, de la facilité, de la paresse intellectuelle ou de dévotion à une autre époque. Inutile d’invoquer votre recul, votre expérience, votre parcours car désormais tout ce qui appartient au passé ne compte plus.

Justement la ringardise se caractérise par une propension à conter ses « souvenirs » d’ancien combattant ou à faire part de vos analyses reposant sur des décennies de militantisme diversifié. La vérité appartient à la   » jeunesse » des idées qui bien évidemment résulte d’une formation nettement supérieure et d’une adaptabilité beaucoup plus élevée que celle du « ringard de terrain ». D’ailleurs eux ils savent quel chemin emprunter pour aller vers les sommets car on leur a donné un GPS dans des écoles spécialisées. Par contre, pour eux, tous les autres sont nuls car ils sont victimes de cette absence totale de repères techniques et ils emprunteront les sentiers tortueux de l’expérience fréquentés par les muletiers de la politique.  Pour une minorité d’étoiles filantes il y aura aussi les autoroutes de la réussite. Un parcours grisant leur permettant d’oublier les « ringards » beaucoup plus lents et prudents confinés sur les routes départementales ! Ils les doublent avec un regard amusé et surtout avec la certitude que ces « tortues » ayant résisté à toutes les épreuves mais qui ne sont plus adaptés aux exigences de leur temps. Rien d’anormal cependant car bien des « ringards d’aujourd’hui» oublient aussi qu’ils ont eux-aussi dû devancer ceux qui étaient atteints de ce mal dans le passé. C’est la loi naturelle des successions !

Il n’empêche que les « conquérants » se raréfient à gauche et que les « héritiers » sont maintenant les plus nombreux ! Pour ne pas avoir suffisamment formé de gens de la première catégorie, les socialistes qui se sont contentés de vivre sur leurs acquis ont du souci à se faire pour la décennie qui s’ouvre ! Confondant les débats sur les idées avec les « écuries de campagne » ils ont oublié, totalement oublié, de se donner une identité différente des « sans valeurs » se prétendant uniquement des « gestionnaires éclairés ». Plus le temps passe et plus, le seul critère de débat évolue vers l’invective virtuelle sur les réseaux sociaux, la course à l’échalote de l’extrémisme, le bon marché des idées toutes faites, les déclarations fallacieuses, la superficialité des analyses. Faire sans cesse référence à des valeurs pour étayer ses actes, son comportement quotidien porte malheur dans la société actuelle car rares sont celles et ceux qui les ont encore comme référence de vie ! Le Président de la République et une bonne part du gouvernement s’accommodent parfaitement des mémoires qui flanchent et donc de cette absence de base idéologique car le seul critère c’est répondre aux sondages. L’UMP et le FN aussi !

Le propre du ringard c’est qu’il dérange car il apparaît comme l’œil dans la tombe de Caïn, le donneur de leçons, l’empêcheur de tourner en rond, le radoteur d’une autre époque. Il perturbe les logiciels modernes réputés efficaces. On attend donc avec impatience qu’il se taise et disparaisse dans les marécages de l’indifférence. Il tarde même qu’il se contente de vivre avec ses regrets, qu’il ne s’exprime plus car il porte tort à ses « amis ».

Je suis ringard et je l’assume ! J’en suis même fier !

Cet article a 8 commentaires

  1. Claude MEFIANT

    Essaie le hakik !

  2. mlg

    Continue à être « ringard » moi j’aime et je m’y retrouve!!!!

  3. DUBERNAT

    RESTE COMME TU ES AVEC TES IDEES ET TES CONVICTIONS SINON SA NE SERAIS PLUS TOI .MEME SI CELA TE CONTRARIE ET JE LE COMPREND

  4. Oui, et puis, un jour de marché, dans un petit village de Provence, près de NIce, grande ville soumise aux règles internationales de toutes les réussites froides et rapides, une bande de jeunes gens s’est approchée d’un petit stand que j’y tenais.
    Je proposait toute une suite d’objet étranges et bizarres en bois d’olivier, de cytise et buis, de la cuillère à miel en passant par la sempiternelle boite à tout et à rien, pour finir par de petit personnages de bois.
    Des mini-sculptures ayant la particularité d’être toutes uniques et donc différentes.

    Pour une population de jeunes gens habitués à voir et consommer des produits manufacturés et donc irrémédiablement tous ressemblant, autant de diversité (culturelle !) les a laissé sur le cul.
    Il ont passé une bonne demi-heure à me poser mille questions, sur le bois, sur me outils, répétant sans cesse cette phrase idiote et pourtant si chargée d’un sens profond:
    « mais alors, c’est vous qui le faites, avec vos mains ?! »

    Et oui, avec mes mains, en y apportant du sens, en tentant à chaque pièce réalisée de donner un caractère propre, en imaginant par avance la personne qui saur, non acheter, mais accueillir mon travail.

    La conclusion fut fort violente et pour tout vous dire me serra la gorge:
    ces jeunes gens, en tout cas deux d’entre eux, ont tenu absolument à ce que je leur donne toutes les coordonnées possibles, toutes les pistes possibles pour pouvoir engager leurs études, leur vie, vers le travail du bois.
    Deux d’entre eux sur un vingtaine, deux, deux qui vont se lever, avec au coeur, à l’âme le sentiment profond que leur vie pourrait être unique et un peu moins idiote et formatée.

    Alors, monsieur Darmian, des vieux schnocks comme vous, on devrait, comme au Japon les maîtres artisans sont cité « trésors vivants », vous garder le plus longtemps possible au plus près de tous les pouvoirs, pour y répéter sans cesse votre idée du monde.

    On se sait jamais, deux sur vingt, c’est toujours mieux que plus rien du tout !

  5. J.J.

    Mais non, Jean Marie, tu n’es pas ringard, tu fais simplement partie de ces gens qui voient un peu plus loin que le bout le leur nez.
    Et ça ennuie beaucoup les « superficiels » qui se croient très malin, surtout parce qu’ils ont souvent quelque chose de malodorant devant les yeux qui sape considérablement leur acuité visuelle et leur esprit critique, s’ils n’en n’ont jamais eu.

    On a l’impression d’être en décalage avec notre temps, en réalité ce sont les autres qui n’ont rien compris !
    Je sais, ça fait prétentieux et mégalomane de se ranger dans cette catégorie, mais j’assume également.

    Et malheureusement, l’avenir donne souvent raison à nos propos de Cassandre
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  6. David Girard

    Il y a la ringardise de celui qui rappelle que la politique doit avoir des idéaux de liberté égalité fraternité, et il y a la ringardise des bouffons politicards style Sarkozy, Dassault, Jacob, Fillon, Balkany, Boutin, et tout les jeunes pitres de l’UMP de la manif’ pour tous, sans compter les vieux réactionnaires et/ou d’extrême-droite.

  7. suzanne marvin

    dans des civilisations soit disant moins évoluées que la nôtre le savoir de l’aîné est une valeur et une richesse et c’est un devoir de la transmettre aux jeunes générations……….notre civilisation où le respect se dilue de plus en plus est peut-être sur le chemin de la décadence ? ……………je me souviens , dans ma campagne bazadaise quand les désherbants,pesticides.. et autes poisons ont envahi nos terres agricoles, les « anciens » qui faisaient de la résistance contre ces produits ….se faisaient traiter de ringards…………quand nous constatons aujourd’hui tous nos problèmes d’environnement ………. ………..défendre les valeurs d’égalité, de fraternité, de Laicité ne sera jamais « ringard »…………espérons qu’elles ne disparaissent pas pour que les jeunes générations en comprennent la valeur et n’aient pas à se battre pour les reconquérir…………….

  8. Nous sommes deux au moins, et pas qu’au PS!
    Quant à moi je me dis que j’ai gagné ma guerre contre l’américanisation généralisée des conscience, disons le mot, contre « l’impérialisme idéologique ». Ma « guerre froide » à moi.

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