Je propose un livret jeune et citoyen obligatoire

Après un vrai débat sur la place de la citoyenneté au sein du système éducatif il faudrait engager une vraie réflexion autour du service civique qui manque tant aux valeurs de la république. La disparition du service militaire puis du service national a entraîné une vraie distanciation entre la jeunesse et la République. Il n’y a plus en effet de lien réel entre le principe même d’appartenance à une nation qu’il faut respecter et défendre et les parcours individuels. S’il ne saurait être question d’appeler sous les drapeaux des « soldats » pouvant répondre aux agressions ou aller faire face aux menaces extérieures pour la sécurité de la France, il est impossible de ne pas imaginer un engagement de plus ou moins longue durée à servir l’intérêt général dans un cadre réglementé.
En laissant à la société le soin de réguler ces rapports entre l’individu et l’esprit républicain collectif on a ouvert les portes à absolument toutes les formes de communautarisme et même par certains cotés de corporatisme. En plaçant quasiment tout le monde dans la même situation, avec les mêmes devoirs, avec les mêmes obligations, dans un cadre de « service aux autres » on éviterait bien des déviances ou des marginalisations. Aussi réducteur que puisse apparaître cette affirmation, après une visite et un dialogue, dans le quartier des mineurs de la prison de Gradignan j’avais acquis une certitude : pour certains des jeunes présents, le régime carcéral était le seul qui leur ait donné des repères. Ils avouaient d’ailleurs qu’à l’extérieur ils étaient en manque et cette déserrance porte en elle les germes de phénomènes incontrôlables. La religion coercitive, codifiée, rude remplace ce vide moral.
Dans ma vie publique j’ai par exemple été impressionné par la qualité des personnes passées par le volontariat au sein des corps de sapeurs-pompiers. Leur progression professionnelle, leur investissement citoyen, leur volonté d’être utile,avec comme partout une proportion d’échecs, constituent la preuve qu’une structuration de l’action collective est indispensable en ce moment. Bien évidemment on objectera qu’il s’agit d’une engagement « volontaire » et en rien d’une obligation légale. C’est pourtant dans ce domaine de la « protection civile et sociale » de notre quotidien que se trouve le vrai gisement pour un service civil formateur. Certes il existe une forme de service civique mais n’étant pas obligatoire il a un impact limité.
Le dérèglement climatique va nous conduire à faire face à de plus en plus d’aléas difficiles et chaque fois l’appel à volontaires se fait plus pressant. Pourquoi ne pas former des jeunes filles et des jeunes garçons aux premiers secours, aux interventions structurées face à des contextes de crise, pourquoi ne pas les habituer à des actions coordonnées en faveur de l’environnement durant des périodes cumulées dans le temps entre 18 et 25 ans ? Ne peut on pas créer un livre citoyen avec l’enregistrement des participations à la vie associative, sportive ou culturelle ? Est-il si difficile de comptabiliser les actions humanitaires ou dans les organisations caritatives ? Il faut bien évidemment un objectif quantifié et surtout une reconnaissance par la délivrance d’un brevet de citoyenneté indispensable pour espérer entrer un jour au service de la République ou bénéficier de ses retombées. Sur appel à projets les associations d’éducation populaire, celles reconnues d’utilité publique, celles œuvrant dans le secteur de la solidarité pourraient recevoir une habilitation pour accueillir ces jeunes selon des modalités adaptées à leur situation. En définitive en rendant le service civique obligatoire sur la base d’une livret à points on favoriserait grandement la mixité sociale et le vivre ensemble.
Je suis donc de ceux qui pensent comme ce fut exprimé par Germaine Tillion, Edgar Morin, Stéphane Hessel, René Rémond dans un « Manifeste pour un service civique obligatoire en 2005 (oui 2005 ! ) que le moment est venu de se poser la question de fond. A l’époque, cet appel avait été soutenu par 470 parlementaires, de gauche comme de droite. Par la suite, certains candidats à la présidentielle de 2007 comme Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou se sont appropriés cette idée. Et plus rien … On a laissé courir comme si tout allait se régler sans décision politique. La crise aidant, les difficultés financières s’ajoutant on a cru éviter ce que les émeutes de 2005 avaient amorcé !
Il s’agit de répondre au dysfonctionnement du « vivre ensemble » en faisant en sorte que les gens retrouvent les valeurs républicaines et mettent en avant la fraternité et l’égalité dans la démocratie. Ce service civique doit être universel, laïque, solidaire et donc obligatoire, au cours duquel chaque Français donne de son temps à la collectivité sous de multiples formes. Seule la pratique par chacun de ses devoirs garantit à tous l’exercice de ses droits. Le civisme n’est pas une option, mais quelque chose d’obligatoire qui s’impose à tous ! C’est aussi une pratique, avant d’être une théorie et actuellement je trouve que l’on fait encore et toujours beaucoup de théorie ! Surtout depuis quelques jours…

Cet article a 2 commentaires

  1. batistin

    Vous dites, Monsieur, une chose certaine et forte, quoi de mieux que l’esprit d’équipe n’est-ce pas ?!
    Le tout est de savoir trois choses avant de commencer:
    une: constituer une équipe demande de savoir à quel « sport » va-t-on se livrer,
    deux: quelles seront les limites imposées aux joueurs et qui fera régner… l’esprit d’équipe justement !
    trois: lors d’un match contre une autre équipe, quelles seront les règles, et qui arbitrera cette rencontre, amicale évidemment ?

    L’avantage de l’esprit guerrier imposé autrefois au service militaire était celui-ci: les esprits fort, les jeunes gens en perte de repères républicains étaient tenus en ordre de marche par la force imposée.
    Difficile pour une gentille association caritative ou humanitaire de gérer une troupe de jeunes gens habitués à manier des armes, entraînés au combat de rue, maniant l’insulte, le mépris et l’insolence avec un art appris depuis le plus jeune age,
    difficile de gérer tout cela.
    Mon adjudant, à la retraite aujourd’hui, a bien connu ce problème…

    Difficile aussi de mélanger, mixer, on dit ça comme on veut, une jeune personne n’ayant eu comme lecture que des sms en onomatopées « salu komensa va ? », avec un ou une jeune adepte de l’écologie citadine ayant construit son point de vue par l’étude approfondie… du Modulor, notion architecturale inventée par Le Corbusier en 1944, par exemple…

    Tout ce que vous écrivez, Monsieur, ici, si je peux me permettre puisque vous offrez la parole, est fondé, et d’une évidence triste.
    Mais les solutions proposées ou envisagées sont totalement… irréalistes, à mon sens bien sur.
    Pour ma part voici mon idée:
    l’Armée est le seul corps constitué capable d’offrir un service cohérent à la République.
    Une armée de métier, certes.
    Une armée guerrière, certes.
    Mais une armée capable de fournir des hommes et des femmes assez rudes et instruits.
    Nous avons aussi des ingénieurs électroniques, des techniciens du Génie capable de dépolluer une zone et quelques littéraires et historiens… dans les corps constitués !

    La solution est peut-être celle-ci:
    nous avons assez entendu les casques bleus français nous répéter qu’une des nouvelle missions de l’armée de métier était, non de faire la guerre, mais d’imposer et de maintenir la paix.
    Imposer la paix, oui, mais à l’étranger uniquement.. !
    Il serait peut-être possible de créer un corps d’armée, constitué de personnels instruits, recruté peut-être dans le civil aussi, chacun apportant son savoir dans différentes branches d’activités.
    Branches d’activités que vous citez, Monsieur, en parlant de secours aux personnes, d’écologie, d’humanisme…

    A celles et ceux qui entendraient mes propos comme une envie déguisée de remplacer la République par l’Armée (!), je dirais simplement ceci:
    venez donc avec moi quartier Nord, et tentez d’imposer par la télépathie ou le yoga, d’apprendre à un jeune homme le respect de la Femme, et comment porter le panier de courses d’une grand-mère jusqu’au 17ème étage quand l’ascenseur est en panne.

    Ou, allons si vous préférez au fin fond de nos campagnes, nous asseoir sur un banc public avec nos jeunes gens, et tenter de leur apprendre le chant du rossignol et le nom latin du papillon, sans téléphone, juste avec votre bonne intention …

    Batistin
    réserviste service défense 2°RIMa
    artiste

  2. le chat François

    Le service militaire n’était pas spécialement envisagé comme un moment de plaisir quand je l’ai fait , mais les souvenirs laissés après coup sont pour bon nombre de gens plutôt bons . Et quelle école de camaraderie ! Ce concept avait l’avantage de souder les jeunes recrues dans un commune angoisse : qu’allait il nous arriver ? l’ennemi commun était dans un premier temps les gradés eux mêmes , particulièrement durant la période des classes qui alternaient un réjouissant programme de séances interminables de « garde à vous » , de marches forcées , de fausses alertes qui nous tiraient du lit à « pas d’heure » pour nous regrouper dans le froid ou sous la pluie Pour rien … et j’en ai oublié . Passées les classes , venait le temps de l’aventure ou les exercices d’entrainement , les nuits sous la tente , dans la pampa , les voyages en camions bâchés , les séances de tir , conjugués avec la complicité ferme mais plus complice des gradés , donnait tout son sens à cette période : la cohésion sociale toutes religions, couleurs de peau , origines sociales , confondues.
    Le vecteur de cette réussite , on le doit paradoxalement à un élément essentiel qui se résume en trois mots « on en chiait » .
    Les épreuves physiques et morales donnaient du sens au groupe .
    Un service citoyen est donc une très bonne idée , encore faudrait il trouver des activités suffisamment fédératrices pour que la socialisation recherchée soit au rendez vous . Je suis persuadé que si des militaires , enlevaient , un soir ,un groupe de jeunes errants désœuvrés comme il y en a tant dans nos « cités » pour les entraîner dans une aventure de quelques jours fait de bivouacs, construction de ponts , barouds , cela en remettrait bon nombre sur de bons rails . Je sais que c’est impossible à réaliser mais c’était pour illustrer que la notion de l’insolite et de l’effort est un garant de réussite . Pourquoi ne pas entraîner les jeunes dans des activités liées au social, à la solidarité, l’utilité publique.. Cela implique un recensement des secteurs possibles et penser l’encadrement ..

Laisser un commentaire