L'Europe des peuples est en lambeaux

Que reste-t-il du rêve initial européen ? En quelques mois tout s’est effondré dans tous les domaines : économie, politique extérieure, défense, libre circulation, culture, sport… L’union européenne est en lambeaux car elle n’a pas été capable de dépasser les seules valeurs du profit qu’elle traîne depuis son origine. Il n’y a absolument plus un seul point commun entre les pays qui au fil des jours partent chacun dans la direction qu’ils souhaitent sans se soucier des conséquences pour les autres. Les nouveaux arrivants n’ayant aucune capacité à intégrer une position sociale commune progressiste, se retrouvent dans un repli nationaliste angoissant et les autres obnubilés par leur déficit budgétaire tirent leur niveau d’éducation, de protection sociale, de services au public vers le bas. Ecartelée l’UE explose.
Ainsi le fameux espace Schengen tellement vanté pour son principe de « libre circulation des biens et des personnes » n’est plus que virtuel. On dresse des barbelés et des palissades et de partout on rétablit de fait le contrôle aux frontières nationales plus ou moins discrètement. En théorie, les seuls contrôles sont censés avoir lieu aux frontières extérieures de Schengen, où doivent être enregistrés les demandes d’asiles et d’où les migrants irréguliers doivent être renvoyés. Mais la tache est immense, avec quelque 886.000 migrants qui ont traversé la Méditerranée pour rejoindre l’Europe en 2015. La grande majorité l’ont fait par la Grèce exsangue incapable d’assumer , avant de continuer leur périple par les Balkans. On a donc déplacé le problème vers l’Europe centrale.
Les défaillances du contrôle aux frontières de l’Europe ont été également mises en lumière par les attentats de Paris, après la découverte que deux des kamikazes du stade de France avaient été « contrôlés » le 3 octobre en Grèce sur le chemin des migrants. Les frontières extérieures ne jouant plus leur rôle de filtres, des pays comme l’Allemagne, l’Autriche ou encore la Slovaquie, la France ont rétabli des contrôles à leurs frontières. Le code Schengen les y autorise, mais dans des circonstances exceptionnelles et pour une durée maximale de 6 mois. Du fait de cette limite, certains Etats ne pourront plus le faire à partir de mars 2016. Une disposition du code Schengen (son article 26) prévoit bien une prolongation jusqu’à deux ans «dans des circonstances exceptionnelles mettant en péril le fonctionnement global» de l’espace Schengen,  » du fait de manquements graves persistants liés au contrôle aux frontières extérieures ». Mais l’activation de cet article ne peut se faire qu’à l’issue d’un long processus. Ne rêvons pas c’est plié et le Sénat français en a pris acte en rétablissant le recrutement immédiat de 600 douaniers ! Un signe fort des intentions de l’ex-UMP et de ses alliés qui se glisseront vite en cas de retour au pouvoir dans le processus ouvert par le gouvernement. Exit Schengen !
Dans l’économie au même moment la Banque centrale européenne réputée indépendante du politique mais liée au monde de la finance capitule ou presque devant la situation globale de l’UE laissant à chacun le soin de se débrouiller. La BCE a abaissé son taux de dépôt de 10 points, pour le porter de -0,2% à -0,3%. Cette annonce, qui était anticipée par une majorité des analystes est destinée à réduire au maximum les capitaux immobilisés, afin que les liquidités soient utilisées pour irriguer l’économie. Le taux de refinancement et le taux de facilité de prêt marginal sont restés inchangés, respectivement à 0,05% et 0,3%. Je résume : inutile d’épargner ou de déposer les capitaux car ils sont rémunérés négativement !
La Banque a aussi étendu le programme de rachat d’actifs de 60 milliards d’euros mensuels de six mois, jusqu’à fin mars 2017, et au-delà si nécessaire. Le conseil a aussi décidé de réinvestir les remboursements en principal des titres achetés dans ce cadre aussi longtemps que nécessaire. Des mesures dont l’efficacité est pour le moins douteuse depuis des années En outre, la BCE va inclure dans le programme de rachat les titres émis en euros par les collectivités régionales et locales, qui deviennent éligibles au dispositif. L’objectif avoué de la BCE est de relancer l’inflation, alors que la hausse des prix peine à se concrétiser.
Contre le terrorisme il n’y a de toute évidence aucune cohérence et pour la défense chacun joue la carte du minimum pour ne pas hypothéquer ses finances et heurter son opinion publique. L’UEFA de Platini a sombré, l’athlétisme coule et le sport est miné par ses dettes De partout montent les populismes ou les extrémismes avec la résurgence des idéologies que l’Europe était sensée éliminer. Le conseil d’administration de la commission européenne ne cherche qu’à normaliser, surveiller, sanctionner mais n’a aucune force de proposition, de construction, d’évolution positive. L’Europe est au moins en cale sèche si ce n’est envasée pour des années ! Et ce n’est pas la déferlante FN prévue dans 3 régions françaises frontalières qui vont donner espoir de la voir repartir.

Cet article a 5 commentaires

  1. Gilbert SOULET

    Bonjour Jean-Marie,
    Je souscris entièrement à ton billet; Ne pas se résigner ! Mais que faire ?

    A+, Gilbert de Pertuis

  2. J.J.

    On a adopté la constitution européenne malgré la volonté des peuples,et en privilégiant le fric à l’humain, voilà le résultat….prévisible.

    Les nationalismes vont pouvoir se développer tout à leur aise et on finira par se taper sur la gueule, ça sera reparti » comme en 14″, ou en 39.

    Je suis bien content d’être vieux, mais si on m’avait dit dans ma jeunesse, que réapparaîtrait dans nos campagnes, le vol noir des corbeaux sur la plaine, je ne l’aurais pas cru.

    1. François

      L’Histoire est une énorme roue … avec des crevaisons !

  3. SIMARD Georges

    L’Europe des peuples, victime collatérale de la bataille de $olférino …
    Un homme de gauche peut-il encore se tenir debout sur cette passerelle entre la rive gauche et la rive droite ?

  4. faconjf

    Extrait du blog de Jacques Sapir
    http://russeurope.hypotheses.org/4528
    « Mercredi 3 décembre se tenait, dans la plus grande discrétion de la presse française, un référendum au Danemark portant sur une plus grande intégration à l’Union européenne. Le vote a été sans appel : le « Non » l’a emporté avec 53% des suffrages exprimés. Il faut aussi noter l’importante participation, environ 72% des électeurs ont voté.
    Le sens de ce référendum est clair. C’est une nouvelle victoire pour le courant souverainiste er eurosceptique en Europe. Les peuples des pays de l’UE rejettent cette idée d’intégration renforcée et de pseudo-fédéralisme que portent les partisans de l’Euro. Par ailleurs, c’est aussi une victoire qui aura certainement une influence sur le futur référendum qui doit se tenir en 2016 en Grande-Bretagne sur une possible sortie de ce pays de l’UE. »

    Pas un mot sur le blog de l’inénarrable Eurolâtre Jean Quatremer, un peu de gène aux entournures sans doute?

    L’intégration européenne ne fait plus rêver. Au contraire, elle fait peur. Les populations constatent que les mécanismes d’intégration, dont ben entendu l’Euro, n’ont jamais produits les effets bénéfiques qui leurs étaient attribués et ont même détérioré la situation. Nos politiques vont ils enfin percuter, perso je doute un peu.

    Salutations républicaines.

Laisser un commentaire