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L'inaccessible rêve "pavillon, gazon, télévision" pour certains

Pour maintes raisons le logement reste un sujet essentiel de la société française. C’est même devenu un véritable problème tant la situation est tendue dans tous les secteurs allant du volet social à la propriété. La crise avec les incertitudes qu’elle génère sur la vie des actifs, pèse en particulier sur la construction de pavillons ou d’appartements car l’accès au crédit demeure malgré tout encore très « sécurisé » pour les jeunes. En fait depuis quatre décennies les inégalités s’accroissent dans l’accès à la propriété. La part de propriétaires a été divisée par deux de 1988 à 2013 parmi les 25 à 44 ans les plus modestes. C’est ce qui explique en grande partie la pression sur le logement social dans lequel le « turn-over » s’allonge de plus en plus, bloquant la disponibilité pour les nouveaux demandeurs. Celles et ceux qui ont la chance d’avoir un emploi stable (rares) et rémunérateur passent la case « social » pour filer vers la « propriété » s’ils trouvent un terrain disponible sur le marché. Les autres attendent !
En 1973, parmi les « jeunes ménages » (25 à 44 ans) les plus modestes, environ un sur trois (34%) était propriétaire. Quarante ans plus tard, ils n’étaient plus que 16%, soit moins de un sur six. Cette dégringolade reflète le passage d’une période de facilité à investir (effacement de la dette par l’inflation) à celle beaucoup plus délicate la dette même à taux réduit pèse durablement. C’est ainsi que la part des propriétaires s’est accrue au sein des jeunes ménages les plus aisés: ils étaient 66%, soit les deux tiers en 2013, contre 43% en 1973 ! La fracture devient inquiétante car si l’on prend la période allant de 1988 à 2013, la part de propriétaires a été divisée par deux parmi les 25 à 44 ans les plus modestes !
L’évolution sociale joue également un rôle en raison de l’allongement de la vie avec la dépendance des parents et grands-parents. On constate en effet que les coups de pouce donnés par les « héritages » sont de moins en moins nombreux. Pour peu que les donateurs soient contraints de régler le coût élevé de leur admission dans une structure adaptée, il faut accepter la vente des résidences principales. Une étude le vérifie puisqu’au-delà des politiques du logement, des conditions d’emprunt et des prix de l’immobilier, c’est l’aide de la famille qui a joué un rôle significatif dans ces évolutions sur 40 ans. Ainsi dans les années 2000, la part des 25-44 ans les plus aisés ayant reçu une donation ou un héritage au cours des quatre dernières années a été trois fois plus élevée que celle des plus modestes et la probabilité d’acheter sa première résidence principale est plus élevée de 15 points en moyenne, lorsqu’une aide de la famille est reçue.
Le fameux livret « épargne-logement » n’a plus de rôle essentiel puisque faute d’augmentation des salaires et dans une période où les marges d’autofinancement (économies) deviennent très faibles les banques demandent paradoxalement des pourcentages toujours élevés pour l’apport personnel ! On note ainsi que globalement, quatre jeunes ayant récemment acheté leur premier logement sur dix ont reçu une aide de leur famille avant ou au moment de leur achat, et ces dons représentent en moyenne un cinquième du prix des logements achetés. Pour les autres le passage devient étroit.
D’autres paramètres creusent de fortes inégalités. L’augmentation des taux d’intérêt réels à la fin des années 1980, puis le doublement des prix de l’immobilier entre 1996 et 2010 lié à des placements dans la pierre par des détenteurs de liquidités à « placer » de manière sereine, ont nettement freiné l’accès au marché immobilier des plus modestes. Bien qu’elles aient été destinées à soutenir globalement l’accès à la propriété, les politiques du logement n’ont pas enrayé cette différenciation entre le niveau des revenus. Elles l’ont même, dans une certaine mesure, accentuée. Il faut en effet être solide socialement, détenteur d’une bonne mise de fonds et capable de faire face aux banquiers pour devenir un propriétaire. Les lois qui se sont succédées ont seulement privilégié via les exemptions fiscales les investisseurs désireux de louer ou de réaliser une plus-value en fin de période d’obligation de louer. Elle n’ont pas été utiles pour les plus modestes et n’ont probablement pas suffi à rendre possible l’acquisition d’un logement pour nombre de ménages à faible niveau de vie dans le contexte de prix faussement élevés de l’immobilier dans les années 2000.
Le rêve « pavillon, gazon, télévision » recule de plus en plus dans la vie de couples qui deviennent également instables face aux exigences de la vie quotidienne. Souvent les prestations sociales liées aux enfants en bas-âge permettent d’atteindre de justesse le niveau de ressources demandé mais ils plongent les primo-accédants dans la difficulté quand la majorité arrive pour l’aîné de la progéniture. Il faut donc que la puissance publique se mobilise toujours plus afin d’offrir des logements à loyer modéré en nombre suffisant pour ces « déçus » de la maison individuelle. Souvent ce sont justement les propriétaires en place qui s’indignent, pétitionnent, protestent contre l’arrivée de ces gens qui n’ont pas les moyens d’obtenir le bonheur d’un « chez soi » qui deviendra parfois une « cage » moins dorée que prévue.

Cette publication a un commentaire

  1. bernadette

    L’arrivée des néo ruraux n’est pas là la difficulté. La portée des lois impacte que le côté financier. Le PLU est beaucoup plus inquiétant. La planification est un autre sujet où il devient urgent de desserrer la contrainte pour les ruraux comme pour les néo ruraux. La globalisation de la loi de la pierre est une utopie. Ce sont les lotisseurs qui achètent à moindre coût des terres et les revendent en lot à des prix exorbitants. La concentration urbaine en est issue
    Les pauvres cons d’agriculteurs devenus trop vieux n’ont aucun droit. L’état par le biais de la mairie a fait des zones qui empêche de vendre en terrain constructible.

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