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Le référendum le meilleur et le pire des outils démocratiques

Il existe des élu(e)s qui se préoccupent de plus en plus des formes que pourrait recouvrir la fameuse démocratie participative leur permettant de s’assurer que leurs décisions sont partagées par une majorité des électrices et des électeurs auxquels ils se doivent de rendre des comptes. La France est en effet un pays un peu particulier où depuis déjà pas mal de temps tous les projets sont paralysés, retardés, annulés puisque la procédure permettant la consultation du public n’a aucune efficacité. La fameuse « enquête publique » est obsolète et totalement déconnectée des nécessités de l’époque. La majorité d’entre elles ne fait que renforcer le constat voulant que les dés soient jugés pipés par les porteurs de l’initiative ou que les opposants soient les seuls à se mobiliser… ce qui conduit désormais inexorablement à un affrontement plus ou moins violent et durable. Il n’y a pas un seul exemple de chantier d’envergure régionale ou à fortiori nationale qui n’ait échappé à une paralysie de plusieurs années voire à l’abandon pur et simple. Des tonnes de documents contradictoires sont édités, diffusés, échangés, contestés ; des centaines d’heures de réunions plus ou moins agitées et à l’arrivée on confie toujours à la justice l’arbitrage politique qui n’a jamais eu lieu. Une vraie carence démocratique.
Il existe pourtant dans le droit français une procédure irréfutable dont j’ai maintes fois décrit les mérites dans ces chroniques et qui vient d’être utilisé sur un projet extrêmement polémique, l’aéroport de Notre-dame-Des Landes : le « référendum local » ouvert à toutes les collectivités territoriales depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 (art. 72-1 al. 2 de la Constitution) dont les modalités ont été précisées par la loi organique du 1er août 2003. Il permet aux électeurs, sous certaines conditions, de décider par leur vote de la mise en œuvre ou non d’un projet qui relève de la compétence de la collectivité (région, département, intercommunalité, commune…) mais personne ne l’utilise car il comporte le risque de ne jamais convenir aux calculs des deux camps opposés sur un projet ou une décision. Le recours au vote populaire décisif a de plus en plus mauvaise presse ! Et ça ne va pas aller en s’arrangeant !
Le référendum local ne fonctionne pas en France en raison du désintérêt croissant des habitants pour la gestion publique qu’ils confient selon des échéances établies à des élu(e)s qu’ils laissent ensuite assumer la conduite des affaires publiques pour se dresser contre eux et vite oublier qu’ils les ont majoritairement choisis. Le déclin de la citoyenneté rend le recours à un arbitrage référendaire sans grand intérêt sauf pour le camp qui détient le pouvoir médiatique ou les clés d’une mobilisation de l’opinion dominante. Quand on sait que le projet soumis à référendum local est considéré comme adopté si la moitié au moins des électeurs inscrits a pris part au scrutin et s’il réunit la majorité des suffrages exprimés (ce que je ne conteste pas!) on mesure de suite l’ampleur de la tache. Seulement si cette dernière condition est remplie, il vaut décision que la collectivité locale organisatrice doit juridiquement suivre. Dans le cas contraire, le référendum n’a alors que la portée d’un avis consultatif… et peut être oublié dans un tiroir.
Il arrive rarement que plus de la moitié des électrices et des électeurs se déplacent pour donner leur avis lors d’une consultation car ils considèrent que le projet ne les concernant pas directement ou personnellement ils n’ont pas à s’exprimer. La « votation’ sans impact légal en Loire Atlantique marquera un début intéressant puisqu’on a atteint le chiffre de 53,37% de participation ! Il est vrai que le projet a suscité tellement de passions qu’il aurait été désastreux de ne pas dépasser les 50 % de votants. Il y aura donc un « après » consultation de Notre-dame-Des-Landes sauf si le résultat n’est pas respecté et qu’un vice de forme administratif le fasse « casser » par le Conseil d’État ou une autre instance judiciaire. Le processus peut alors devenir interminable !
Le recours à une pétition en Grande-Bretagne pour demander un nouveau vote a dans ce contexte quelque chose de surréaliste surtout venant de la part d’une élite portant une large part de responsabilité dans le verdict du Brexit. Le suffrage universel est sans cesse contourné par ceux-là même qui l’ont institué, qui en ont réclamé l’application ou qui manifeste pour demander plus de démocratie. Surtout quand il ne leur est pas favorable. En Grande Bretagne les perdants vont attendre, reculer l’échéance et rechercher un biais pour revenir en arrière ou au minimum enterrer sous des procédures la décisions du Brexit. En Loire Atlantique c’est identique puisque le résultat n’est que symbolique. La preuve : « Comme l’avait démontré (sic) les différentes composantes du mouvement, le cadre, le processus et le contenu de cette consultation étaient fondamentalement biaisés. Celle-ci était basée sur une série de  mensonges d’État et radicalement inéquitable. Il ne s’agissait pour nous que d’une étape dans la longue lutte (sic) pour un avenir sans aéroport à  Notre Dame des Landes. Cette lutte se poursuit. Nous savons que les attaques du  gouvernement et des pro-aéroport vont se renforcer. De notre coté, nous n’allons pas cesser pour autant d’habiter, cultiver et protéger ce  bocage. » C’est la déclaration de la coordination opposée à Notre-Dame-Des-Landes ! Comme quoi l’histoire se répète : un référendum et pire une « votatio »n c’est fait pour ne jamais décider de quoi que ce soit ! Un référendum local légal aurait été trop risqué pour les autorités qui pouvaient perdre la face alors elles l’ont évité. On se retrouve à la case départ comme si dans le fond personne ne voulait se plier directement ou indirectement au verdict populaire. Le pouvoir appartient de moins en moins au peuple qui ne vote jamais bien !

Cet article a 2 commentaires

  1. J.J.

    De toute façon, et dans tous les cas, on nous joue un grand air de pipeau, voir les résultats du référendum, en France et en Irlande, sur la soi disant constitution européenne.
    Notre Dame des Landes se construira, référendum ou pas, il en a été décidé ainsi en haut lieu.
    Le Brexit ? Tous les enthousiastes de la victoire pourront probablement attendre longtemps avant que des décisions concrètes soient prises et mises en œuvre.

    Les pêcheurs britanniques, partisans du Brexit ont encore devant eux de belles campagnes de pêches pendant lesquelles ils pourront observer comment on noie le poisson !

  2. bernadette

    Pour notre dame des landes pour ou contre devront s’acquitter de l’impôt citoyen

    De plus lors des casses à Nantes et ailleurs, ce sont les assurés qui paient.

    Le citoyen a des obligations, les droits sont de la servitude.

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