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L'école laïque doit impérativement porter les valeurs républicaines

Discours prononcé en tant que vice-président du conseil départemental à l’inauguration du nouveau groupe scolaire intercommunal de Cursan :

« Chacun d’entre vous connaît mon attachement profond à l’école laïque, républicaine, proche, dont ont besoin les enfants de notre pays pour non seulement devenir des femmes et des hommes ayant un avenir, mais aussi et surtout des citoyennes et des citoyens. Cette fois encore, au-delà de l’aspect formel d’un ruban tricolore coupé par les mains expertes des élus et du représentant de l’État, cette matinée revêt pour moi un caractère émotionnel profond.
A Sadirac, j’étais chez moi, sur cette commune où j’ai eu le bonheur et il faut bien l’avouer la chance, de naître et de grandir dans le giron des affaires municipales. Et cette fois à Cursan, au-delà de ces murs neufs conçus avec talent et célérité par mon ami Jean-Pierre Madaule architecte créonnais, je veux évoquer devant ces murs de pierres blanches les échos d’une autre époque qui ne m’a jamais vraiment quitté.
J’ai rarement entendu parler de l’école de Cursan même si c’était celle de mon père. Il était il est vrai, avare de mots et de sentiments mais je ne peux y échapper en cette matinée joyeuse. Arrivé avec sa sœur et ses parents fuyant lune Italie brune que certains dans notre propre pays voudrait ressusciter comme modèle, ils avaient posé leurs maigres baluchons de sans papiers dans les dépendances du château Virlys à quelques centaines de mètres d’ici.
Sa première intégration en 1931 il a du la faire dans la classe (aujourd’hui salle du conseil municipal ) de M. Récapet. Sa souffrance fut atroce et irrémédiable. Il n’a jamais pu s’en débarrasser et il n’avait que ce souvenir.
Parler Français, lire français, écrire français paraissent en effet des taches simples à celle ou celui qui n’a pas à surmonter les difficultés sociales, linguistiques et surtout psychologiques d’une migration non voulue.
Mon père fut un élève malheureux de l’école de la République et il la quitta persuadé qu’elle était inégalitaire, inhumaine par ses punitions (le maître le mettait à genoux sur des grains de maïs, les bras en crois avec un dictionnaire dans chaque main quand il s’exprimait en italien). Il a pourtant travaillé, lutté, agi pour que mon école soit différente.
Pourquoi évoquer cette période d’un école ultra-élitiste, sans pitié pour les faibles, intransigeante sur la morale, obsédée par l’instruction en cette matinée de partage d’une réussite portée par des élus locaux déterminés et actifs ? Justement parce que dans ces locaux neufs, dans cet espace désormais performant et réussi, nous aspirons toutes et tous à d’autres cursus scolaires conduisant grâce à une pédagogie de l’autonomie, de la responsabilité, du plaisir d’apprendre à ce que l’on appelle la réussite humaine davantage que la réussite scolaire.
Mesdames, messieurs, les pages de nos vies se tournent trop vite et nous oublions les efforts solidaires déterminants que doit désormais accomplir la communauté éducative pour que les enfants avancent vers des jours meilleurs. De longues années plus tard aucun enfant de la République ne doit en effet sortir de l’école avec un ressentiment profond d’injustice. C’est pour ça qu’elle doit être et rester, partout et toujours, la plus belle bâtisse du village et qu’elle ne doit jamais mourir. La qualité des locaux, la qualité de l’accueil, la qualité des équipes éducatives comptent en effet souvent autant pour l’avenir que bien des instructions officielles ou des consignes ministérielles.
Le Conseil départemental contraint de s’adapter à une loi NOTRe dénuée de toute valeur de proximité et surtout tellement technocratique qu’elle en devient inapplicable, a décidé de poursuivre ses efforts en faveur des écoles publiques des zones rurales de la Gironde nonostant la erte de la compétence générale. Il n’en dérogera pas ! On doit à Philippe Madrelle, lui-aussi excusé ce matin, la signature de la convention d’aménagement de cette école ayant permis au conseil général de verser près de 20 % du montant hors taxes des travaux soit quasiment 100 000 euros.
Dans le fond le département, et je me plais à le redire, ne peut aider que les élus qui se bougent, qui agissent, qui innovent, qui osent et qui surtout défendent l’intérêt général et la vitalité des services publics de proximité. Ce fut le cas ici. Et ce fut plus difficile que prévu ! Il y avait une vraie volonté d’agir et nous avons donc trouvé ensemble un chemin !
Aujourd’hui, même si mon propos s’en trouve allongé, il me faut rappeler devant vous M. le Préfet, Madame la Députée, Madame la Sénatrice, vous mes collègues élus et vous toutes et vous tous citoyens de Cursan ou de Loupes, que la solidarité intercommunale constructive et efficace, n’a jamais eu besoin pour vivre d’un loi, des fourches caudines d’une commission départementale décrétant de manière obscure de périmètres de mariages ou de divorces forcés!
Je veux rappeler par exemple avec force que j’ai personnellement dû m’opposer avec d’autres élus à la dissolution du Syndicat intercommunal de regroupement pédagogique qui a porté ce superbe projet… car il fallait parait-il diminuer arbitrairement le nombre des regroupements intercommunaux en Gironde et arbitrairement et uniformément les rationaliser!
Martine, Françoise, Monsieur le Préfet je tiens vous rappeler que nous avions suivi les préconisations de la loi NOTRe nous aurions dissous la structure solidaire vivant strictement pour les écoliers de ce lieu au nom d’une application comptable absurde d’une loi éloignée de toutes les réalités sociales de terrain. C’est un combat quotidien pour être écouté, respecté et surtout soutenu quand les décisions à prendre le sont au nom du bon sens et de la réalité de terrain.
Mesdames, messieurs, chères et chers amis, si à ce jour vos enfants, vos petits-enfants sont heureux dans une école digne de leur avenir c’est justement parce que les élus de Loupes courageux car fraîchement élus, et ceux de Cursan déjà plus aguerris et motivés ont eu le courage, l’intelligence et le sens de l’efficacité pour préférer la solidarité concrète à l’inefficacité technocratique bien toujours présente dans la vie rurale ou périurbaine. Je souhaite sincèrement que cet exemple préside aux décisions à venir et que la leçon qu’ils ont modestement donnée soit entendue et appréciée à sa juste valeur par d’autres élus adeptes des échanges de services politiciens personnels.
Notre République a besoin de réalisme, de ténacité, de conviction pour revenir sur ces valeurs que seul l’enseignement laïque véhicule : la liberté respectueuse de celle des autres, l’égalité permettant d’accéder à ce qui se fait de mieux, la fraternité dans la vie commune. Tout ce qui concourt à ces nécessités absolues contribue à éliminer l’exclusion, la haine, l’échec !
Mesdames, messieurs les élus, les concepteurs du projet, les entreprises ont accompli dignement leur tâche. Ils ont eu, par delà leurs différences, la volonté de participer localement à la construction d’une France moderne qui n’est ni celle des quotas, ni celle des ratios, ni celle des taux, ni celle des annonces, ni celle des profits car la vraie modernité repose pour moi, pour beaucoup d’entre vous sur la solidarité active et la proximité égalitaire !
Mesdames messieurs j’aurais tant voulu que mon père ait eu la chance de fréquenter cette école publique de la réussite.
Mesdames, messieurs j’aurais tellement aimé que son père Silvio puisse adresser à son instituteur une aussi belle lettre que celle que Abraham Lincoln adressa au professeur de son fils et dont voici quelques lignes :
Il aura à apprendre, je sais, que les hommes ne sont pas tous justes, ne sont pas tous sincères.
Mais enseignez-lui aussi que pour chaque canaille il y a un héros ; que pour chaque politicien égoïste, il y a un dirigeant dévoué…
Qu’il apprenne de bonne heure que les despotes sont les plus faciles à flatter…
Enseignez-lui, si vous pouvez, les merveilles des livres…
Mais laissez-lui un peu de temps libre pour considérer le mystère éternel des oiseaux dans le ciel, des abeilles au soleil, et des fleurs au flanc d’un coteau vert.
À l’école, enseignez-lui qu’il est bien plus honorable d’échouer que de tricher…
Apprenez-lui à avoir foi en ses propres idées, même si tout le monde lui dit qu’elles sont erronées…
Essayez de donner à mon fils la force de ne pas suivre la foule quand tout le monde se laisse entraîner…
Apprenez-lui à vendre ses muscles et son cerveau au plus haut prix, mais à ne jamais fixer un prix à son cœur et à son âme.
Apprenez-lui à fermer les oreilles devant la foule qui hurle et à se tenir ferme et combattre s’il pense avoir raison.
Qu’il ait le courage d’être impatient et la patience d’être courageux.
Apprenez-lui toujours à avoir une immense confiance en lui-même, parce que dès lors, il aura une immense confiance envers l’Humanité.
C’est une grande exigence, mais voyez ce que vous pouvez faire…
Il est un si bon garçon, mon fils !

Vive l’école intercommunale publique et laïque de Cursan !

Cet article a 26 commentaires

  1. bernadette

    Bonjour M. Darmian,

    Ce qui pose problème et qui divise la population ce sont les Pôles d’Équilibre Territoriaux et leur déclinaison de lois. Passer du Pos au Plu devient une mascarade plein d’embuches.

  2. François

    Bonjour !
    Célèbre et magnifique lettre d ‘Abraham Lincoln ! Incroyable comme elle colle à la réalité scolaire ! Peut-être que la prochaine réforme en gratifiera chaque porte de classe ou d’amphi de même que la page de garde des cahiers de texte ( plus utile qu’une page blanche!)
    Voilà le genre de normes européennes ou françaises que nos énarques « érudits » devraient pondre … utilement !
    Quant à toi, notre élu départemental, comment peux-tu te permettre d’occulter quelques passages de ce chef d’œuvre qui sont aussi réalistes que le reste du document ? Craignais-tu que les petits fours refroidissent ou disparaissent trop vite ?
    Amicalement

    Référence :http://aidersonprochain.com/la-lettre-dabraham-lincoln-au-professeur-de-son-fils/

  3. bernadette

    Le passé, le fils, la fille. Et puis moi mon fils et moi ma fille etc….
    C’Est toujours moi dans tout ces états….
    Moi, ma mère était
    enseignante, à non elle était
    ???
    Non ce n’est pas cela..L’école de la République, c’est plutôt l’école de Jaurès

  4. bernadette

    Compliqué et complexe la loi des territoires.
    Pourtant chaque foyer fiscal est soumis à l’impôt sur l’intercommunalité. La metropolisation pose pour la contribuable que je suis des questions. Au Sud comme au Nord le besoin de maison de services au public proche du domicile devient une réalité.
    Au Nord, des communes ont été amputées de leur ancrage d’appartenance électoral.

    C’Est grave face à l’augmentation de population et c’est antidémocratique.

  5. bernadette

    Il me semble que la classe politique s’est plantée.

    Il aurait été louable que dans le cadre de la communauté de communes que chaque élu participe à s’ouvrir sur le monde communautaire différemment par des scénarios d’aménagement en prenant un appui sur l’école. La simulation demande de s’impliquer pour respecter lespopulations de cet ancrage communautaire.
    Actuellement les communes riches s’opposent aux communes pauvres. Que deviennent alors ces communes dans la communauté ?

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