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Le second tour des premiers rôles sera plus compliqué que prévu

Les exégètes électoraux font tourner les ordinateurs à plein régime pour sortir des cartes, des diagrammes, des comparaisons, des évolutions, des échantillons afin d’expliquer aux électrices et aux électeurs pour qui ils ont voté ou pour qui il ne fallait pas voter. En fait ils décodent quantitativement un scrutin sans trop se préoccuper des fondements des choix effectués par des personnes réputées informées, éduquées et mesurées. Il y aurait pourtant bien des remarques à effectuer sur ces présidentielles qui n’ont en fait, guère réservé de surprises. Le duel entre la tenancière de la maison Le Pen et le cadre bancaire qui a réussi, avait été annoncé par les oracles sondagiers et il a eu lieu. Bien évidemment les deux éliminés que sont « l’innocent aux mains pleines de la Sarthe » et le « tribun de la France temporairement insoumise » ont trouvé des boucs-émissaires à leur sprint perdu. Le premier en veut à Dupont-Aignan qui l’aurait privé du second tour et le second à Hamon qui aurait dû s’incliner devant un concurrent réputé plus apte à défendre la gauche. Il en a toujours été ainsi par tradition française voulant que le responsable soit toujours l’autre !

Le duo de tête a par contre ses fragilités mais a parfaitement réussi son échappée vers l’arrivée de la première étape. Prenons le vainqueur provisoire de ce premier tour. Il a réussi un tour de force en réussissant à faire voter sur un programme libéral de droite des femmes et des hommes de gauche quand, dans le même temps, il récupérait des gens de droite pour leur vendre une liste mince mais réelle de mesures de gauche. Emmanuel Macron, probable futur occupant de l’Elysée sera passé du bureau de secrétaire général adjoint à celui de Président de plein exercice après une démission savamment calculée et le lancement avec le marketing approprié d’une « auberge espagnole » politique. Les habitudes et les principes de consommation des grandes villes (il réalise les meilleurs scores nationaux à Paris et dans les Hauts de Seine) ont été au cœur de sa stratégie présidentielle. Rendre un produit enviable même s’il est inutile ou sans portée, passe par l’utilisation de diverses techniques et elles ont été utilisée avec talent ! Le résultat est là puisque désormais Emmanuel Macron va s’installer fortune électorale faite, dans le fauteuil de PDG de ce qui ressemble pour lui à l’entreprise France.

Conforté par des transfuges de tous les horizons devenus de animateurs des divers rayons du Macron Market il a essentiellement récupéré une clientèle urbaine que le PS et les « ni gauche, ni gauche » avaient perdu au fil des années hollandaises. Cet étrange mélange nécessitera une navigation par sondages comme le faisaient les navigateurs soucieux de ne pas s’échouer sur le sable… mais tôt ou tard il faudra avoir recours aux pilotes professionnels pour trouver une chenal politique étroit conduisant à bon port. Rien ne dit que le voyage vers le deuxième tour sera de tout repos car les timoniers trop sûrs d’eux peuvent fort bien en louvoyant à droite ou à gauche perdre le cap ! D’autant que sur tribord les écueils existent encore malgré les assurances de quelques vigies cachant leur vraies positions !

Son adversaire d’extrême-droite a profité simplement de l’aggravation de la fameuse « fracture sociale » exploitée par Chirac en 1995. Elle s’est élargie sociologiquement et géographiquement en créant d’un coté du précipice en cours de creusement un profond sentiment d’abandon, de révolte et de trahison que la firme Le Pen exploite sans trop d’efforts. Slogans, formules creuses, exacerbation de la revanche : la recette a faut gagner un bon million d’aptes dans plus de la moitié des communes rurales de France ! Laminée dans presque toutes les villes cossues ou au moins aisées (- de 5 %) elle se rattrape dans toutes les zones de pauvreté, d’exclusion et d’isolement. Elle y construit ses scores sur les faits divers, sur le terrorisme, sur l’angoisse portée en permanence par des télévisions répétitives, sur la vie associative en voie de disparition, sur l’absence d’activités de lien social et donc sur le repli derrière des murs réputés protecteurs alors qu’ils enferment ! Elle peut presque doubler son score du premier tour en récupérant les ultras conservateurs du camp Fillon, les plus irréductibles des anti-européens ainsi que des votants décomplexés par son résultat du premier tour. Si elle dépasse la barre des 40 % elle prépare l’arrivée de 60 à 70 députés frontistes.

Le face à face télévisé annoncé pour le 3 mai prochain ne sera pas aussi simple que l’on peut l’imaginer car le langage « énarquisé » aura bien du mal à résister aux formules lapidaires. Le « renforts » de François Hollande, du premier au dernier des Ministres, du Parti des Socialistes, des figures de proue de l’ex-UMP, des revenants de tous ordres et de toutes origines constituent un inventaire susceptible de transformer ce que l’on imagine être des atouts en boulets pour aller au-delà de l’électorat du premier tour. Emmanuel Macron sera de toutes les manières, quel que soit le niveau de sa victoire celui qui aura bénéficié des anti-Le Pen pour acquérir sa légitimité. Chirac s’était il y a 14 ans, assis sur cette réalité ens e décrétant redevable à l’égard de quiconque. Il serait étonnant que le même scénario se reproduise et les tractations discrètes devraient débuter pour un gouvernement d’union nationale !

Cet article a 13 commentaires

  1. Bernadette

    Bonjour M. Darmian,

    Ce que j’ai pu observer dans ma commune (rurale) située à 35km de Bordeaux c’est la montée du FN.
    Comme l’exprimait dans le billet précédent une personne c’est un manque de services publics (transports, lieux de soins, culture (bibliothèque, cinéma, théâtre )
    Seule demeure la « religion ».

    Cordialement

  2. J.J.

    Bernadette @ :
    « Comme l’exprimait dans le billet précédent une personne c’est un manque de services publics (transports, lieux de soins, culture (bibliothèque, cinéma, théâtre ) »

    Voilà la solution, c’est comme si c’était fait ! D’un claquement de doigts, l’égérie de la France moisie va réinstaller des services publics partout, réparer la voirie, ouvrir des cabinets médicaux ruraux, supprimer le chômage, augmenter les retraites, chasser les vilains terroristes et migrants etc..!
    Mais c’est une fée(Carabosse) que l’on nous promet !

    1. Bernadette

      Bonjour JJ

      Monsieur Macron avait proposé dans le temps des autocars. Ils sont où ces autocars. La commune de Salignac recomposée en 3 communes possède une aire de co voiturage avec 2 services de bus trans gironde.
      Il me semble qu’aucun enquête auprès de la population à été organisée. C’est bien un service public ou plutôt un service au public.
      Quant à la commune sur laquelle je vis, il n’y a pas grand’chose alors que la population à sérieusement augmenté.
      Jj lorsque l’on n’a pas de pétrole on a des idées. ……….!

      1. Bernadette

        « Il me semble qu’aucune enquête » rajouter : de satisfaction.

  3. faconjf

    Bonjour,
    bonne analyse qui rejoint Mathieu Slama
    http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2017/04/24/31001-20170424ARTFIG00088-macron-le-pen-ou-le-retour-fracassant-de-la-lutte-des-classes.php
    « L’électorat de Macron réunit la France qui va bien, la France optimiste, la France qui gagne bien sa vie, la France qui n’a besoin ni de frontières ni de patrie, ces vieilles lunes de l’ancien monde: cette France «ouverte», généreuse parce qu’elle en a les moyens. La France de Marine Le Pen est la France qui souffre, celle qui s’inquiète. Elle s’inquiète de son avenir, de ses fins de mois, elle souffre de voir les patrons gagner autant d’argent, elle gronde face à l’incroyable arrogance de cette bourgeoisie qui lui donne des leçons d’humanisme et de progressisme du haut de ses 5000 euros par mois…
    La France de Le Pen perdra sans doute face au «front républicain» qui se prépare. Quoiqu’on pense de la candidate du Front national, il y a là une forme d’injustice qui interroge: la France d’en haut s’apprête à confisquer aux classes populaires l’élection présidentielle, la seule élection qui engage véritablement leur destin.  »
    Quelque soit le résultat du second tour, la deuxième France va souffrir pour enrichir encore et encore les possédants.
    Désolé ce sera sans moi, NON au fascisme et NON aux banksters!! Je vote nini demain et pendant 5 ans dans les luttes auprès des plus démunis pour défendre les acquis du CNR face aux ultra-libéraux qui vont gouverner par ordonnances.
    salutations républicaines

  4. Jouvet Fabienne

    Belle analyse, mais saloperie de situation…..nous voilà donc embarqué malgré nous, vers un vote « Macron » ….
    A gauche les louvoiements de JLM avec son appel à l’abstention, certain demandent même de voter Jean Luc Mélenchon (?!), et même une tentative pour faire annuler ce premier tour…
    Mais à la fin de tout ça, les perdants, ça sera nous, les gens, et plus encore les petites gens, car ce que j’ai entendu de « son » programme c’est « pas de salut en dehors du travail »….les moulins à vent ont gagnés, je ne reprendrais plus l’été de Don Quichote, elle est devenu bien lourde, et bien inutile.

    1. Bernadette

      Bonjour Fabienne,

      Voter pour une personne doit être accompagné d’un descriptif à l’appui. Sinon il n’y a plus rien juste l’identité de cette personne.
      Même si Macron n’est pas un prétendant convenable, je voterai pour lui.
      Quant à Marine Le Pen : qu’elles sont les causes qui font son élection de 2eme place ?
      @bientôt

      1. Bernadette

        @Fabienne,

        J’ai oublié de dire que je ne suis pas une « variable d’ajustement ».

  5. Alain E

    D’accord avec cette analyse, oui en effet , ce second tour s’ annonce compliqué et sera surement beaucoup plus serré que celui opposant Chirac à Le Pen.
    De deux maux , il faut choisir le moindre, donc pas de ni.ni, pas d’ abstention, pas de vote nul, il ,faut sauver ce qui peut encore l’ être, et pour cela , pas d’ autre choix que voter Macron.
    J’ adhère aussi a l’ analyse de Faconjf , mais je pense qu’il ne faut pas laisser la France au FN et ses apprentis sorciers, pas plus que l’ extrême droite , l’ extrême gauche n’ a sa place à la tète d’ une grande démocratie à mon humble avis.

      1. Philippe

        Sous couvert d’anti-Le Pen, maintes fois utilisé et encore rabâché, vous voudriez que je vote Macron ? Désolé, mais comment pourrai-je combattre Mme Le Pen en votant pour la politique qui est responsable de l’avènement du FN ?
        Macron, c’est le CICE et ses milliards aux patrons du CAC 40, c’est la loi Macron et l’ubérisation de la société ; c’est le travail du dimanche, c’est la dislocation du Code du travail par ordonnances immédiates et la lutte contre les syndicats indépendants… C’est, comme le dit François Hollande, « le fils qu’il aurait bien aimé avoir ».
        Et il faudrait voter pour cela ?
        Macron et Le Pen, c’est la poursuite et l’amplification des politiques réactionnaires et anti-ouvrières contre la République, contre la démocratie, contre la laïcité et contre tous les acquis sociaux, contre les services publics et contre les communes. Et il faudrait voter pour cela ?
        Je n’entends pas imposer mes vues, chacun fera comme il l’entend, dans le cadre décomposé de cette élection. Nous poursuivrons la discussion.
        Mais, plus que jamais, quoi que chacun ait voté ou votera, la question est et sera plus encore : Résistance ! Résistance en particulier aux objectifs destructeurs du patronat via l’Union européenne, dans la continuité des mobilisations contre la loi El Khomri en particulier.

  6. Lioneland

    Cher Jean Marie
    Deux petites précisions sur ton dernier post…toi qui aime la rigueur dans l’analyse je me permets de rebondir sur deux de tes affirmations. Je ne pense pas que la France sera insoumise temporairement car pour moi la politique de Macron soutenue par tes camarades socialistes Valls, Roussset et compagnie ne va que renforcer cette insoumission…
    Les Insoumis ne font pas du vote Hamon un bouc émissaire…Notre adversaire principal a été la désinformation, la caricature, le chantage exercés 15 jours durant par les médias (privés et publics), les biens pensants, les financiers qui ont vraiment eu peur…un commentateur affirmant même jeudi 13h sur BFM (vous pouvez réécouter) que Mélenchon était plus inquiétant que Le Pen car lui appliquerait son programme… B. Hamon a juste un peu contribué à cette caricature (notamment sur la question internationale, c’est dommage et cela ne lui a rien apporté…
    La bonne question c’est qui a permis que Le Pen ne soit pas première? Et surtout qui a permis qu’elle soit deuxième? Et là malheureusement le bilan du gouvernement que tu as soutenu ( et que tu juges positif dans le journal de la députée dont tu étais le suppléant) y ait pour quelque chose…Ce n’est pas Mélenchon qui a fermé des postes à l’hôpital, supprimé la ZEP de Cadillac, la trésorerie de Podensac, fait ouvrir les supermarchés le dimanche, reculé l’âge de la retraite, asphyxié les communes… Cordialement

  7. Michel

    Sous couvert d’anti-Le Pen, maintes fois utilisé et encore rabâché, vous voudriez que je vote Macron ? Désolé, mais comment pourrai-je combattre Mme Le Pen en votant pour la politique qui est responsable de l’avènement du FN ?
    Macron, c’est le CICE et ses milliards aux patrons du CAC 40, c’est la loi Macron et l’ubérisation de la société ; c’est le travail du dimanche, c’est la dislocation du Code du travail par ordonnances immédiates et la lutte contre les syndicats indépendants… C’est, comme le dit François Hollande, « le fils qu’il aurait bien aimé avoir ».
    Et il faudrait voter pour cela ?
    Macron et Le Pen, c’est la poursuite et l’amplification des politiques réactionnaires et anti-ouvrières contre la République, contre la démocratie, contre la laïcité et contre tous les acquis sociaux, contre les services publics et contre les communes. Et il faudrait voter pour cela ?
    Je n’entends pas imposer mes vues, chacun fera comme il l’entend, dans le cadre décomposé de cette élection. Nous poursuivrons la discussion.
    Mais, plus que jamais, quoi que chacun ait voté ou votera, la question est et sera plus encore : Résistance ! Résistance en particulier aux objectifs destructeurs du patronat via l’Union européenne, dans la continuité des mobilisations contre la loi El Khomri en particulier.

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