You are currently viewing Lâcher prise une autre manière d’aborder le quotidien

Lâcher prise une autre manière d’aborder le quotidien

Il faut avoir le cœur bien accroché pour parfois dans la vie publique ne pas avoir une vrai envie de lâcher prise. Il paraît même que sur le plan personnel c’est un enrichissement considérable de ne plus s’accrocher à ce qui paraît essentiel. Il faut cultiver cette facette de la vie sociale permettant enfin de cheminer de manière plus libre et plus allégée. j’ai lu l’autre jour, en attendant l’ostéopathe, dans la cabinet de soins, les principes devant forger le bonheur par le lâcher prise alors que je suis crispé, bloqué, tordu par l’idée que je dois tout à tout le monde. Quand durant toute vie vous avez été élevé dans l’idée qu’on ne refuse jamais de tendre la main ou de tout faire pour aider l’autre le fameux « lâcher prise » prend des allures de « lâcheté prise » ! Il faut bien le reconnaître qu’il est extrêmement difficile de refuser un soutien au point que parfois cette fierté à se prendre pour le sauveur des causses désespérées déclenche une forme de dépression

Au commencement de toute « prise » se trouve l’ego, une conviction, un ressenti dont tout découle. L’identification à ce très cher moi se paie au prix fort : me ressentant séparé, je vis à la fois dans la peur et dans une illusion de toute-puissance. « Seul contre tous », « Après moi le déluge », telles sont en somme les deux croyances sur lesquelles se dresse l’ego. Lâcher-prise, c’est abandonner une illusion, celle de la séparation et souffrir surtout des conséquences qu’aura son refus de s’engager. Plus vous êtes près des gens et plus l’exercice relève de l’addiction se révèle profonde et impossible à abandonner.

Je suis profondément partagé entre deux phrases : «  je ne suis plus rien allez voir ailleurs ! » ou pire « désolé mais je ne peux rien faire ! ». Je les hais toutes deux. Une horreur absolue que de s’avouer impuissant face aux déboires, aux malheurs, aux difficultés des autres… Vous avez dit lâcher prise ? Il en existe d’autres qui ne cessent d’expliquer qu’il est indispensable de… prendre de la distance ! Le drame intime c’est que le désintérêt pour l’autre revient à nier les valeurs que l’on porte en soi. Cette pratique n’exclut en rien l’aptitude à prévoir, à organiser ni ne nous dispense de nos responsabilités. L’attitude d’ouverture inconditionnelle à l’instant ne conduit nullement à baisser les bras, à tolérer l’intolérable.

Le lâcher prise, dans l’immédiateté, est totalement compatible avec l’action dans la durée. Ce n’est surtout pas se résigner mais être conscient de ses limites. Je marche dans la rue, un vieillard se fait renverser sous mes yeux. Le fait que je pratique ici et maintenant le lâcher-prise (sur des questions comme : est-ce grave ? sa vie est-elle entre mes mains ? Sa situation est-elle désespérée ?) ne me conduit pas à m’abstenir de lui venir en aide. Bien au contraire, en m’épargnant les pensées parasites ou les atermoiements, ce positionnement intérieur me permet d’agir plus vite, dans la mesure exacte de mes possibilités. Je voudrai tellement en être capable parfois quand pleuvent dans une journée les mails, les SMS, les coups de téléphone qui vous raccrochent à des situations pour lesquelles vous êtes censé trouver une solution ! C’est une demi-douzaine de situations individuelles ou collectives réputées urgentes quotidiennes qui atterrissent d’une manière ou d’une autre sur mes supports de communication et il est parfois très douloureux de faire semblant de ne pas les avoir vus ou entendus.

La « technique » du lâcher prise nous affranchirait du complexe d’Atlas portant le monde sur ses épaules et surtout de cette terrible fierté égocentrique voulant que l’on soit devenu un homme providentiel. Il devient au fil des ans extrêmement difficile de se débarrasser du plus prégnant des sentiments celui de la responsabilité envers soi-même et les autres. S’accrocher devient alors de manière fausse le fondement de la vraie confiance en soi. Tant que je me crois séparé et m’attribue un pouvoir sur ce qui est, je ne peux que me surestimer ou me sous-estimer. Dès l’instant où le moi est remis à sa vraie place, que l’on accepte ses limites, on est reconnu pour exactement ce qu’il est, avec ses forces et ses faiblesses, ses limites naturelles totalement acceptées. Enfin presque… car il est difficile voire impossible d’admettre que l’on ne peut rien faire ! On se creuse la tête pour chercher dans son réseau social une autre personne susceptible de vous aider. Sur l’écran noir de ses nuits blanches défilent les conséquences d’une incapacité avérée à aider : déception, agressivité, oubli !

En définitive être incapable de lâcher prise s’est admettre que la faiblesse n’est pas chez l’autre mais en soi. Il faut être costaud pour y parvenir… et surtout ne pas culpabiliser. Cette attitude du lâcher prise, en elle-même simple, est difficile à pratiquer. Elle va à l’encontre de mes conditionnements les plus ancrés. Toute la sagesse pratique se trouve sans doute synthétisée dans la magnifique prière des Alcooliques anonymes : « Donnez-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le courage de changer celles que je peux changer et la sagesse d’en voir la différence. » Une vraie philosophie de vie qu’il ne faut pas découvrir à 70 ans !

Cet article a 6 commentaires

  1. CRR

    j’aime bien votre dernière phrase.

  2. LAVIGNE Maria

    Difficile de lâcher prise quand toute votre vie vous avez été capable de mener de front tant d’activités et la vie familiale en plus. Votre entourage ne comprend pas que vous n’avez plus la même force même si la volonté est encore là et cela donne parfois de petites frictions ou des « deviendrais-tu égoïste ? »
    Maman me disais souvent  » votre tour viendra mes enfants » Notre tour est bien là, je le confirme, hélas…

  3. Philippe LABANSAT

    Lâcher prise, emprise de l’ego, illusion de la séparation, c’est essentiellement autour de cela que tourne la philosophie bouddhique…

  4. bernadette

    Le lâcher prise est une forme de bien être sauf que nous sommes dans un système kantien supplanté par une société patriarcale. De plus l’intergenerationnel (les jeunes et les vieux) ne s’est pas réalisé dans le lien social.

  5. Alain

    Donnez-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le courage de changer celles que je peux changer et la sagesse d’en voir la différence. »
    tout est dit!
    et il faut un peu d humilité pour se dire que les générations suivantes vont reprendre le flambeau
    cela s ‘appelle la retraite
    profites en Jean Marie
    tu as fait ton possible

  6. bernadette

    Il faut profiter de la vie parce que c’est notre vie et nous en sommes responsable.
    Lorsque je travaillais, j’ai dû mener quelques combats qui n’étaient pas essentiellement syndicaux puisque l’institut qui m’employait devait se de structurer pour faire disparaître le coeur de celui ci « la statistique publique ».
    Et puis la retraite, changement radical de vie.

Laisser un commentaire