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La loi va octroyer le droit de créer le péage urbain

On les retrouvent sur les cartes postales anciennes de Bordeaux. Trapues, calées aux entrées du Pont de pierre les « cabanes d’octroi » ont été durant des siècles les meilleures caisses publiques pour la ville qui percevaient en ces lieux, une taxe permettant aux marchandises qui allaient être vendues ou expédiées dans la cité. Par leur travail et la nécessité de les distribuer, les producteurs apportaient dans les lieux où ils étaient accueillis, une belle contribution aux budgets urbains. Les octrois furent supprimés définitivement par la loi no 379 du 2 juillet… 1943 portant suppression de l’octroi à la date du 1er août du gouvernement Pierre Laval en une période où les marchandises se raréfiaient et personne ne voulait payer pour les écouler en ville. Si l’on croît l’avant-projet de loi d’orientation des mobilités qui sera présenté au conseil des ministres début novembre les agglomérations de plus de 100.000 habitants auront la possibilité de se doter d’un péage urbain. Une forme d’octroi qui frappera les automobilistes qui n’auront pas une activité permanente sur le territoire des métropoles. Bien évidemment la création de cette taxe a des buts ambitieux puisqu’elle portera le nom de « tarif de congestion » dont l’intégralité sera reversée aux villes qui auront déterminé un périmètre d’application.
Les objectifs poursuivis sont avouables ou non-avouables: amélioration de la qualité de l’air par la réduction du trafic et le gain de temps par les déplacements collectifs mais aussi…une source de financement pour améliorer l’état de la voirie, la sécurité ou plus clairement faire entrer de l’argent dans les caisses des collectivités concernées. Bien entendu cette redevance métropolitaine concernera surtout les… gens venant de l’extérieur et ayant besoin par exemple de se rendre dans les services publics du centre ville (hôpital, consultations médicales, démarches administratives, achats contraints) ou pour travailler occasionnellement (chantiers, rendez-vous d’affaires). L’impossibilité de stationner dans des parcs de dissuasion suffisants rend aussi la mesure extrêmement discutable.
La collectivité définira les heures d’application du tarif et le prix. Un plafond à 2,50 euros est prévu par la loi mais pourra être multiplié par deux pour les «unités urbaines de plus de 500.000 habitants». Pour les véhicules supérieurs à la taille et au poids d’une automobile «un coefficient multiplicateur au plus égal à 4, selon la catégorie du véhicule» entrera en vigueur lors de la création du péage urbain. Il est heureusement prévu un dispositif minimum pour certains automobilistes, notamment ceux des propriétaires « ayant leur domicile ou leur lieu de travail dans la zone soumise à tarif de congestion ». Les véhicules des pompiers, des collectes de déchets, de la police ou des collectivités territoriales, du ministère de la défense, ceux assurant un transport public seraient exonérés
Singapour a imposé un tel système depuis 1975 pour son centre d’affaires. Les autres villes pionnières sont Téhéran (Iran), mais aussi Bergen et Oslo en Norvège. À Milan, l’expérimentation de 2008 a été pérennisée car l’impact est bon : le nombre de véhicules a baissé de 15% dès la première année (2008), puis de 31% entre 2011 et 2012. Une étude de l’Ademe conclut à l’amélioration incontestable de la qualité de l’air : baisse de 9% du dioxyde de carbone. L’Italie a poursuivi en ce sens avec des péages (Rome) et des zones à trafic limité dans 38 agglomérations. Le gouvernement suédois a choisi d’imposer un péage qui repose sur un système de détection et de facturation automatisée, et fonctionne les jours ouvrés. Londres, applique ce principe sur une superficie de 21km² (environ 3% de l’agglomération), et le tarif est fixé à 11,30 euros par passage, avec plusieurs exemptions (résidents et véhicules non polluants). Les caméras fonctionnent entre 7h et 18h du lundi au vendredi.
Une nouvelle taxe entrera donc en fonction dans un ou deux ans. Avec un stationnement hors de prix pour celles et ceux qui pourront s’acquitter du péage le résultat sera vraiment rentable pour les métropoles. A Bordeaux les prévisions budgétaires en 2016 avant l’augmentation des places payantes, des tarifs ou des sanction on évaluait la rentrée brute à…6,7 millions d’€ ! Il faudra y ajouter ce « tarif de de congestion » dont il faudrait évaluer les dégâts sur le commerce déjà en difficulté du centre ville. En effet il sera plus facile, plus « rentable » de rester sur les zones commerciales de périphérie aux parkings gratuits que d’entrer dans une zone taxée. La congestion d’ailleurs ne concerne pas souvent le cœur des zones urbanisées mais les axes d’accès qui sont toujours saturés. Comme priorité il serait bien plus utile de mettre en place une vignette de transit pour les poids lourds étrangers entrant sur le territoire national que de fliquer des automobiles pas encore totalement découragées par le prix du carburant, les tarifs de stationnement et la durée des trajets !

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