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Le Sénat au rapport… L’Elysée à la peine

La France demeure le paradis des… rapports. Des centaines de milliers obligatoires ou facultatifs sont publiés, commentés et oubliés dans une année. Tous prétendent révolutionner ou conforter le système démocratique quand bon nombre d’entre eux servent à caler les pieds d’une table ou à fixer la poussière sur des étagères de locaux pour archives. Personne ne les lit. Personne ne les utilise. Personne n’en tire des conséquences utiles à l’intérêt général et en fait leur seul intérêt c’est de financer des imprimeurs ou des entreprises louant des photocopieurs. Ces ouvrages ne servent que d’alibis puisque la seule finalité de bon nombre d’entre eux réside dans leur publication. Une fois qu’ils sont une matérialité effective ils sont simplement empilés sur un bureau ou voués au pilon.

La Cour des Comptes, réputée pourtant indispensable à la bonne gestion des deniers publics, a même décidé de les mettre sur des clés USB de telle matière qu’elle ne soit pas accusée de consommer des forêts entières. Peu importe le support : quand elle parle de l’État exemplaire, ses constats désastreux et ses recommandations souvent sévères ne suscitent que l’indifférence hautaine des Ministères concernés. Il en va différemment des constatations effectuées sur les collectivités territoriales…mais c’est ainsi que fonctionne un pays dans lequel la contestation officielle des manquements du pouvoir central ne sont soumis à absolument aucune sanction réelle.

Dès que l’on ose d’ailleurs effleurer des dysfonctionnements graves il faut s’attendre à être cloué au pilori ! L’État est réputé infaillible et exemplaire ! Il s’arroge le droit de juger les gestions des élus(es) mais à aucun moment dans ce pays il est accordé aux élu(e)s le droit de se pencher sur les réalités désespérantes de gestion au plus haut niveau de la République c’est selon le Ministre de la Justice une injuste mise en cause du Président de la République qui peut au nom de la séparation des pouvoirs faire ce que bon lui semble… et profiter, pour lui et les siens d’une immunité absolue. « Les commissions d’enquête (…) sont chargées de contrôler l’action du gouvernement. Or, dans les préconisations qui figurent à l’issue de ce rapport du Sénat, je constate que beaucoup d’entre elles concernent l’organisation interne de l’Élysée. Il me semble qu’on n’est pas complètement dans le respect de la séparation des pouvoirs », a déclare la ministre de la Justice Nicole Belloubet à BFMTV. Une déclaration qui démontre de manière éclatante que nous ne sommes plus du tout avec la constitution de la V° République dans une situation démocratique dans laquelle il existe un contrôle sur l’exécutif. Mitterrand, Chirac, Sarkozy ont été toujours au-dessus du statut réservé aux élus(es) ordinaires.

La commission du Sénat qui a enquêté sur le vaudeville révélateur de ce sentiment d’impunité enivrant les membres du cercle « sacré » de l’Élysée n’a rien fait qui puisse être contraire à la morale républicaine. Ses conclusions seront bien évidemment critiquées et dénigrées par les laudateurs du chef de l’Etat. Il ne saurait en être autrement. Il est vrai qu’ils n’inventent rien puisque on sait que la meilleure défense c’est l’attaque. Lors de son point presse hebdomadaire, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a donc dénoncé le contenu du rapport, sans plus de précision, en parlant de « contre-vérités » qui seront dénoncées en temps opportuns. On verra plus trad : le teps de remettre de l’ordre dans la boutique élyséenne.

En fait les sénatrices et les Sénateurs ont demandé au bureau de la chambre haute de saisir la justice pour « faux témoignages » contre l’ancien conseiller de l’Elysée qui dort à la Santé et  contre son complice Vincent Crase. Dans une lettre adressée au président du Sénat Gérard Larcher, la commission pointe également des « dysfonctionnements majeurs » au sommet de l’Etat, met en cause le témoignage de trois hauts responsables à l’Elysée, et recommande d’en finir avec les « collaborateurs ‘officieux’ du président de la République ». Une synthèse qui n’a rien de révolutionnaire et qui, par exemple, dans un pays du Nord de l’Europe causerait des dégâts considérables pour celui qui devrait en assumer la responsabilité… En France, rien ou pas grand chose : « séparation des pouvoirs » et donc circulez il n’y a rien à voir.

La morale, les valeurs, les principes s’effritent chaque jour un eu plus et surtout la sévérité, prônée à l’encontre de biens des citoyens(nes), qui ne cesse d’être réclamée, exigée, votée et surtout mise en œuvre. Elle repose sur des garde à vue, des constats, des présomptions, des interdictions préventives. Les dénégations ne servent à rien. La période actuelle donnera lieu, un jour, à des rapports, de multiples rapports dont le contenu ne sera connu que de celles et ceux qui l’auront écrit. Pour le reste il faut se résigner : le mensonge, sous serment, n’est pas une faute mais un poison mortel pour la République qui ruisselle dans les esprits les plus fragiles de notre pays. Une part de l’avenir de la délocratie représentative national est en jeun !

Cet article a 3 commentaires

  1. Bruno DE LA ROCQUE

    J’ai noté, ce matin, que parlant dans son billet politique quotidien de France-Inter, de ce sentiment d’impunité manifesté à l’Elysée, Thomas Legrand a dit « sauf semble-t-il sous François Hollande ». Avouons qu’il est tout de même paradoxal (si ce n’était pas aussi grave, j’écrirais « cocasse ») que, passant derrière un politicien de l’ancien monde, très représentatif de cet ancien monde qui plus est, le nouveau président élu sur ce modernisme d’intentions affiché ait, lui, rétabli les mauvaises habitudes du sommet de l’exécutif (au nom du « élu directement par le suffrage universel ; circulez parlementaires, y a rien à voir ! »).

    Deuxième remarque, le Parlement, au moins le Sénat en l’affaire, fait son boulot de « contrôle » de l’exécutif. Car s’agissant de la sécurité du Chef de l’Etat, c’est affaire de gouvernement et non du seul président lui-même.

    Enfin, quant aux rapports… Jean-Marie, effectivement… Et c’est à tous les niveaux de l’édifice républicain. Rapports, création de commissions (comités Théodule disait « mongénéral »), d’agences, de Hauts-Commissariats ou Hautes-Autorités en haut de la superstructure ; groupes de travail dans les rouages intermédiaires et de base, consultations, experts désignés, et… une élection chassant l’autre et faisant l’actualité on oublie, on enterre. Sous le quinquennat précédent on a enchaîné des européennes, des municipales, des régionales, des départementales alors que, déjà notre macrocosme pensait future présidentielle…

  2. J.J.

    S’inspirant de son glorieux prédécesseur, notre président au petit pied, pourra déclarer, en escamotant cette affaire, comme jadis on fit disparaître Ben Barka :

    « Ce qui s’est passé n’a rien que de vulgaire et de subalterne. »

    Le regain de l’antisémitisme et sa condamnation, voilà un beau mais lamentable chiffon rouge, qui arrive à point pour attirer l’attention du peuple sur autre chose que cette sordide histoire (une affaire d’état, en réalité) qui sème le doute sur la moralité et l’honnêteté d’autres proches du pouvoir, eux aussi mis en cause dans de troubles affaires.

    Mettre en doute les conclusions de la commission d’enquête du Sénat, nos « patres conscripti », voilà des gens qui ne manquent pas d’audace !

    Présomption d’innocence ?
    Certes, mais c’est un terme ambigu : pour que l’on invoque la présomption d’innocence bénéficiant à un prévenu, c’est qu’il y a en corollaire une présomption de CULPABILITÉ.
    CQFD

  3. Bernadette

    Bonjour,
    Curieux ces histoires de passeports diplomatiques. Il me semblerait justifié de revoir l’usage de ces passeports diplomatiques.
    Pourquoi et comment ces passeports diplomatiques sont ils delivrés ? Quelles missions ces usagers ont ils fait avec ces passeports diplomatiques ?
    Y a t’il un contrôle de l’usage de ces passeports ?

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