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Le poker menteur municipal en marche

Surgi.e.s parfois de nulle part dans la citoyenneté des député.e.s ont profité du « dégagisme » consécutif à l’élection d’un Président promettant un nouveau monde. Logique. La lassitude des électrices ou des électeurs à l’égard des porteur.teuse.s d’étiquettes réputées dépassées a donc bouleversé l’échiquier politique. Le Parlement jugé lointain, déconnecté de la réalité du quotidien, avec un absentéisme coupable, rassemblant des privilégié.e.s a été peuplé de personnes majoritairement respectables mais sans vraies racines territoriales.

En fait les analystes politiques savent que le seul scrutin sur lequel les votes peuvent fonder une durabilité de l’engagement en faveur d’un courant de pensée est celui des municipales. Ainsi celui de 1977 préludait à l’avènement du socialisme de 81. Jamais la Gauche n’a retrouvé une embellie similaire même si 2008 ne fut pas un mauvais cru. Le rendez-vous de mars 2020 sera en effet révélateur de l’évolution des positions nationales ultérieures. Il n’est absolument pas acquis que ce soit la révolution en marche.

Un sondage IFOP-Fiducial, significatif par la taille de son échantillon (10 129 personnes interrogées dans des villes de plus de 10 000 habitants) ouvre peu de perspectives de ce genre. La taille des communes concernées ne permet pas d’en tirer des conclusions sur le monde rural ou sur des collectivités dans lesquelles la personnalité du maire joue un rôle essentiel.

On peut néanmoins en déduire une tendance générale à la stabilité. Il semble que le renouvellement ait pour beaucoup de gens montré ses limites et que les « sortant.e.s » ayant effectué leur boulot n’ait rien à craindre des novices voulant simplement s’installer sur des territoires duqel ils se sont désintéressés durant les mandats antérieurs.

Selon ce sondage 54 % des personnes consultées disent souhaiter qu’à l’issue de son mandat, en 2020, leur maire actuel soit réélu (+ 4 points par rapport à octobre 2017) ce qui voudrait dire que le scrutin municipal devrait être globalement favorable aux sortants . L’électorat a pris conscience que la nouveauté n’est pas un gage de réussite dans la gestion. Les deux tiers des Français jugent leur maire compétent (67%), honnête (67%) et dynamique (64%). Il est l’élu le plus populaire auprès de 63% des Français, selon une autre enquête sondage Odoxa-CGI. C’est 4% de plus qu’en 2015.

Le premier magistrat communal est par exemple quatre fois plus connu que le président de région et le député, cinq fois plus que le président de département et six fois plus que le (la) sénateur.trice. Il est certain que selon les circonscriptions ces effets de notoriété sont encore plus accentués.

Ces constats ont conduit les stratèges électoraux présidentiels à se mettre en… marche arrière. Plus d’espoir du grand soir similaire au législatives. On a revu pragmatiquement le plan de bataille. Les têtes de liste seront beaucoup moins nombreuses que prévu. Ainsi le cap nouveau est aux alliances.

Les marcheurs.euses vont mettre leur étiquette dans leur poche (trop dangereux) et jouer la pluralité de listes où il est possible d’en constituer une. Même les militant.e.s endurci.e.s ne se présenteront pas sous le pavillon LREM et éviteront de se réclamer de la politique nationale. On va infléchir lentement les objectifs !

Leur objectif est de jouer aux faiseurs de « rois » ou de « reines » au second tour. La consigne est claire : vendre le ralliement contre des places à l’intercommunalité !

L’impasse sur le niveau communal dont on sait dans les Ministères qu’il sera très difficile à tenir dans le mandat futur a été réaffirmée. LREM ne comptera pas les villes conquises mais celles qu’il a aidées à conquérir et il vantera son nombre d’élus locaux « sympathisant.e.s » pour démontrer son nouvel ancrage.

Actuellement on sautera en marchant cette « obstacle » qui se profile. On bosse dur en semi-secret sur une profonde réforme territoriale. Quelques député.e.s imprudent.e.s l’ont récemment expliqué à une délégation de présidents de conseils départementaux. Tout est à échéance de deux ou trois ans… et doit être comme un puzzle dispersé sur plusieurs lois qui seront votées avant 2021.

Privés de toute autonomie de gestion dès 2022 les départements sont voués à une extinction naturelle. L’installation du Revenu Universel d’Activité va poser le problème clé de qui va gérer le RSA et la PCH. Trois des allocations fusionnées viennent de la CAF et le concept d’une fusion CAF-services départementaux est à l’étude mais… après les municipales et les départementales.

Il deviendra possible de confier à la CAF sans vrai pouvoir de décision politique, la gestion de la totalité de allocations individuelles de solidarité. Le reste de la solidarité pourrait alors être attribué aux intercommunalités… qui en 2026 seraient élues au scrutin de liste. D’où l’importance cruciale de les maîtriser sur le prochain mandat. Les municipales vont ressembler à une gigantesque partie de poker menteur… et donc on va laisser les sortants déguster l’air pollué des campagnes !

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