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CICE : qui peut le pneu peut le moins

Les aides publiques accordées au milieu économique constituent une anomalie dans ce monde de la concurrence libre et non faussée. A partir du moment où le libéralisme repose sur l’initiative privée, les investissements devant être rentables, les profits redistribués aux actionnaires il n’y a aucune justification au versements de subsides publics. Mieux comme il n’y a aucun contrôle sur l’utilisation de ces derniers tous les abus sont permis. Des astuces comptables permettent ainsi de renvoyer vers les bénéficiaires des dividendes, des fonds issus des contributions individuelles des salariés !

Il en va ainsi du CICE (Crédit d’impôt compétitivité emploi), créé en 2013, qui constitue un dispositif d’aide aux entreprises représentant 4% de la masse salariale la première année (dans la limite de 2,5 fois le Smic) et 6% les années suivantes. Il a été transformé, en 2019, en une baisse de cotisations patronales ce qui bien évidemment pose des problèmes à tous les systèmes de solidarité puisque les recettes baissent.

Mieux pour donner aux départements, principaux acteurs de la solidarité humaine vers les personnes âgées, handicapées ou celles qui n’ont que le RSA les ressources dont ils ont besoin on va décidé de leur allouer la TVA collectée par le milieu économique. Le fameux CICE prend alors sa vraie signification : augmenter indirectement les bénéfices qui font la véritable compétitivité des références du CAC 40 !

Michelin a par exemple reçu de 65 millions d’euros au titre de cette mesure et en fait un usage discrétionnaire dont les représentants du personnel ont été informés à posteriori. L’exemple est vraiment révélateur de la manière dont les grands groupes ont contourné leurs obligations d’investir.En 2018, par exemple, selon un article de Libération.fr a attribué 23,3 millions d’euros de CICE à ses sites de Roanne, de Montceau-les-Mines, du Puy-en-Velay ou encore des Gravanches, pour améliorer les lignes de fabrication ou acquérir de nouvelles machines.

L’usine qui va fermer de La Roche sur Yon aurait été soutenue… par seulement 4,3 millions d’€ pour renforcer en 2017 sa capacité de production et moderniser une production délaissée depuis pas mal de temps. Une illusion quand on sait que quelques temps après cette « attribution » de la part du gâteau CICE un décision contraire tombait : inutile d’investir en Vendée ! On allait fermer ou du moins on en envisageait de le faire.

Si on avait bien acheté des machines modernes elles ne seraient pas affectées sur le site… En fait il s’agit d’une entourloupe puisque 2 sur 8 sont restées sur place. Les machines toujours dans leur emballage payées de fait par le contribuable français ont immigré vers l’Espagne, la Roumanie et la Pologne. Un moyen de rendre ces usines plus compétitives et donc d’enterrer la production française. Ce qui est fait est fait et il ne sera pas question de réclamer un quelconque remboursement des millions ayant faussé la concurrence à l’intérieur de l’Union européenne.

«Nous rembourserons les aides régionales, notamment parce que les objectifs en termes d’emplois n’ont pas été tenus, mais pas le CICE »,avoue sans vergogne la direction. Il n’est « pas assujetti à des critères spécifiques sur l’emploi, mais était destiné à soutenir les entreprises dans leur politique d’investissement » (sic). Avec un corollaire : mais pas en France !

Le gouvernement applique le fameux principe des cours de récréation : « donné, repris, volé » qui permet au milieu économique de n’avoir à se justifier que sur des factures mais jamais sur la finalité de son action. A partir de cet exemple on peut imaginer que le CICE s’envole dans des dépenses sans rapport avec l’amélioration des conditions de travail, de la baisse des coûts de production, de la modernisation de l’outil de travail mais les syndicats même s’ils le constatent ne peuvent pas en réclamer le remboursement à l’Etat.

En Gironde on le sait bien avec le scandale de Ford qui a récupéré tant que c’était possible toutes les aides publiques sans jamais réellement respecter ses engagements. Combien de CICE a été versé sur le site de Blanquefort ? On ne le saura jamais. Où est-il passé ? On ne le saura jamais. S’est il ajouté aux subsides publics alloués pour garantir le maintien des emplois ? C’est certain. Ford est parti sans sortir un seul euro de son escarcelle puisque sinon cumule 24 millions d’aides publiques diverses et le CICE touché on atteint une somme nettement supérieure aux 18 millions dont 4 de valorisation du terrain d’assise de l’usine. Mais chut…Bercy n’a rien vu !

Cet article a 3 commentaires

  1. Morland

    Quelle analyse ! Il serait salvateur que le plus grand nombres de décisionnaires lisent votre texte, de droite à gauche… car sans doute avec sincérité, certains membres du PS ont cru en ce dispositif (il est vrai mis en place par François Hollande…) néanmoins, ils se sont fourvoyés dans une posture qui ne tient pas. Dans CICE il y a compétitivité, et donc performance, certes il faut de la gagne en économie comme ailleurs, mais qui sont toujours souvent les gagnants ? Et qui sont trop souvent les perdants ?
    … Il me semble que vous y avez répondu Monsieur Darmian. Merci à vous.

  2. J.J.

    MORLAND « car sans doute avec sincérité, certains membres du PS ont cru en ce dispositif  »
    PS, ça veut bien dire parti socialiste ? Non ? Et des individus qui se prétendent socialistes ont cautionné cette entourloupe ?
    Ils ne connaissent pas la moralité plus que douteuse des responsables du CAC 40 ? Naïfs à ce point ?
    C’est vrai qu’il vaut mieux truander Bercy de quelques milliards que voler un camembert, on risque moins d’aller en prison.

    1. Morland

      J.J, j’essaie d’être un homme de nuance, et bien que je n’ai jamais cru en cette politique, j’accorde le bénéfice du doute à certains membres du PS qui ont fait fausse route car quelques uns sont des gens de qualité, je ne peux le nier.
      Le CICE n’étant pas censé s’appliquer uniquement à des entreprises du CAC très peu recommandables de par leurs responsables/ leurs structures/leurs méthodes mais également à des entreprises bien plus modestes, l’argument pouvait en convaincre plus d’un. Mais en effet, je l’admets, c’était naïf » au mieux …
      Mais « la critique est facile, l’art difficile », j’essaie donc de ne pas tendre naturellement à une part de mon caractère qui se révèle « péremptoire » car je sais qu’il est bien plus aisé de commenter que d’agir et de ce fait, s’exposer sans cesse aux critiques de celles et ceux qui ne se réalisent jamais autrement que dans les mots.

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